"Eviter", le grand oublié de la séquence "Eviter, réduire et compenser"

23.08.2017

Environnement

Un séminaire souligne les difficultés de mise en oeuvre de cette phase, alors pourtant qu'elle revêt une importance déterminante dans la réalisation d'un projet.

La séquence "Éviter, réduire, compenser" (ERC) a été introduite en droit français avec la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature et a par la suite fait l'objet de compléments réglementaires. Ainsi, l'étude d'impact doit préciser les mesures pour " - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. » (C. envir., art. R. 122-5).

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

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Le comité national de pilotage national ERC a souhaité se saisir de la question de la place de l'évitement dans la séquence ERC, car il s'agit d'une étape déterminante pour permettre un meilleur bilan écologique du projet, plan ou programme, plus acceptable par la société civile et à un coût économiquement supportable pour le maître d'ouvrage.

Une phase cruciale pour la réalisation d'un projet

Un séminaire a été ainsi organisé à l'initiative du Commissariat général au développement durable (CGDD) du ministère de la transition écologique afin d'échanger sur la mise en oeuvre et la valorisation de cette phase. Il s’est déroulé autour de quatre tables rondes : l’évitement aujourd’hui ; les outils à disposition de l’évitement ; exemples de mesures d’évitement à l’échelle des plans/programmes et leur articulation avec les projets ; exemples de mesures d’évitement à l’échelle des projets.

 

C’est dès l’amont du projet (cahier des charges, études préliminaires) que les grands choix d’évitement (comme, par exemple, l’évitement géographique) sont encore possibles, alors qu’ils le sont de moins en moins au fur et à mesure de l’avancement du projet. Les plans et programmes relèvent également d’une grande importance en fixant le cadre stratégique du développement territorial.

Une phase peu valorisée réglementairement et techniquement

Il ressort de l'examen de la législation que la majeure partie des évolutions réglementaires, y compris les plus récentes se focalisent sur la phase de la compensation écologique. Ainsi la loi Biodiversité du 8 août 2016, si elle améliore l'ensemble de la séquence ERC se focalise majoritairement sur la troisième et dernière étape, celle de la compensation écologique.

 

En outre, il ressort des échanges que la phase d'évitement est souvent peu valorisée. Ainsi, la phase primordiale de l’évitement n’est pas assez mise en avant dans les études d'impact par rapport aux autres phases de la séquence ERC et notamment la compensation. Il s’agit pourtant d’une étape déterminante pour concevoir un projet de moindre impact environnemental, acceptable par la société civile et à un coût économiquement supportable pour le maître d’ouvrage.

Des difficultés sérieuses de mise en oeuvre

Les causes du désintérêt pour l’évitement ou de la difficulté à le mettre en oeuvre peuvent être multiples :

- l'incompréhension sur les enjeux réels de l’évitement ;

- la limite quelque peu floue entre l’évitement et la réduction selon les domaines que l’on considère et les enjeux environnementaux ;

- la tendance du porteur du projet à cantonner la phase d'évitement à la seule biodiversité (alors qu'elle peut concerner par exemple la qualité de l'air) ;

- les difficultés pour le maître d’ouvrage à remettre en cause l’option technique, logiquement convaincu que l’option technique ou le tracé présenté est le meilleur ;

- la perte de la « mémoire » du projet (durée souvent longue, rotation des équipes, etc.),

- des prestataires/bureaux d’études déconnectés de l’historique du projet et mandatés tardivement pour réaliser une étude d’impact…

Une nouvelle publication sur les bonnes pratiques d'évitement

Le séminaire n'ayant pas épuisé le sujet, le sous-directeur de l’intégration des démarches de développement durable dans les politiques publiques du CGDD a précisé que le CGDD allait travailler à la réalisation d’une publication sur la phase d’évitement au travers de bonnes pratiques (projets linéaires, opérations d’aménagement, les plans et programmes, etc.).

Cette publication permettra de sensibiliser l’ensemble des maîtres d’ouvrage et de favoriser les bonnes pratiques en matière d’évitement. Elle sera également destinée aux décideurs et élus.

Olivier CIZEL, Code permanent Environnement et nuisances

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