Industrie alimentaire : le texte à l’étude du ministère de l’Agriculture

Industrie alimentaire : le texte à l’étude du ministère de l’Agriculture

18.01.2018

Gestion d'entreprise

Le projet de loi issu des États généraux de l’alimentation est attendu pour le 31 janvier. Mais une première version a été révélée sur le site de l’Association des maires de France vendredi dernier (AMF). Il y est question de la revente à perte et des contrats entre agriculteurs et acheteurs.

Le 12 janvier, l’AMF publiait un texte « pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable » portant l'en-tête du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation (voir le communiqué). Il s'agirait du projet de loi issu des États généraux de l’alimentation, soumis en urgence par le gouvernement au Conseil national d’évaluation des normes (Cnen), la veille, avant son passage en Conseil d’État, précisaient les maires. Comme prévu, le texte évoque le seuil de la revente à perte, les promotions pratiquées sur les denrées alimentaires et les contrats de vente de produits agricoles. Premier décryptage d’un projet de loi qui ne constitue peut-être pas « le » produit fini.

Lutter contre la revente à perte

« Répartition de la valeur défavorable aux producteurs ». « Accords de coopération à l’achat (…) perçus comme ajoutant une pression supplémentaire sur les fournisseurs ». « Guerre des prix génératrice de destruction de valeur et d’appauvrissement des producteurs ». Dans son exposé des motifs, le texte ne fait pas dans la demi-mesure. Le ministère de l’Agriculture communique et reprend les mots du Président de la République prononcés le 11 octobre dernier à Rungis : le texte vise à « permettre aux agriculteurs de vivre du juste prix payé » ainsi qu’« à tous, dans la chaîne de valeur, de vivre dignement ». Mais comment procéder ? D’une part en habilitant le gouvernement à relever de 10 % le seuil de revente à perte via une ordonnance. La mesure serait expérimentale (prévue sur 2 ans) et concernerait « les denrées alimentaires revendues en l’état au consommateur ». Donc non transformées ? La question se pose. Une seconde ordonnance serait aussi au menu, pour encadrer « en valeur et en volume les opérations promotionnelles portant sur la vente au consommateur des denrées alimentaires ». Avec sanctions à la clé en cas de non-respect des nouvelles règles. Le texte précise aussi la date de livraison des nouvelles mesures : « la réforme issue de ces ordonnances sera en vigueur avant le début de la campagne des négociations commerciales 2018/2019 ».

Minimiser l'impacte de la volatilité des prix

Puis, le texte s’intéresse à la renégociation des contrats, d’une durée d’exécution supérieure à 3 mois, portant sur la vente de produits listés et particulièrement affectés par les fluctuations des prix des produits agricoles, alimentaires et des coûts de l’énergie. Une clause de renégociation est d’ores et déjà intégrable au contrat (article L 441-8 du code de commerce). Et le projet de loi pourrait raccourcir la durée de la renégociation de 2 mois à 1 mois. De même qu’instaurer une médiation obligatoire, d’un mois maximum, « en préalable à toute action en justice ». Les indicateurs de volatilité des prix des produits alimentaires ou agricoles pourraient être choisis par les parties et ne seraient plus nécessairement des indices publics.

Redonner du pouvoir aux agriculteurs

Le texte aborde ensuite les contrats écrits de vente de produits agricoles (livrés sur le territoire français). Le projet pourrait entièrement réécrire l’article L 631-24 du code rural et de la pêche maritime, lui-même récemment modifié par la loi Sapin II du 9 décembre 2016. Pour l’instant, cette contractualisation est rendue obligatoire dans certains cas prévus par un décret en Conseil d’État. Le texte pourrait proposer qu’un accord interprofessionnel l’exige également. Il précise aussi les exceptions à ce principe : ventes directes aux consommateurs, cessions à des organisations caritatives, ou de produits agricoles sur les carreaux affectés à certains producteurs (ayant leur activité sur un marché d’intérêt national). En tout état de cause, lorsque le contrat est écrit, il appartiendrait aux seuls producteurs de le proposer à l’acheteur. Le texte précise ensuite la durée du contrat (5 ans maximum sauf exceptions comme actuellement) ainsi que les clauses et mentions obligatoires à faire apparaître (durée, volumes prévus, livraison, critères et modalité de détermination du prix - dont les coûts de production ainsi que la qualité et la traçabilité des produits -, révision de celui-ci, paiement, force majeur, rupture anticipée, résiliation).

Enfin, le projet indique que tout contrat passé par écrit, même lorsque ce n’est pas obligatoire, doit respecter les éléments présentés ci-dessus. Dans le cas contraire, une amende pourrait être prévue (75 000 euros maximum par an).

 

 

Sophie Bridier

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