Mineurs non accompagnés : les difficultés financières alléguées ne font pas loi

04.09.2017

Droit public

Un département ne peut s'affranchir de son obligation de mise à l'abri des mineurs non accompagnés au motif qu'il n'en a pas les moyens... et alors que cette opération lui est remboursée par le Fonds national de protection de l'enfance.

Dans une ordonnance du 25 août 2017 déboutant le président du conseil départemental de l’Isère de son appel, le juge des référés du Conseil d’État considère que ce dernier ne peut s’affranchir de son obligation de protection des mineurs non accompagnés au motif qu’il n’en a pas les moyens, sans en rapporter la preuve concrète, dès lors qu’il est établi qu’il a bénéficié d’une augmentation de son budget à cette fin et que le coût de la procédure de mise à l’abri lui est remboursé intégralement par le Fond national de protection de l’enfance.
L'accès à l'hébergement des mineurs, une obligation de moyen renforcée...
Pour le juge des référés, « hormis le cas où la personne qui se présente ne satisfait manifestement pas à la condition de minorité, un refus d’accès au dispositif d’hébergement et d’évaluation [...] opposé par l’autorité départementale à une personne se disant mineur isolé, est ainsi susceptible, en fonction de la situation sanitaire et morale de l’intéressé, d’entraîner des conséquences graves caractérisant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ».
 
Pour le Conseil d’État, l’obligation qui pèse sur l’État de mettre en œuvre le droit à l’hébergement d’urgence de toute personne sans abri qui se trouve en situation de détresse médicale, psychique et sociale, est une obligation de moyen renforcée lorsque est en cause un mineur dont la santé, la sécurité ou la moralité sont en danger.
 
Le juge des référés considère en effet que l’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale que caractériserait une carence s’apprécie « dans chaque cas », au regard des « diligences accomplies par l’administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l’âge, de l’état de santé et de la situation de famille de la personne intéressée ».
... qui ne cède pas devant des allégations de difficultés financières
Et le président du conseil départemental ne peut se borner à alléguer des difficultés financières ne lui permettant pas de faire face à « la croissance plus forte encore du nombre de mineurs isolés étrangers se présentant chaque année » pour justifier le refus de mise à l’abri d’un mineur ; ce d’autant plus que l’État a augmenté de manière notable le financement de leur prise en charge.
Remarque : en 2017, le montant des financements alloués à cette mission au département de l’Isère s’est élevé à près de 9,5 millions d’euros, et le nombre de places d’hébergement dédiées à cet accueil d’urgence à environ 300. Le Conseil d’État note par ailleurs que le budget de cette collectivité s’élevait, pour la même année, à plus de 1,5 milliard d’euros. Dans ces conditions, les difficultés de financement ne pouvaient être présumées sur la base des seules allégations du président du Conseil départemental.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Christophe Pouly, avocat
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