Quand une proposition de loi sur le handicap secoue l'Assemblée
Quand une proposition de loi sur le handicap secoue l'Assemblée
16.10.2018
Action sociale
L'Assemblée nationale n'a pas examiné le 11 octobre une proposition de loi visant à améliorer l'inclusion scolaire des enfants handicapés. Ce qui a déclenché une attaque en règle des députés de la majorité par l'Insoumis François Ruffin. Mais qu'en est-il exactement de cette PPL ? Qu'en disent les différentes parties, sans oublier les associations du secteur ?
Tout le monde, ou presque, a vu cette vidéo de François Ruffin, le très actif député France Insoumise de la Somme. Il réagit avec véhémence au renvoi - sans examen - de la proposition de loi défendue par le jeune député du Lot Aurélien Pradié (Les Républicains) par les députés La République en marche (LREM) et Modem. Ceux-ci sont accusés par le parlementaire de "voter contre, contre, contre, contre, de lever la main en cadence, comme des Playmobils". Il conclut son intervention par un avertissement : "Ce vote vous collera à la peau comme une infamie !"
Qu'y a-t-il exactement dans cette proposition de loi "relative à l'inclusion des enfants en situation de handicap" qui a mis le feu aux poudres parlementaires ? Dans son exposé des motifs, cette PPL signée par tous les députés LR indique que "le terme même d’inclusion semble faire consensus. [...] Sauf que la seule et répétitive affirmation du mot ne suffit pas à lui donner une réalité concrète." La situation des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) est particulièrement ciblée : "Ces accompagnants, estime la PPL, sont dans des situations précaires, ce qui implique de lourdes difficultés de recrutement, le manque tant de formation que de reconnaissance des qualifications est problématique, la multitude des statuts [...]"
Un statut unique de l'accompagnant
L'une des principales mesures vise à simplifier les statuts et les conditions de recrutement. En effet, explique-t-on, pour accompagner les 156 000 enfants bénéficiant d'une aide humaine, il existait l'année dernière 32 460 AESH et 50 000 personnes en contrat aidé. La PPL proposait justement de créer un statut unique d'aidant à l'inclusion scolaire. L'ensemble de ces professionnels seraient tenus de se former ou de valider l'expérience acquise. Dans chaque département serait proposée une formation payée par l'Etat qui déboucherait sur un diplôme d'Etat. L'obligation d'effectuer deux CDD avant d'obtenir un CDI serait supprimée. L'ensemble des personnels relèveraient du ministère de l'éducation nationale.
D'autre part, la PPL prévoit que les MDPH examinent dans les deux mois (au lieu de quatre actuellement) les demandes d'aide des enfants handicapés. Constatant que le projet personnalisé de scolarisation (PPS) n'est pas élaboré par une majorité de départements, le texte propose de définir un parcours inclusif personnalisé qui permettrait de rassembler tous les intervenants autour de l'accompagnement de l'enfant aussi bien à l'école que pour les temps périscolaires.
Chose assez rare, cette proposition de loi était soutenue par l'ensemble des groupes sauf par La République en marche et le Modem. Voilà pourquoi on a assisté à un exercice rare d'un parlementaire de gauche défendant une initiative portée par un député de droite. Résultat des courses : le parti au pouvoir est apparu très isolé, d'autant que le feuilleton du remaniement n'est pas terminé.
"Une proposition inutile et dangereuse"
Adrien Taquet, député LREM, auteur d'un rapport sur la simplification dans le domaine du handicap, a sonné la contre-attaque dans une tribune parue dans le Journal du dimanche : "Pour qui connaît ce sujet complexe, il ne faut pas plus de cinq minutes pour se rendre compte que cette proposition de loi est inutile quand elle n'est pas dangereuse pour les personnes en situation de handicap." Et le parlementaire des Hauts-de-Seine d'expliquer pourquoi la PPL est inutile car elle reprend des éléments existant déjà comme le recrutement de 12 000 accompagnants supplémentaires pour 2019 ou la formation accrue. La règle des deux mois que devrait respecter la MDPH pourrait aboutir, selon le député macroniste, à retarder encore plus ses notifications. Le parlementaire ose une conclusion : "Ces sujets sont trop graves pour ne pas mériter un rassemblement au-delà des partis". A ce propos, le gouvernement doit ouvrir une concertation fin octobre avec le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH).
"Il faut passer par la loi"
Interrogé par TSA le 15 octobre, le rapporteur Aurélien Pradié ne décolère pas contre la tribune de son collègue. "Adrien Taquet n'a même pas participé aux discussions en commission ; il ne connaît pas le contenu de la PPL. Dans cette affaire, la République en marche a été dilettante." Sur le fond, il souligne un désaccord avec le parti majoritaire. "Taquet pense que les circulaires et décrets peuvent tout régler. Or, réformer le statut d'accompagnateur suppose de passer par la loi. Je leur dit qu'ils se se sont trompés de carrière : ils auraient dû devenir chefs de bureau ou sous-préfets, mais pas des députés."
Porter haut et fort notre combat de tous les jours
Et qu'en pensent les associations de ce texte hautement médiatisé ? Interrogée par Francetv.info, l'Unapei n'est pas mécontente de toute cette agitation : "Ce qui s'est passé à l'Assemblée a le mérite d'avoir porté haut et fort notre combat de tous les jours." La fédération fait un peu le tri dans les arguments des uns et des autres. "François Ruffin a raison quand il dit que ces femmes sont sous-payées, qu'elles sont peu formées". Pour autant, la PPL n'était pas l'alpha et l'omega de la résolution du problème : "Le texte axe surtout sur les aidants. Le problème, c'est qu'il y a beaucoup d'autres choses à revoir. Il y a encore aujourd'hui des milliers d'enfants qui attendent des places, des enfants qui se retrouvent sans accompagnement ou des accompagnements mal adaptés."
Le Conseil constitutionnel a censuré 32 articles de la loi "pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration" qui en comptait initialement 86. Ont notamment été écartées des dispositions visant à restreindre les droits sociaux des étrangers.
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