Le CHSCT peut décider d'une expertise sans désigner l'expert

24.07.2018

Gestion du personnel

Le CHSCT (ou le CSE) peut prendre deux délibérations pour recourir à une expertise. Une délibération pour décider du principe de l'expertise et une autre plus tard pour choisir l'expert.

La procédure de recours à une expertise par le CHSCT n'a jamais fait l'objet d'une consécration légale. Dans la mesure où le recours à l'expertise est une décision importante, il fait l'objet d'une délibération, le point devant au préalable être inscrit à l'ordre du jour. Mais que doit contenir cette délibération pour être valable ? Si le CHSCT acte le principe du recours à une expertise, il n'a pas l'obligation de désigner directement l'expert et peut le faire par une autre délibération. C'est ce que précise, pour la première fois à notre connaissance, la Cour de cassation dans deux arrêts du 5 juillet 2018.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

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- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
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Rappel : le CHSCT peut faire appel à un expert agrée en cas de risque grave et de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité (C. trav., art. L. 4614-12). Ces mêmes cas de recours sont préservés dans le cadre du comité social et économique (CSE) qui doit être mis en place dans les entreprises au plus tard au 31 décembre 2019 (C. trav., art. L. 2315-96). A noter que le CSE devra faire appel non plus à des experts agréés mais à des experts habilités en qualité du travail et de l'emploi. Cette habilitation sera délivrée par un organisme certificateur dont les modalités de désignation seront fixées par arrêté du ministre du travail (à paraître). Cependant à titre transitoire, les experts agréés le restent jusqu’au 31 décembre 2019 ou après cette date si un arrêté d'agrément précise une autre date butoir.
Une expertise CHSCT... sans expert

Dans cette affaire un CHSCT décide, par délibération, de recourir à expertise dans le cadre d'un projet important. L'employeur saisit le TGI en la forme des référés. Selon lui, pour être valable, la délibération devait désigner expressément un cabinet d'expertise, décider du recours à l'expert et délimiter sa mission.

Pour la Cour de cassation, l'article L. 4614-13 du code du travail ne s'oppose pas à ce que le recours à expertise fasse l'objet de deux délibérations différentes. La délibération était donc valable sur ce point.

Deux délibérations sont possibles pour recourir à une expertise

Cette décision emporte des conséquences sur l'éventuelle contestation de l'expertise par l'employeur. En effet, celui-ci dispose de 15 jours à compter de la délibération du CHSCT pour contester la nécessité de l'expertise, la désignation de l'expert, le coût prévisionnel et l'étendue de l'expertise (C. trav., art. L. 4614-13). Or la loi n'impose pas que la délibération contienne tous ces éléments constitutifs. Pour y remédier, la Cour de cassation s'est déjà éloignée de la lettre de la loi en considérant que l'employeur disposait de 15 jours à compter de la notification du coût prévisionnel pour le contester (Cass. soc., 28 mars 2018, n° 16-28.561). La même difficulté se pose pour la contestation du choix de l'expert. Si l'employeur ne connaît pas le cabinet d'expertise au jour de la délibération, il lui sera difficile de contester ce choix dans les 15 jours. En l'espèce, au jour de la première délibération, l'employeur ne connaissait pas le choix de l'expert.

Remarque : saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a estimé que cette procédure de contestation était constitutionnelle et ne portait pas atteinte au droit au recours effectif (Cons. const., 13 oct. 2017, n° 2017-662 QPC). 
Des difficultés anticipées pour la mise en place du CSE
Cette décision devrait en toute logique s'appliquer aussi au CSE qui pourra faire le choix de prendre au moins deux délibérations distinctes pour l'expertise.
Remarque : reste qu'en pratique, le CSE aura tout intérêt à prendre une délibération unique ou, tout du moins, à ne pas trop espacer dans le temps ses délibérations compte tenu des délais courts pour réaliser l'expertise. Rappelons que le CSE dispose de deux mois à compter de la mise à disposition des informations nécessaires à la consultation pour rendre son avis (C. trav., art. R. 2312-6).
Les difficultés connues jusqu'ici sur la contestation des expertises du CHSCT devraient disparaître dans le cadre du CSE. En effet, pour chaque élément constitutifs de l'expertise, le point de départ du délai de contestation est différent. Ainsi, l'employeur disposera de 10 jours à compter de :
  • la délibération du comité social et économique décidant le recours à l'expertise s'il entend contester la nécessité de l'expertise ;
  • la désignation de l'expert par le comité social et économique s'il entend contester le choix de l'expert ;
  • la notification à l'employeur du cahier des charges et des informations prévues à l'article L. 2315-81-1 s'il entend contester le coût prévisionnel, l'étendue ou la durée de l'expertise ;
  • la notification à l'employeur du coût final de l'expertise s'il entend contester ce coût.

Dans le cas d'espèce, en présence d'un CSE, l'employeur aurait eu 10 jours à compter de la deuxième délibération pour contester le choix du cabinet d'expertise.

Jean-Baptiste Davoine
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