"Les entreprises doivent avoir un droit de regard sur le CPF"

"Les entreprises doivent avoir un droit de regard sur le CPF"

27.04.2018

Gestion du personnel

Alors que l'avant-projet de loi "Avenir professionnel" est présenté ce matin en Conseil des ministres, Jean-Paul Charlez, président de l’ANDRH, revient sur la réforme de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Parmi les pistes d’amendement, la mise en place d’un avantage fiscal et la possibilité pour les entreprises d’avoir accès aux CPF de leurs salariés.

La réforme qui va être présentée ce matin répond-elle à vos attentes ?

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Ce texte contient énormément de points positifs. Tout d’abord, je suis satisfait que l’Etat ait repris la main sur la copie des partenaires sociaux. L’accord national interprofessionnel (ANI), conclu le 22 février dernier, loin d’être disruptif, ne remédiait à aucun travers historique de la formation professionnelle, à savoir la complexité, le coût et l’iniquité du système. Une enquête effectuée auprès des adhérents de l’ANDRH en janvier dernier pointait d’ailleurs ces défauts, notamment l’opacité des Opca ou de la gouvernance partagée entre de multiples acteurs. Ce fonctionnement laissait à désirer.

Quels sont ses points forts ?

Les Opca géraient des complexités qu’ils créaient eux-mêmes 

Citons parmi les avancées le transfert de la collecte des contributions aux Urssaf, la transformation des Opca qui géraient des complexités qu’ils créaient eux-mêmes en opérateurs de compétences, le fléchage d’une cotisation spécifique des entreprises sur la formation des demandeurs d’emploi, en lieu et place de la contribution actuelle versée au FPSPP (Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels). Nous sommes également satisfaits de la simplification du plan de formation qui se concentrera désormais davantage sur les résultats que sur les moyens et sur la mise en place de France compétences.

Existe-t-il, selon vous, des points manquants ?

 Sur l’ensemble des contributions, aucune quote-part n’est dévolue au plan de formation

Sur l’apprentissage, je regrette que le gouvernement n’ait pas acté la fusion des contrats d’apprentissage et de professionnalisation en contrat unique, sans borne d’âge. C’était une mesure de simplification pour les DRH. Par ailleurs, nous étions favorables à la mise en place d’un avantage fiscal de type crédit d’impôt qui aurait dû être associé à l’investissement que font les entreprises en formation. Car sur l’ensemble des contributions, oscillant entre 0,99 % et 1,60 % de la masse salariale, selon la taille de l’entreprise, aucune quote-part n’est dévolue au plan de formation. Ce n’est pas sérieux. D’autant que l’avant-projet de loi met fin aux fonds affectés jusqu’ici aux périodes de professionnalisation. Le DRH devra dès lors convaincre le directeurs financier d’investir dans le plan de formation en sus du versement de la cotisation unique. Ce qui n’est pas gagné dans toutes les entreprises.

La réforme donne toutefois la possibilité aux entreprises de négocier des accords de co-investissement ?

Effectivement. Cette opportunité permettra aux entreprises de co-construire le parcours de formation d’un salarié en proposant que la formation d’un salarié soit effectuée sur le temps de travail, moyennant un abondement. Mais quels sont les leviers en cas de refus ? Il n’en existe aucun.

 Les employeurs ne savent pas qui a un CPF et qui n’en a pas.

Selon le gouvernement, le CPF a pour objectif de rendre chaque individu acteur de son évolution professionnelle. Or, l’employabilité d’un salarié se joue avant tout dans l’entreprise. Il est donc regrettable d’imaginer que la totalité de la responsabilité de la formation professionnelle repose sur les seules épaules du salarié. La contribution des entreprises à la formation doit conserver une dimension collective. Autrement dit, il faut que l’entreprise, qui finance le CPF, à hauteur de 0,4 % de la masse salariale, ait un droit de regard sur le compte du salarié pour valider si cet argent est utilisé à bon escient. Si un individu choisit une formation en œnologie, qui lui dira qu’elle est adaptée au marché de l’emploi ? Rappelons que le CPF sera crédité de 5 000 euros tous les dix ans, soit 20 000 euros au cours d’une carrière, ce qui est loin d’être négligeable. D’où la nécessité de mieux articuler le CPF avec le plan de formation. Les RH sont d’ailleurs les premiers conseillers en évolution professionnelle pour les salariés. Mais aujourd’hui alors que le nombre du CPF a rattrapé celui du DIF, les employeurs ne savent pas qui a un CPF et qui n’en a pas. Ils sont tenus à l’écart.

Je suis également favorable à un même droit de regard de la part de Pôle emploi ou de l’Apec pour la formation des demandeurs d’emploi. Le tout CPF n’est souhaitable en aucun cas. Comment s’assurer sinon que la formation suivie correspond bien au développement des compétences des salariés ou favorise le retour à l’emploi des demandeurs d’emploi ? Cessons d’opposer intérêts des citoyens et intérêts de l’entreprise.  Si j’apprécie la monétisation du CPF, cette question reste en suspens.

Anne Bariet
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