Prélèvement à la source : un nouveau casse-tête en perspective pour les DRH

Prélèvement à la source : un nouveau casse-tête en perspective pour les DRH

20.09.2016

Gestion du personnel

Après la simplification du bulletin de paie, les services RH doivent aujourd'hui s’atteler au prélèvement à la source des revenus. Avec le risque de gérer en interne les contrariétés voire les revendications salariales. Pas si simple !

L’alerte a été donnée, début septembre, par l’ANDRH. Benoît Serre, vice-président de l’association et directeur général adjoint en charge des ressources humaines groupe à la Macif, mettait en garde contre les complications potentielles qui pourraient résulter du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Celui-ci sera, en effet, prélevé, à partir du 1er janvier 2018, par les employeurs via la déclaration sociale nominative (DSN), sur la base du taux d’imposition calculé et transmis par l’administration fiscale. Les revenus seront ainsi directement taxés chaque mois au titre de l’année en cours et non plus au titre de l’année précédente. Et les DRH se retrouvent en première ligne sur le sujet. "Les salariés vont se tourner d'abord vers leur employeur pour comprendre les nouvelles règles fiscales et l'instabilité de leur salaire net", remarque Benoît Serre.

Adaptation des systèmes de gestion de paie

Sans tarder, les entreprises vont devoir adapter leur système de gestion de paie. "Les services RH devront intégrer une ligne supplémentaire sur le bulletin de paie et actualiser le niveau de prélèvement en cas de changement de situation fiscale communiquée par le salarié à son centre des impôts. Ce taux, revu par l'administration fiscale, peut être consécutif à un changement de situation familiale (mariage, naissance, divorce, perte d'emploi du conjoint…) ou de niches fiscales, uniquement connues des services des impôts (garde d'enfants, travaux...), indique Abdelkader Berramdane, directeur de la veille juridique chez l’éditeur ADP. Les plus petites entreprises se tourneront, elles, vers leur expert-comptable qui devra réactualiser leur logiciel de paie. Or, "cette mise à jour engendra un coût supplémentaire qui se répercutera systématiquement sur le tarif des prestations", alerte Bénédicte Caron, vice-présidente de la CGPME, en charge des questions économiques.

La confédération fulmine également "contre les pénalités financières encourues par les employeurs en cas de non–respect de ces obligations". L'avant projet de loi de finances pour 2017 prévoit, en effet, des sanctions pouvant aller de 5% des retenues qui auraient dû être effectuées ou déclarées, en cas d'omissions ou d'inexactitudes à 40% des retenues en cas de non-dépôt de la déclaration dans les 30 jours suivant une mise en demeure ou en cas d'inexactitude ou d'omissions délibérées.

Impact psychologique

Outre les difficultés techniques et financières, les DRH redoutent l’impact psychologique de cette nouveauté sur les salariés. "Le salaire net perçu sera amputé de leur impôt sur le revenu, indique Benoît Serre. Or, voir son bulletin de paie diminué d’un certain pourcentage ne génère pas le même effet que de s’acquitter de ses impôts dans un second temps". Il craint que les DRH doivent faire face à de mécontentements voire de nombreuses revendications, notamment lors des négociations annuelles obligatoires (NAO).

"L’impact sera d’autant plus fort que le salarié perçoit une partie de sa rémunération sous forme de variable, en primes annuelles ou semestrielles, ajoute Stéphane Béal, directeur du département droit social du cabinet Fidal. La rentrée d’argent décalée dans le temps mettra à mal leur trésorerie".

Données confidentielles

Surtout les employeurs disposeront d’informations confidentielles sur la situation fiscale du collaborateur. "En connaissant le taux d’imposition du collaborateur, le DRH ou le manager pourrait-il considérer qu’une personne mérite moins qu’une autre au foyer fiscal moins imposé", s’interroge Abdelkader Berramdane. "Les contribuables disposent en moyenne d’un taux d’imposition compris entre 0 et 10%, recouvrant des situations très différentes. Mais si le taux d’imposition est supérieur à cette moyenne, de l’ordre de 15% à 20%, le DRH ne risque-t-il pas de reporter l’augmentation de salaire sur d’autres collaborateurs ?", poursuit l’expert.

Stéphane Béal met toutefois en garde contre les risques juridiques d’une telle inégalité de traitement, "l’entreprise devant garantir le principe qu’à travail égal, salaire égal". L'avant projet de loi de finances apporte également des garde-fous en matière de discrimination. Mais Abdelkader Berramdane recommande, de son côté, aux employeurs "de faire abstraction des revenus nets et de communiquer massivement sur le brut".

Pour assurer la confidentialité des revenus, hors rémunération,  les salariés, qui ne souhaiteraient pas que leurs employeurs soient au courant de leur situation patrimoniale, pourront refuser que l’administration fiscale transmette leur taux personnalisé à leur employeur. Dans ce cas, l’employeur appliquera alors un taux "neutre", calculé sur la base du montant de la rémunération versée. Chacun des conjoints pourra ainsi opter pour un taux qui ne reflète que son niveau de salaire. Les éventuels ajustements s’effectueront directement entre le contribuable et l’administration. Ainsi, l’employeur n’a aucune indication sur leur imposition réelle.

Dualité d'interlocuteurs

Reste que les DRH ne veulent pas devenir les interlocuteurs du salarié au lieu du fisc. "L’administration décharge sur l’entreprise le recouvrement de l’impôt tout en conservant bien évidemment la gestion fiscale du salarié", relève Abdelkader Berramdane, Or, l’entreprise n’a, de fait, aucune réponse à apporter aux potentielles questions du salarié qui doit toujours s’adresser à l’administration fiscale. Mais elle "subit la pression d’une plus grande responsabilité, notamment avec les risques d’erreur, poursuit Abdelkader Berramdane. Cette dualité d’interlocuteurs est-elle conforme au fameux choc de simplification ? Il appartient aux entreprises d’expliquer leur rôle de simple exécutant".

 

Mode d’emploi

Le prélèvement à la source s’appliquera chaque mois à partir du premier salaire versé en 2018 et devra apparaître clairement sur la fiche de paie. De fait, son montant tiendra compte d’éventuelles variations de revenu. Le taux sera actualisé en septembre à partir des données figurant dans la déclaration des revenus de 2017 (effectuée au printemps 2018) ; et il en sera de même chaque année.

 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Anne Bariet
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