Muriel Pénicaud annonce une "réforme globale" de la santé au travail

Muriel Pénicaud annonce une "réforme globale" de la santé au travail

27.11.2017

HSE

À l'Assemblée nationale, Muriel Penicaud a assuré que la santé au travail était une de ses "priorités", alors même qu'elle est critiquée par certains pour sa réforme du compte pénibilité et pour la suppression du CHSCT. Elle a évoqué une "réforme globale" de la médecine du travail et la création d'une mission sur la prévention.

Les députés ont adopté le 23 novembre 2017, dans le cadre de l’examen du projet de loi de ratification des ordonnances visant à réformer le droit du travail, un amendement de Francis Vercamer (Les Constructifs, Nord) qui concerne les visites médicales de fin de carrière, et s'inscrit dans le nouveau suivi médical, réformé l'an dernier.

L'amendement établit que "les travailleurs bénéficiant du dispositif du suivi individuel renforcé, ou qui ont bénéficié d’un tel suivi pendant une période définie par décret au cours de leur carrière professionnelle, bénéficient obligatoirement d’une visite médicale auprès du médecin du travail dans un délai antérieur à leur départ en retraite, fixé par décret". Le but est d'assurer la traçabilité de l'exposition aux risques. Le texte prévoit que "le médecin du travail a la faculté, s’il constate une exposition du travailleur à certains risques dangereux, notamment chimiques [...] de mettre en place une surveillance post-professionnelle en lien avec le médecin traitant".

 

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Départ anticipé 

Cet amendement s'inscrit en béquille de la réforme du C3P (compte personnel de prévention de la pénibilité), nouvellement C2P (compte personnel de prévention). L'une des cinq ordonnances dites Macron a en effet supprimé quatre facteurs d'exposition du dispositif initial. L'amendement suit cette logique de réparation en fin de carrière.

 

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Dans leur exposé sommaire, les députés du groupe Les Constructifs expliquent que le médecin du travail "pourra ainsi lors de la visite médicale de fin de carrière conseiller de manière pertinente le travailleur sur l’opportunité de mettre en œuvre le dispositif de départ anticipé à la retraite au titre de l’exposition à l’un ou plusieurs des quatre facteurs de risques professionnels exclus du champ du compte professionnel de prévention".

Attention, "je ne voudrais pas que la visite médicale de départ en retraite fasse office de solde de tout compte médical", s'est inquiété de son côté Jean-Paul Lecoq du groupe Gauche démocrate et républicaine. 

Suivi post-professionnel

Défendant une proposition qu'elle estime "innovante", la députée Agnès Firmin Le Bodo fait remarquer que "le médecin du travail transmettrait l’ensemble des informations recueillies au médecin de ville, ce qui permettrait de mettre en place une surveillance post-professionnelle". Le suivi post-professionnel existe déjà dans la réglementation. Il concerne les travailleurs qui étaient par exemple exposés aux rayonnements ionisants, à l'amiante, ou à des agents cancérogènes – ce qui signifie qu'ils faisaient l'objet d'un suivi médical renforcé.

Pour bénéficier du suivi post-professionnel, les salariés, lorsqu'ils cessent toute activité professionnelle, doivent passer par leur médecin traitant et obtenir l'accord de la CPAM qui, le cas échéant, établit un protocole de surveillance dans le cadre duquel tous les examens seront pris en charge à 100% sans avance de frais. Obtenir ce suivi n'est pas difficile, la CnamTS regrette régulièrement le peu de demandes qui lui parviennent. 

Future "réforme globale" ? 

Le gouvernement, par la voix de Muriel Pénicaud, a donné un avis favorable à cet amendement n°282. "Ce sujet a en effet vocation à s’inscrire dans une réforme globale. Néanmoins, à titre de démonstration de l’engagement du gouvernement sur ce sujet, je donne un avis favorable à cet amendement, qui constitue une sorte d’avant-première de la réforme globale que nous devons mener ensemble", a soutenu la ministre.  

Le groupe Les Constructifs a déposé un autre amendement, qui concernait les cotisations que l'entreprise paie pour adhérer à un service de santé au travail interentreprise. Il n'a pas été voté, et le gouvernement ne l'a pas soutenu. En revanche, son examen a été l'occasion pour la ministre de travail de "présenter les intentions" du gouvernement dans le domaine de la santé au travail, qu'elle a qualifié d'"enjeu clé". Pointant le manque d'effectifs de la médecine du travail, et le fait que, selon elle, "par rapport à d’autres pays européens, le nombre des accidents du travail et des maladies professionnelles est particulièrement élevé en France", Muriel Pénicaud a rappelé qu'elle avait, avec la ministre de la santé, confié à Paul Frimat une mission visant à renforcer la prévention sur l’exposition des risques chimiques

 

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Nouvelle mission, copie attendue au 31 mars 2018

Dans la foulée, elle annonçait une autre mission, confiée cette fois à Jean-François Naton, conseiller confédéral chargé de l’activité travail et santé à la CGT, Charlotte Lecocq, députée LREM et Bruno Dupuis, consultant chez Alixio. Mission confirmée vendredi soir par un communiqué où le ministère affiche plusieurs constats : des services de santé au travail qui "souffrent d’une désaffection qui peut, sans action corrective, devenir problématique", des acteurs "multiples" qui interviennent "sans toujours la coordination nécessaire pour maximiser l’efficacité des actions portées".

La mission devra donc dresser "un état des lieux des enjeux, des acteurs" et "faire des propositions en matière d’actions de prévention sur la santé au travail, le cas échéant en s’appuyant sur les pratiques existant chez nos partenaires à l’étranger". Conclusions attendues au 31 mars 2018. 

Dans l'hémicycle, alors que l'opposition de gauche regrettait la disparition du CHSCT, Muriel Pénicaud a ajouté avoir, avec la ministre de la santé, décidé "de faire de la santé au travail, notamment du renforcement des dossiers de prévention, une de nos priorités communes". 

 

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Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Pauline Chambost et Élodie Touret
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