L'avocat ne peut bénéficier du droit des pratiques restrictives

31.10.2017

Gestion d'entreprise

La prohibition du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties édictée à l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce ne s'applique pas dans la collaboration entre avocats.

Aux termes de l’article L. 442-6 I 2° du code de commerce, "engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout commerçant, producteur, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...), de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties".

Dans la mesure où le bénéfice de ces dispositions est limité aux seuls partenaires commerciaux victimes d’un déséquilibre significatif, il semble évident qu’il est inapplicable dans la collaboration entre avocats.

Pourtant, un avocat dont le contrat de collaboration libérale avait été rompu à l'initiative du cabinet avec lequel il collaborait, soutenait le contraire. Il avait saisi le bâtonnier de plusieurs réclamations, et sollicitait la condamnation du cabinet à une indemnité de 190 000 euros en application de l'article précité. Le bâtonnier ayant rejeté sa demande, l’avocat avait formé un recours devant la cour d'appel d'Angers qui avait renvoyé l’affaire devant la cour d'appel de Paris, seule compétente pour connaître des litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce. Il prétendait que les dispositions de cet article relatives au déséquilibre significatif sont applicables en l’espèce, au motif que le droit des pratiques anticoncurrentielles vise notamment les avocats exerçant la profession à titre libéral.

Cet argument ne pouvait prospérer :

- d’une part, les dispositions de l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce relèvent du droit des pratiques restrictives de concurrence dont le champ d’application n’est pas le même que celui du droit des pratiques anticoncurrentielles ;

- d’autre part, comme le souligne la cour d’appel, il ressort des dispositions de l'article 111 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 que la profession d'avocat est incompatible avec les activités à caractère commercial. Ces dispositions excluent que l'avocat, dont la profession est réglementée et soumise à des règles déontologiques concernant notamment le contrat de collaboration, puisse exercer dans ce cadre une activité s'apparentant à une activité commerciale, et être considéré comme un partenaire commercial du cabinet d'avocat avec lequel il collabore.

Remarque : indépendamment de l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, l’article 1171 du code civil issu de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats dispose que "dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputé non écrite.
L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation".
Max Vague, Docteur en droit, Maître de conférence des universités, Avocat

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