Information obligatoire du curateur en cas de poursuites pénales contre le majeur protégé

13.10.2017

Droit public

Lorsque des poursuites pénales sont engagées contre un majeur protégé, l'information du curateur ou du tuteur est obligatoire sauf en cas de circonstance insurmontable qu'il appartient à l'autorité compétente de démontrer.

Des règles de procédure spécifiques sont prévues par les articles  706-113 à 706-117 du code de procédure pénale en cas de poursuite, d’instruction et de jugement des infractions commises par des majeurs protégés placés sous protection juridique (sauvegarde de justice, curatelle, tutelle) mais aussi sous mandat de protection future (C. pr. pén., art. 706-112). A défaut, les procédures engagées sont annulées.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

Découvrir tous les contenus liés

Par ailleurs, l’article D. 47-14 de ce code prévoit qu’en cas de doute sur l'existence d'une mesure de protection juridique, le procureur de la République, le juge d'instruction ou la juridiction de jugement doit faire procéder aux vérifications nécessaires préalablement à l’acte en cause.

Dans un arrêt du 19 septembre 2017, la chambre criminelle de la Cour de cassation précise que seule une circonstance insurmontable peut faire obstacle à ces vérifications.

Une mise en examen sans information du curateur

En l'espèce, une personne sous curatelle est placée en garde à vue, interrogée, puis déférée devant le procureur de la République. Le même jour, elle est mise en examen par le juge d'instruction pour tentative d'homicide volontaire et placée en détention provisoire, sans que le curateur ait été avisé de ces procédures. La personne protégée demande alors l'annulation de la mesure de garde à vue ainsi que de l'ensemble des actes subséquents pour non-respect des dispositions précitées du code de procédure pénale, et en particulier de l’article 706-113 selon lequel le curateur d'une personne majeure protégée doit ��tre avisé de la date de toute audience concernant la personne protégée, y compris l'interrogatoire de première comparution.

Ce recours est rejeté par la chambre de l’instruction de la cour d’appel. En revanche, la chambre criminelle de la Cour de cassation accueille favorablement le pourvoi formé par la personne sous curatelle.

Les juges n’ont pas expliqué l’absence de doute

La chambre criminelle constate "qu'aucun avis n'a été adressé au curateur de l'intéressé, qui s'est avéré atteint de psychose délirante chronique et bénéficiaire d'une mesure de protection légale".

Elle souligne que la chambre de l’instruction de la cour d’appel ne s’est pas suffisamment expliquée sur l’absence de doute au sens de l'article D. 47-14 du code de procédure pénale. La cour d’appel avait simplement relevé que les réponses apportées par la personne protégée "n'étaient pas de nature à faire supposer l'existence d'une mesure de protection", ou encore "qu'à aucun moment au cours de sa garde à vue, [elle] n'a fait une quelconque référence à un placement sous mesure de protection juridique". Les juges ont aussi considéré "qu’à supposer qu'un doute sur l'existence d'une mesure de protection juridique soit apparu lors du compte-rendu des premières investigations policières au magistrat du parquet", les autorités de poursuite et d'instruction "se trouvaient dans une impossibilité matérielle de procéder à des vérifications complémentaires", les services compétents étant fermés à cette heure-là un vendredi soir.

Aucune circonstance insurmontable

Autant d’arguments qui ne convainquent pas la chambre criminelle de la Cour de cassation, qui considère en effet que "sans mieux s'expliquer sur l'absence de doute au sens de l'article D. 47-14 du code de procédure pénale", la chambre de l'instruction "n'a pas caractérisé une circonstance insurmontable faisant obstacle à cette vérification [de l’existence d’une mesure de protection]". Les juges relèvent que le beau-frère et la sœur de la personne protégée avaient indiqué que ce dernier souffrait de schizophrénie, que figurait au dossier une déclaration en main-courante indiquant que l'intéressé se trouvait sous curatelle, et enfin, que les autorités de poursuite et d'instruction avaient connaissance du dossier d'une affaire pour laquelle le requérant avait été jugé en comparution immédiate, et qui comportait une expertise psychiatrique indiquant que l’intéressé bénéficiait d'une mesure de tutelle.

Dans ces circonstances, la chambre de l’instruction devait faire procéder aux vérifications nécessaires. Son arrêt est annulé.

Véronique Baudet-Caille, Docteur en droit
Vous aimerez aussi

Nos engagements