Bail commercial : destruction de la chose louée par cas fortuit

23.07.2018

Gestion d'entreprise

L'incendie qui se déclare dans les locaux d'un colocataire et dont la cause n'est pas déterminée ne caractérise pas un cas fortuit.

Un incendie se déclare dans une salle de spectacle et se propage dans les locaux voisins exploités par deux sociétés commerciales. Les choses louées étant détruites au sens de l’article 1722 du code civil, la bailleresse notifie la résiliation de plein droit du bail à chacune de ces deux sociétés.

La bailleresse et ses assureurs sont assignés par les deux sociétés en indemnisation des troubles de jouissance subis. La cour d’appel rejette les demandes des deux sociétés au motif que la cause de l’incendie est indéterminée. Elle en déduit par application de l’article 1722 du code civil que la bailleresse est exonérée de tout dédommagement.

Son arrêt est cassé et annulé par la haute juridiction. La cour d’appel a violé :

- l’article 1722 du code civil, par fausse application, l’incendie qui se déclare dans les locaux d’un colocataire et dont la cause n’est pas déterminée ne caractérisant pas un cas fortuit ;

- l’article 1719 du code civil, par refus d’application, le bailleur étant responsable envers les autres locataires des troubles de jouissance du fait de l’incendie.

Remarque : au cours du bail, si la chose louée est détruite par cas fortuit, que la destruction soit totale ou partielle, il n’y a lieu à aucun dédommagement par application de l'article 1722 du code civil (Cass. 3e civ., 9 déc. 2009 n° 08-17.483). Encore faut-il qu’il y ait bien cas fortuit, à savoir que la destruction ou la perte de la chose louée (à laquelle est assimilée l’impossibilité de jouir conformément à la destination du local - Cass. 3e civ., 8 mars 2018 n° 17-11.439) ait pour origine un événement indépendant de la volonté des parties et ne pouvant être imputé à aucune d'elles. Or, selon la cour de Cassation, la cause d’un incendie non déterminée ne caractérise pas un cas fortuit. Cette notion de cas fortuit est proche de celle de force majeure, à telle enseigne que le nouvel article 1218 du code civil (depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats) a supprimé la référence au cas fortuit et ne mentionne que la force majeure.
Stéphane Ingold, Avocat à la Cour, associé (www.Gouache.fr)

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