Autisme : nouveau rapport alarmant de l'Igas

Autisme : nouveau rapport alarmant de l'Igas

11.05.2017

Action sociale

Les rapports de l'Inspection générale des affaires sociales se suivent et se ressemblent : la France continue à accuser un retard important en matière de prise en charge de l'autisme. Malgré quelques avancées permises par le 3e plan autisme, les blocages restent encore trop nombreux. Pour le 4e plan en préparation, l'Igas souhaite une nouvelle approche.

Avant d'arriver à l'Elysée, Emmanuel Macron doit avoir, parmi les milliers de courriers qui lui ont été adressés depuis son élection, une lettre ouverte de l'association Autisme France. Que dit-elle ? "La question de la prise en charge de l’autisme est d’une urgence absolue dictée par le retard pris à répondre aux besoins des personnes et de leurs familles, littéralement abandonnées par les pouvoirs publics." A l'appui de ce constat sans appel, l'association dirigée par Danièle Langloys cite le rapport que l'Igas vient de rendre public sur l'avancée du 3e plan autisme.

Eau chaude et douche froide

L'Inspection générale des affaires sociales (Igas) est généralement plus habituée à l'eau tiède qu'à l'eau chaude. Et pourtant, ce nouveau rapport (voici un an, elle signait un rapport sur les centres ressources autisme - CRA - lui aussi très critique) devrait faire l'effet d'une douche froide tellement le diagnostic des inspecteurs est implacable. Bien sûr, reconnaissent-ils, certains progrès ont été réalisés à la faveur du 3e plan autisme (2013-2017) Celui-ci "a permis d'inscrire à l'agenda politique une grande cause nationale, déclinée en mesures et actions, servant de référence à l'ensemble des acteurs", se félicite le rapport.

Action sociale

L'action sociale permet le maintien d'une cohésion sociale grâce à des dispositifs législatifs et règlementaires.

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Immobilisme dommageable

Un cadre intéressant existe, mais malheureusement, note l'Igas, le fait que certaines mesures soient reconduites d'un rapport à l'autre témoigne d'un immobilisme dommageable. Pour avancer, plusieurs éléments manquent cruellement : une distribution des moyens qui ne soit pas exclusivement réservé au médico-social, une impulsion nationale, une articulation plus franche avec les co-financeurs que sont les départements... L'Igas souhaite également que soient élaborés des indicateurs permettant de mesurer l'avancée du chantier.

Loi santé du 26 janvier 2016

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Des professionnels de santé négligés

Point positif : la possibilité d'échanger des points de vue différents est moins difficile qu'auparavant. "Si le dialogue national et local n'est pas complètement apaisé, des éléments de convergence apparaissent fortement", écrit prudemment l'inspection. Les difficultés demeurent fortes et sont de plusieurs ordres.

D'une part, il existe une dichotomie entre les intentions interministérielles et la réalité d'un plan autisme qui reste d'abord le fait du médico-social. Même si l'initiative des unités d'enseignement en école maternelle (UEM) est saluée et témoigne d'un engagement de l'éducation nationale, le plan autisme reste d'abord l'affaire des professionnels du médico-social. A ce titre, l'Igas regrette que ne soit pas associés réellement des interlocuteurs aussi déterminants que les professions de santé concernées (pédiatres, orthophonistes, psychologues, etc.).

Les pouvoirs publics face à un dilemme

D'autre part, la cause de l'autisme a été ralentie par des questions administratives : la réorganisation des agences régionales de santé suite à la recomposition des régions, mais aussi le manque de transversalité dans les ARS (avec l'organisation en silos, notamment). Les pouvoirs publics sont, avec l'autisme, face à un dilemme : soit ils tentent de la raccrocher à la politique générale sur le handicap et alors ses spécificités échappent à celle-ci ; soit ils conçoivent un plan bien identifié et alors celui-ci exclut de facto un tas d'initiatives en marge de la question. Décidément, l'autisme repérésente un casse-tête pour les politiques publiques...

Moins de 50 % des places réalisées

De façon très précise, la question du diagnostic reste un point noir du plan. "Les schémas régionaux échouent pour l'instant à mettre en oeuvre un repérage des troubles neuro-développementaux en proximité", déplore l'Igas. Les CRA sont souvent en première ligne et dès lors débordés.

Même quand la personne est détectée, la prise en charge fait souvent défaut. La faute, notamment, au retard de programmation des places nouvelles. Alors que le plan se termine dans 6 mois, moins de 50 % des places qui devaient être réalisées l'ont été effectivement. Près de 2 000 places prévues sont (pour l'instant) restées en plan. De ce fait, les orientations restent toujours aussi éloignées des besoins des enfants. Le rapport note également que l'accès à la santé est difficile pour nombre de personnes autistes. Un constat qui ne change pas beaucoup d'année en année...

Hé ho, les adultes autistes existent...

Outre le diagnostic, le manque de places, le troisième point noir concerne les adultes dont les pouvoirs publics ont bien du mal à se préoccuper, notamment pour le logement et de l'insertion professionnelle (lire, à ce propos, les propositions de Josef Schovanec). Mais l'Igas place quelque espoir dans le développement de l'emploi accompagné - présent dans la loi Travail - et du logement inclusif.

Changer de braquet avec les familles

Les familles sont également maltraitées. Même si la formation des aidants s'est améliorée, les propositions ne sont pas à la hauteur des besoins. Il faudrait, estime l'Igas, aller vers "la guidance parentale dès la suspicion ou l'annonce du diagnostic, [jusqu'à] l'accompagnement, y compris à domicile, et l'éducation thérapeutique". Pour avancer, il faut changer clairement de braquet.

 Que réorienter dans le 4e plan ?

Comment éviter que le 4e plan actuellement en préparation ne connaisse les mêmes handicaps que le 3e qui se termine ? L'Igas propose plusieurs types de recommandations. D'une part, il convient de mieux insérer les actions sur l'autisme dans le cadre d'une politique sur le handicap. D'autre part, l'autisme doit réellement être pris en compte par l'offre de soins. De même, les soins devraient être de qualité et rapides pour éviter autant que faire ce peut le développement de diverses incapacités.

Inclusion en milieu ordinaire

Enfin, l'Igas réaffirme l'objectif de l'inclusion en milieu ordinaire. Cela passe par une gouvernance élargie aux acteurs de l'éducation et de la santé, actuellement aux abonnés absents. Seraient-ce là des recommandations ayant des chances d'être intégrées dans le 4e plan ou qui resteront des voeux pieux ? Rendez-vous dans quelques années... pour ceux qui ont la patience d'attendre.  

Noël Bouttier
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