Prescriptions complémentaires et procédure contradictoire préalable : quelles sont les informations communicables à l'exploitant ?

09.11.2017

Environnement

Préalablement à l'édiction de prescriptions complémentaires, l'exploitant a le droit d'obtenir communication des pièces utiles dans les conditions prévues par le code de l'environnement et le code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, aucun autre texte ou principe n'exige que l'exploitant soit destinataire de l'ensemble des pièces communiquées aux membres du CODERST.

Une décision du Conseil d'État du 16 octobre 2017 rappelle les dispositions applicables à la procédure contradictoire préalable dans le cadre de l'élaboration d'un projet d'arrêté préfectoral complémentaire (CE, 16 oct. 2017, n° 395303).
Des prescriptions complémentaires pour protéger des captages d'eau potable
Un exploitant a demandé au tribunal administratif d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2013 par lequel le préfet lui a imposé des prescriptions complémentaires en vue de remédier à la pollution de captages destinés à l'alimentation en eau potable de la population.
 
Le tribunal administratif avait fait droit à sa demande, se fondant sur la violation de la procédure contradictoire devant le CODERST, ainsi que sur un défaut d'information des membres de cette instance.
 
Cependant, par un arrêt du 15 octobre 2015, la cour administrative d'appel avait annulé le jugement (CAA Douai, 1re ch., 15 oct. 2015, n° 14DA01729).
 
La société s'est alors pourvue en cassation devant le Conseil d'État, lequel a rejeté le pourvoi.
Projet d'arrêté préfectoral complémentaire : litige autour des pièces à communiquer à l'exploitant et sur le délai de convocation
Pas d'obligation de communiquer à l'exploitant la totalité des pièces fournies au CODERST, mais droit de l'exploitant d'obtenir les pièces utiles
Le Conseil d'État le rappelle : préalablement à l'édiction de prescriptions complémentaires prises sur le fondement de l'article L. 512-20 du code de l'environnement, l'exploitant d'une installation classée doit être destinataire :
- du rapport du contrôle le cas échéant réalisé par l'Inspection des installations classées (C. envir., art. L. 514-5),
- des propositions de l'Inspection tendant à ce que des prescriptions complémentaires lui soient imposées (C. envir., art. R. 512-25 abr., v. nouvelle rédaction art. R. 181-39),
- du projet d'arrêté du préfet comportant les prescriptions complémentaires envisagées (C. envir., art. R. 512-26 abr./ repris au R. 181-40).
 
D'autre part, il considère qu'il résulte des dispositions combinées du code de l'environnement précitées et de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 (en partie codifié à l'article L. 121-1 du CRPA) que l'exploitant doit être mis à même de présenter des observations et d'obtenir également communication, s'il le demande, de celles des pièces du dossier utiles à cette fin.
 
Ainsi, il considère qu'en jugeant qu'aucun autre texte ou principe n'exige que l'exploitant soit destinataire de l'ensemble des pièces communiquées aux membres du CODERST, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit dès lors qu'elle n'a ainsi ni écarté l'application de la loi du 12 avril 2000, ni dénié le droit de l'exploitant d'obtenir, dans les conditions précisées ci-dessus, communication des pièces utiles.
 
En l'espèce, pour annuler l'arrêté préfectoral complémentaire, le tribunal administratif s'était fondé sur un vice de procédure tenant à ce que ni l'exploitant, ni les membres du CODERST n'avaient eu, préalablement à la réunion de ce conseil, communication du rapport de l'Inspection des installations classées et de l'avis de l'hydrogéologue auxquels faisait référence le projet d'arrêté joint à la convocation et qui était soumis à l'examen de ce conseil.
 
Cependant, la cour administrative d'appel avait au contraire considéré que :
- les membres du CODERST avaient obtenu communication des documents utiles à l'examen du projet d'arrêté préfectoral, notamment le rapport de l'inspection des installations classées, par pièce attachée par un lien au courrier électronique de convocation ;
- la teneur de l'avis de l'hydrogéologue consulté par l'administration figurait dans le projet d'arrêté ;
- ni l'article R. 512-25 du code de l'environnement, ni aucun autre texte ou principe n'exigeaient que l'exploitant soit destinataire de l'ensemble des pièces communiquées aux membres du CODERST ;
- les termes du projet d'arrêté, communiqué à l'exploitant préalablement à la réunion du CODERST, reprenaient les propositions de l'Inspection des installations classées.
Ainsi, elle a considéré que l'exploitant avait pu valablement faire valoir ses observations devant ce conseil départemental.
Le délai de convocation de l'exploitant au CODERST raboté à cinq jours : une irrégularité en l'espèce sans conséquence sur la procédure
La cour administrative d'appel a considéré que la réduction du délai de convocation de l'exploitant à la réunion du CODERST, de 8 à 5 jours, n'a pas été de nature, à elle seule, à priver la société de la garantie que le délai minimum de 8 jours tend à protéger, ladite garantie consistant en la possibilité d'être présent et de préparer utilement sa défense en vue de formuler des observations pertinentes et documentées devant le CODERST.
Précision : la cour avait en outre considéré que cette réduction du délai de convocation était somme toute restée "raisonnable compte tenu de la portée de l'arrêté" complémentaire.
Ce faisant, la cour administrative d'appel, qui a procédé à la vérification des conséquences qu'a revêtues l'irrégularité, n'a pas commis d'erreur de droit et a suffisamment motivé son arrêt sur ce point.

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