Négociation de l'indemnité de rupture conventionnelle : les cadres tirent leur épingle du jeu

Négociation de l'indemnité de rupture conventionnelle : les cadres tirent leur épingle du jeu

31.01.2018

Gestion du personnel

Le montant de l'indemnité versée lors d'une rupture conventionnelle dépend avant tout de la catégorie socioprofessionnelle à laquelle appartient le salarié. Tel est le constat que fait la Dares dans une étude publiée ce mardi. Si le salaire et la convention collective applicable entrent également en jeu, en revanche ni l'âge ni le sexe n'influent sur le montant de l'indemnité.

Le constat n'étonne guère mais il est clairement mis en lumière par une étude de la Dares publiée ce mardi à partir d'une exploitation des formulaires de demandes d’homologation de rupture conventionnelle transmises aux Direccte en 2015 (*) : les cadres qui concluent une rupture conventionnelle quittent l'entreprise avec une indemnité plus élevée que les autres catégories de salariés. Plusieurs facteurs expliquent cette tendance : des salaires plus élevés, des conventions collectives qui leur sont plus favorables et une capacité de négociation individuelle plus grande.

Rappel
Dans le cadre d’une rupture conventionnelle, le salarié perçoit une indemnité spécifique de rupture dont le montant, éventuellement négocié avec l’employeur, doit au moins être égal à l’indemnité légale de licenciement et, le cas échéant, à l’indemnité conventionnelle de licenciement prévue par la convention collective de branche ou par l’accord professionnel ou interprofessionnel concerné.
 
Ecart net entre les niveaux de salaire

Le salaire est l'un des facteurs qui influent sur le montant de l'indemnité versée au salarié lors d'une rupture conventionnelle. Mais cette observation vaut avant tout pour les salaires les plus élevés. Pour une grande majorité des salariés, l'indemnité médiane est en effet proche du minimum légal.

"Pour les salaires bruts inférieurs à 2 520 euros par mois (75 % de l’ensemble des salariés ayant signé une rupture en 2015), l’indemnité médiane reçue ne dépasse pas de plus de 5% l’indemnité légale. Concernant la tranche de salaires compris entre 2 520 et 4 500 euros brut (20% des salariés ayant signé une rupture), l’écart entre l’indemnité médiane de rupture conventionnelle et l’indemnité légale de licenciement se situe aux alentours de 25% entre trois et dix années d’ancienneté. Au-dessus de 4 500 euros brut par mois (5% des salariés ayant signé une rupture), les indemnités deviennent très favorables au salarié. À ce niveau de salaire, l’indemnité de rupture conventionnelle médiane est supérieure de plus de 60% à l’indemnité légale, quelle que soit l’ancienneté du salarié", observe ainsi l'étude

Cet écart se creuse encore dès lors que le salaire atteint 8 150 euros (1% des salariés dans le cadre de l'enquête). Ils perçoivent, dans la majorité des cas, une indemnité supérieure au double de l’indemnité légale.

En revanche, souligne la Dares, l'ancienneté n'a que peu d'effet sur le montant de l'indemnité, hormis pour les salaires très élevés.

(Source : Dares)

Les cadres favorisés

Le deuxième facteur n'est pas sans lien avec le premier : la catégorie socioprofessionnelle à laquelle appartient le salarié. La différence entre cadres et non cadres est très nette. Alors que la majorité des employés et des ouvriers a reçu une indemnité quasiment identique à l’indemnité légale, quel que soit leur salaire et leur ancienneté, les cadres - eux - perçoivent une indemnité qui lui est supérieure et ce, d’autant plus que le salaire est élevé. Leur situation tranche aussi avec celle des techniciens, contremaîtres et agents de maîtrise qui perçoivent "des indemnités significativement supérieures au minimum légal mais malgré tout faibles en comparaison des cadres, à rémunération et ancienneté identiques".

(Source : Dares)

Plusieurs facteurs expliquent cette différence de traitement : des dispositions conventionnelles plus favorables et une plus grande capacité à négocier individuellement leur salaire.

"Certaines conventions collectives n’assurent que le minimum légal mais d’autres prévoient des indemnités supérieures en tenant compte de critères", note Anthony Bouvier, l'auteur de l'étude. Ainsi, la CCN des bureaux d'étude (dite Syntec) prévoit un traitement différencié entre cadres et non cadres."Les cadres bénéficient ainsi des conventions collectives les plus intéressantes en termes d’indemnités. Ils sont quasiment les seuls à avoir des conventions collectives plus favorables que le minimum légal", souligne ainsi l'étude. Tandis que "pour les employés er ouvriers, une majorité de conventions collectives ne prévoient pas d’indemnité supra-légales", note Anthony Bouvier.

La négociation individuelle

Les cadres parviennent par ailleurs à négocier des indemnités très favorables et ce, quelle que soit leur ancienneté ; un autre élément discriminant comparé aux autres catégories socioprofessionnelles. "Ouvriers et employés n’ont qu’un faible pouvoir de négociation sur le montant des indemnités qu’ils reçoivent. L’indemnité négociée représente ainsi, en médiane, moins de 3% de surplus d’indemnité", souligne l'enquête.

La Dares a cherché à comprendre cette capacité plus grande de négociation individuelle des cadres. "Le lien de subordination entre salarié et employeur peut favoriser de facto l’employeur, surtout lorsque le salarié est un ouvrier ou un employé, ou est dans une position fragile au sein de l’entreprise. Il s’agit donc d’une explication en termes de « pouvoir de négociation», c’est-à-dire de capacité à faire valoir ses intérêts". Une autre explication tient au meilleur accès des cadres à l’information.

Enfin, la motivation à l'origine de la rupture conventionnelle n'est pas neutre. Selon la Dares, la rupture conventionnelle à l'initiative du salarié serait plus fréquente chez les ouvriers et les employés, tandis que les cadres se verraient plus souvent proposer la rupture par leur employeur. Par conséquent, les ouvriers et les employés auraient plus difficilement la possibilité de négocier leur indemnité. En contrepartie, ils bénéficieraient de l’indemnisation chômage. "A contrario, chez les cadres et techniciens, la rupture conventionnelle s’apparenterait davantage à «une transaction après licenciement» où le salarié aura la possibilité de négocier son indemnité, la rupture étant voulue par l’employeur et non par le salarié, l’employeur prenant en compte le risque éventuel de contentieux lié à la séparation dans le cadre d’un licenciement et le coût qui en résulterait", analyse la Dares.

Assistance du salarié au cours de l'entretien

Le salarié qui entre dans la négociation d'une rupture conventionnelle peut se faire assister lors de l'entretien qui précède la conclusion la convention de rupture par toute personne de son choix appartenant à l'entreprise ou par un conseiller choisi sur une liste établie par la Direccte. Recourir à cette possibilité améliore les chances d'être mieux indemnisé, constate l'étude. Même si le nombre de salariés qui se sont fait assister reste faible (5,6%) "24,7% d'entre eux sont parvenus à négocier significativement leur indemnité alors que 13,9% des salariés non assistés y sont parvenus", constate l'enquête.

"Ce recours bénéficie nettement aux cadres, qui sont un peu moins de la moitié à négocier significativement leur indemnité quand ils ont bénéficié d’une assistance, tandis qu’ils ne sont qu’un tiers dans le cas contraire. Les techniciens, contremaîtres et agents de maîtrise voient aussi leurs capacités de négociation augmenter en cas d’aide extérieure (33,1% contre 18,5%). Les effets du recours existent également pour les employés et les ouvriers, qui sont respectivement 19,7% et 16,8% à négocier significativement leur indemnité en étant bénéficiaires d’une assistance contre 9,6% et 7,7% lorsqu’ils n’en ont pas reçu".

►La Dares constate toutefois que "comparativement aux autres salariés, les salariés ayant reçu une assistance sont plus âgés, ont plus d’ancienneté et travaillent dans des entreprises de taille plus importante, ce qui structurellement augmente la propension du salarié à recevoir une indemnité importante". 

(Source : Dares)

Taille de l'entreprise

Enfin, il semble que la marge de négociation augmente avec la taille de l’entreprise, mais dépende aussi du secteur d'activité de l'entreprise, surtout chez les cadres. "Des indemnités de rupture particulièrement élevées sont observées dans le secteur des transports où l’indemnité de licenciement est, dans la moitié des cas, au moins 1,78 fois supérieure au minimum de référence", observe ainsi la Dares. "De façon moins marquée, l’industrie, l’immobilier, l’information et la communication ou les activités financières et d’assurance offrent aux cadres des marges de négociation notables, qui leur permettent d’obtenir des indemnités supérieures aux indemnités conventionnelles. À l’inverse, dans d’autres secteurs, les cadres parviennent nettement moins à négocier. C’est le cas dans les secteurs de l’hébergement et de la restauration, ainsi que dans le commerce et dans l’administration publique, l’enseignement, la santé humaine et l’action sociale. Pour ces secteurs, les indemnités reçues sont, à rémunération et ancienneté identiques, tout à fait comparables à celles observées pour les autres catégories socioprofessionnelles".

En revanche, il est intéressant de noter que ni l'âge ni le sexe ne semblent influer sensiblement sur le montant de l'indemnité obtenue.

 

(*) Hors l'Hérault et la Moselle et salariés protégés.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Florence Mehrez
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