Qualité : les organismes de formation sont-ils prêts ?

Qualité : les organismes de formation sont-ils prêts ?

12.12.2016

Gestion du personnel

En attendant d’être référencés dans la "data-dock" ou base de données partagées inter-Opca, les prestataires peaufinent, d'ici à janvier, la qualité de leurs actions de formation afin de coller aux attentes des financeurs publics ou paritaires. Un délai de six mois supplémentaire sera accordé aux retardataires.

Le compte à rebours a commencé : d’ici le 1er janvier, les organismes de formation doivent répondre aux nouveaux critères de qualité, instaurés par la loi de la formation du 5 mars 2014, pour travailler directement ou indirectement avec les financeurs, Opca, Opacif, régions, Agefiph ou Pôle emploi… Cette nouvelle obligation représente une véritable gageure pour les 80 000 prestataires répertoriés. Deux possibilités s’offrent à eux : soit bénéficier d’un des 21 labels et certifications définis par le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (Cnefop). Y figurent, par exemple, les normes Afnor, Iso (Organisation internationale de normalisation), le label ISQ-OPQF (organisme professionnel de qualification des organismes de formation), celui de l’Apave ou encore des certifications régionales. Soit s’inscrire sur la "data-dock", la base de données partagées par 20 Opca (1), pilotée par le Copanef (Comité interprofessionnel pour l'emploi et la formation), en fournissant les renseignements nécessaires à démontrer sa capacité à fournir une formation de qualité.

Une fois réalisé le contrôle de la conformité des pièces ou de la détention d’un label reconnu, les organismes de formation deviendront "référençables" par les financeurs. Ces derniers pourront alors décider d’inscrire (ou non) ces organismes dans leur catalogue qui sera rendu public.

Les prestataires qui seront détenteurs d’une certification ou d’un label qualité seront, eux, dispensés de produire ces preuves car ils bénéficieront d’une présomption (simple) de respect des critères.

Période transitoire

Mais les organismes de formation sont-ils prêts ? "Le 1er janvier est une étape, pas une fin en soi, souligne Philippe Debruyne, vice-président du Copanef. L'enjeu est de les accompagner notamment durant le premier semestre".  Pendant ce laps de temps, "les listes de référencement des opca vont se constituer au fur et à mesure des demandes de financement des organismes de formation. Elles devraient se stabiliser avant la rentrée de septembre". 

Une période transitoire bienvenue. Car tous les organismes ne sont pas encore dans les starting-blocks. Primo, toutes les certifications n’ont pas encore été reconnues par le Cnefop. C’est le cas, par exemple, du label RP-CFI (consultants-formateurs-indépendants), porté par l’association QualiPro-CFI, organisme de qualification des CFI. Cette décision devrait être "éminente, probablement le "3 janvier", indique Lionel Soubeyran, président de QualiPro-CFI et président d'honneur du syndicat des consultants-formateurs indépendants (Syfci). Le dossier a toutefois été retoqué une première fois. En cause : "la commission considérait que le RP-CFI pêchait sur trois des six critères qualité, les dispositifs d’accueil et d’évaluation, l’information du public sur l’offre de formation et l’évaluation de moyens d’encadrement". Le syndicat a depuis revu sa copie. 44 structures unipersonnelles disposent, d’ores et déjà, de ce label.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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La course à la certification

Secundo, tous les prestataires n’ont pas encore décroché le précieux sésame. Car les demandes se bousculent. L’ISQ (organisme professionnel de qualification de prestations de services intellectuels) qui délivre le label OPQF (Office professionnel de qualification des organismes de formation), l’un des plus populaires sur la marché, est très sollicité. "Nous avons reçu quatre fois plus de dossiers de demandes de certification (initiale ou renouvellement) cette année qu’en 2015, constate Jacques Abécassis, conseiller du président de l'ISQ. Soit 700 en 2016, contre 150 un an plus tôt". Or, trois mois sont nécessaires pour étudier un dossier… En amont, aussi, la démarche est chronophage. "100 heures de préparation ont été nécessaires pour finaliser le process", insiste Marc Dennery, fondateur de C-Campus qui a décroché le précieux sésame voilà quelques mois. Une étape toutefois "bénéfique puisqu’elle a révélé des améliorations substantielles, notamment en matière de suivi des données administratives des stagiaires".

Surtout, "les contrôles sont aujourd’hui plus poussés qu'avant, ajoute Michel Belli, directeur général d’Orsys, labellisé pour la première fois en 1997. Il faut fournir, outre les informations financières et celles justifiant de la compétence des formateurs, de nombreux attestations de clients satisfaits des prestations réalisées". Ensuite ? Rien n’est acquis. "Ce label doit être renouvelé tous les quatre ans".

Parmi les points rédhibitoires, "l'incapacité à concevoir, animer, évaluer les formations dans les règles, l'incohérence des moyens humains, matériels et financiers, le non-respect du code du travail ou de la réglementation du secteur, l'absence de prise en compte de la satisfaction des clients et des bénéficiaires", énumère Jacques Abécassis.

Tertio, certains organismes, à fortiori les petits, peinent à répondre à certains critères retenus par le décret de juin 2015. Au premier rang desquels "l’adaptation des dispositifs d’accueil" ou "les conditions d’information du public sur l’offre". "Les formateurs indépendants ne peuvent pas dispenser une formation et effectuer en même temps un accueil téléphonique", remarque un autre acteur de la formation. D'où la crainte de voir "les petites structures écartées du processus".

Contre une logique d'exclusion

Une inquiétude toutefois balayée par Catherine Bocheur, directrice de mission CPA à la DGEFP, "l’objectif étant de traquer les abus, pas de bloquer les petits organismes". De même, côté Opca, on se défend d’être dans une logique d’exclusion. Plusieurs d’entre eux ont, d’ores et déjà, lancés des guides d’accompagnement, à l’instar d’Intergros. Un service d’audit contrôle qualité, comptant trois salariés, a également été ici spécialement créé pour l'occasion. "Il faut donner deux à trois ans aux Opca pour monter en régime et apporter le conseil nécessaire aux organismes de formation, assure Marc Dennery. L’objectif étant d’aider les entreprises et les salariés à s’y retrouver sur ce marché excessivement émietté". Même si, de l’avis de Jérôme Lesage, PDG fondateur de Place de la formation, un opérateur d’externalisation de la gestion administrative de la formation, "cette obligation reste circonscrite au marché réglementé par le 1%. Or, les entreprises qui dépensent en moyenne 3% de leur masse salariale dans la formation investissent aujourd’hui davantage sur le deuxième marché, celui du 2%, totalement libéralisé". Soit tout un pan de l’activité occultée. Ce spécialiste dénonce, en outre, "le caractère contraignant de la démarche, à l’heure où les organismes durement touchés par la suppression du DIF doivent relancer leur activité".

Reste que cette opération qualité n'est pas anodine. Le marché devrait forcément évoluer. Rendez-vous d'ici à quelques années pour mesurer le bien-fondé de cette révolution.

 

(1) Actalians; Afdas; Agefos-PME; Anfa; Constructys; Defi; Fafiec; Fafih; Falsea; FAF.TT; Forco; Intergros; Opca 3+; Opcabaia; Opcaim; Opcalia; Opcalim ; Opca-transports; Unifaf et Uniformation.

Anne Bariet
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