CGT - FO - Sud : "On a atteint un point de rupture dans le secteur"

CGT - FO - Sud : "On a atteint un point de rupture dans le secteur"

06.02.2017

Action sociale

Lors de la conférence salariale du 3 février qui a annoncé un taux d'évolution de la masse salariale de 1 %, CGT, FO et Sud ont fait une déclaration commune exigeant de fortes augmentations de salaire. Elles prévoient une grande mobilisation nationale le 7 mars, espérant cristalliser le ras-le-bol observé notamment dans les hôpitaux, les Ehpad et l'aide à domicile.

La sainte Félicité leur portera-t-elle chance ? Le 7 mars, les trois organisations syndicales CGT, FO et Sud appellent l'ensemble des salariés de la santé, de l'action sociale et des organismes sociaux à faire grève et à manifester en masse à Paris (ce sera normalement entre Denfert-Rochereau et Invalides). Y'aura-t-il foule ? "Ce qu'on peut vous dire, c'est que nos chiffres seront supérieurs à ceux de la police", glisse, un rien taquin, Pascal Corbex, responsable de la fédération nationale de l'action sociale (Fnas) FO.

L'exaspération monte

Plus sérieusement, l'intersyndicale estime que tous les ingrédients sont réunis pour réussir une forte mobilisation ce 7 mars. Selon elle, la situation devient intenable sur le terrain. Lors d'une conférence de presse organisée au siège de FO quelques heures avant la conférence salariale du secteur sanitaire et social (lire encadré), les témoignages d'exaspération se sont multipliés. Florilège. Josette Ragot (FO) : "Les filles dans l'aide à domicile sont habituées à être mal payées, mais elles doivent faire la toilette et servir le repas en 20 minutes." Une autre syndicaliste: "Les éduc qui travaillent avec des autistes voient qu'ils sont en danger. Faute de personnel, on les surmédicalise. Et à cause d'horaires décalés, tout le monde ne participe plus aux réunions de synthèse."

De plus en plus de salariés en-dessous du Smic

Evidemment, la question des rémunérations cristallise tous les mécontentements. L'absence de revalorisation est jugée scandaleuse. "Alors que les salaires sont bloqués, l'inflation de 2011 à 2017 s'établit à 5,16 %", écrivent les syndicats dans une déclaration commune lue en ouverture de la conférence salariale qu'ils devaient quitter ensuite ("celle-ci n'est plus qu'une chambre d'enregistrement", dénoncent-ils). Résultat des courses : de plus en plus de salariés mal payés se retrouvent en dessous du Smic. Selon Xavier Guillot, responsable de la fédération santé et action sociale de la CGT, c'est le cas de 42 métiers, rien que dans la CCN 51. Dans ce secteur qui emploie 250 000 salariés, poursuit le syndicaliste, il faudrait injecter plus de 2 milliards d'euros pour réviser les grilles et remettre les personnels à des niveaux de salaires acceptables. Faute de quoi, les AMP et les aides-soignants se retrouveront bientôt payés au salaire minimum.

Blocage sur les revalorisations de salaire

L'intersyndicale s'étrangle en voyant que les timides demandes de revalorisation des rémunérations formulées par les fédérations d'employeurs sont retoquées par le ministère. Elle croit savoir que la demande d'augmentation de 2 centimes, formulée par Nexem, du point d'indice dans la CCN 66 serait bloquée par le ministère. Sans compter l'absence de remboursement intégral des frais de déplacement dans l'aide à domicile. Dans ce secteur, les syndicalistes signalent la colère de nombreux salariés qui ont vu leur rétribution, déjà mince, amputée par le coût de la prévoyance désormais obligatoire. D'autre part, la précarité dans ces professions (10 % des salariés de la CCN 66 seraient en CDD), est vivement dénoncée, tout comme la progression du nombre de bénévoles et de "faisant fonction".

"Ceux qui collaborent et ceux qui résistent"

Devant la gravité des problèmes sociaux, pourquoi les syndicats de salariés ne font-ils pas front commun, voire pourquoi des alliances ponctuelles ne sont-elles pas possibles avec les fédérations d'employeurs pour exiger que l'Etat desserre un peu les cordons de la bourse ? Poser cette question aux responsables syndicaux vous expose à une réplique cinglante : "Il n'y a pas trois camps [les syndicats contestataires, réformistes et les fédérations, NDLR], mais deux : ceux qui collaborent et ceux qui résistent. Il n'est pas question de nous acoquiner avec des syndicats qui veulent appauvrir la protection sociale". Voilà la CFDT, la CFTC et la CGC prévenues... Quant aux fédérations d'employeurs, l'intersyndicale se demande s'il est toujours utile de négocier avec elles dans la mesure où celles-ci se plaignent de n'avoir aucune marge de manoeuvre financière.

Débat sur le calcul du GVT

De plus, sur la question du GVT (glissement vieillesse technicité), les trois organisations syndicales contestent son mode de calcul. "Nexem a fait travailler des experts qui ont établi que le GVT devrait être de 0,74 % en 2017. Or, l'organisation a finalement retenu un taux à 0,88 % qui intègre simplement le V de vieillissement, pas le T de technicité. Du fait de la précarisation des métiers, l'augmentation de la technicité est très inférieure à ce chiffre." Conclusion des syndicats : Nexem a un peu de mou pour augmenter les salaires alors qu'elle estime que la faible augmentation de la masse salariale est quasiment entièrement absorbée par le GVT.

CITS : méfiance, méfiance...

Question subsidiaire : les ressources qui vont être amenées par le crédit d'impôt de taxe sur les salaires (CITS) peuvent-elles donner une bouffée d'oxygène au secteur ? Même si, prudente, l'intersyndicale réclame que "4 % de la masse salariale soient intégralement consacrés à la revalorisation salariale", elle n'applaudit pas au CITS; et ce pour deux raisons. D'une part, sur le plan des principes, tout avantage fiscal se traduit par uen baisse de ressources pour l'Etat qui risque de se répercuter sur le secteur. D'autre part, la majorité des financements dépendant des collectivités locales (notamment départementales), les syndicats craignent que leur chasse aux économies les amènent à rogner encore les budgets.

De plus en plus de grèves dans les Ehpad et l'aide à domicile

On l'aura compris, les clignotants sont partout au rouge. Cela se traduit par une montée de la conflictualité dans les établissements de l'aide à domicile (dans le Nord ou la Somme, par exemple) ou les Ehpad (lire notre enquête) qui n'ont guère la culture de la grève. "On atteint partout un point de rupture", estime Pascal Corbex pour qui le contexte politique (la proximité des élections et le climat délétère) pourrait favoriser la mobilisation des salariés. Qui devrait être stimulée par les quatre meetings régionaux (Strasbourg, Toulouse, Angers et Paris) organisés avant la journée du 7 mars.

 

1 % d'augmentation de la masse salariale

Les années se suivent et se ressemblent. Après 1 % en 2016, voilà 1 % en 2017. Commentaire de la DGCS au sortir de la traditionnelle conférence salariale des ESSMS du secteur privé non lucratif. "Dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques, le gouvernement a décidé de soutenir ce secteur en fixant un taux d'évolution de la masse salariale de 1 %, ce qui représente 220 millions d'euros en faveur des rémunérations." Rappelons que ce secteur compte 1,7 million de salariés.

D'autre part, la DGCS confirme que les sommes du CITS ne sont pas intégrées dans ce taux d'évolution dont la modestie risque d'irriter sensiblement les organisations syndicales.

     

Action sociale

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Noël Bouttier
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