Crédit bancaire : mise en garde en cas de risque lié à un endettement excessif

16.10.2018

Gestion d'entreprise

Le banquier dispensateur de crédit, est tenu envers un emprunteur non averti d'un devoir de mise en garde en cas de risque lié à un endettement excessif.

Le principe est connu : le banquier dispensateur de crédit est débiteur d'un devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur non averti, si le prêt est inadapté aux capacités de remboursement de celui-ci, ce qui fait naître à son détriment un risque d'endettement excessif.

En l’espèce, les juges du fond suivant en cela l’argumentation de la banque, constataient que s'agissant d’un prêt immobilier souscrit par l’emprunteur, l’apport personnel et ses revenus, à hauteur de 1 960 euros par mois, permettaient à cet emprunteur, de régler les frais d'architecte et de notaire ainsi que les premières mensualités du prêt, jusqu'à ce que le bien immobilier soit construit et donné à la location, générant ainsi des loyers d'un montant de 2 800 euros, et que la somme prêtée de 300 000 euros pouvait ainsi être investie dans les frais de construction, de sorte que le crédit consenti n'était pas de nature à faire naître un risque d'endettement au regard de la situation financière dudit emprunteur.

La première chambre civile de la Cour de cassation casse la décision en soulignant que le banquier dispensateur de crédit, qui est tenu envers un emprunteur non averti d'un devoir de mise en garde, doit prendre en compte l'ensemble des charges de l'emprunteur supportées au titre d'autres prêts, sans être tenu de prendre en compte les profits attendus de l'opération ainsi financée.

Dans un autre domaine, celui du cautionnement, cet arrêt n’est pas sans rappeler le principe selon lequel ne peuvent être pris en considération pour apprécier la disproportion de la garantie au moment où elle a été souscrite, les revenus escomptés de l’opération garantie, sachant qu’il doit, en revanche, être tenu compte des revenus réguliers perçus par la caution jusqu'à la date de son engagement (Cass. com, 5 sept. 2018, n° 16-25.185).

A ce titre quid lorsque la caution invoque un revenu exceptionnel qui ne doit pas selon elle entrer en considération pour estimer sa solvabilité en raison de sa nature. L’argument du caractère exceptionnel ne peut à notre sens être reçu. En effet quelle que soit la nature du revenu, ce dernier est entré dans le patrimoine de la caution (ou de l’emprunteur), au moment de l’octroi du crédit et peut donc participer au regard de l’article L. 332-1 du code de la consommation à l’estimation de la solvabilité de l’intéressé !

Il convient de noter que l’ensemble des biens mobiliers ou immobiliers de la caution doit être pris en considération et à ce titre, le caractère manifestement disproportionné de l'engagement de la caution s'appréciant au regard de l'ensemble de ses biens et revenus, même lorsque son patrimoine inclut un bien immobilier affecté à sa résidence principale, c'est à bon droit que le juge du fond prend en compte l'épargne et le patrimoine de la caution, constitué de sa maison d'habitation afin d'apprécier la disproportion alléguée de son engagement (Cass, 1re civ., 26 sept. 2018, n° 17-16.772).

Patrice Bouteiller, Docteur en droit, Senior of Counsel, Cabinet Ravet et Associés

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