La possibilité de payer en devise est étendue par la réforme de la réforme

04.06.2018

Gestion d'entreprise

A compter du 1er octobre 2018, entre professionnels et lorsque l'usage d'une monnaie étrangère est communément admis, les parties pourront convenir que le paiement effectué en France aura lieu en devise et non en euros.

La loi n° 2018-287 du 20 avril 2018 ratifiant l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations modifie l’article 1343-3 du code civil relatif à la monnaie de paiement.

Depuis le 1er octobre 2016, ce texte prévoit que le paiement d’une obligation de somme d’argent en France s’effectue en euros. Il énonce néanmoins, en consacrant une solution jurisprudentielle acquise avant la réforme, que le paiement dans une autre devise que l’euro est valable si l’obligation ainsi libellée procède d’un contrat international ou d’un jugement étranger (Cass. 1re civ., 11 juin 2002, n° 99-10.044 ; Cass. 1re civ., 19 sept. 2007, n° 06-17.096).

En l’état, la formulation de l’exception au principe du paiement en euros est critiquable tant sur le fond que sur la forme : faut-il en déduire que le paiement dans une autre devise que l’euro n’est autorisé que dans les seuls contrats internationaux, alors qu’il est d’usage dans certains secteurs, comme par exemple l’aéronautique et la pâte à bois, de payer en devise, notamment en dollars ? Pour corriger cette imprécision et cette excessive rigidité, peu opportunes en pratique, le Sénat a pris l’initiative de proposer un amendement modifiant l’article 1343-3 du code civil.

Ainsi augmenté d’un second alinéa, le nouvel article 1343-3, qui sera applicable aux actes juridiques conclus ou établis à compter du 1er octobre 2018, prévoit que les parties peuvent convenir que le paiement aura lieu en devise s’il intervient entre professionnels, lorsque l’usage d’une monnaie étrangère est communément admis pour l’opération concernée (C. civ., art. 1343-3, mod. par L. n° 2018-287, 20 avr. 2018, art. 14 ; L. n° 2018-287, 20 avr. 2018, art. 16, I). Deux conditions sont donc posées par le texte tenant, d’une part, à la qualité des parties (paiement entre deux professionnels) et, d’autre part, à l’existence d’un usage.

Parallèlement, est également créé un nouvel article L. 112-5-1 dans le code monétaire et financier qui prévoit que, par dérogation au premier alinéa de l’article 1343-3 du code civil, le paiement peut avoir lieu en une autre monnaie si l’obligation ainsi libellée procède d’un instrument financier à terme ou d’une opération de change au comptant (C. mon. fin., art. L. 112-5-1, créé. par L. n° 2018-287, 20 avr. 2018, art. 14). Le nouvel article L. 112-5-1 sera, comme le nouvel article 1343-3 du code civil, applicable aux actes juridiques conclus ou établis à compter du 1er octobre 2018 (L. n° 2018-287, 20 avr. 2018, art. 16, I, al. 2).

Agnès Maffre-Baugé, Maître de conférences à la faculté de droit d'Avignon

Nos engagements