Responsabilité de l'huissier de justice dans la conduite d'une saisie-vente

30.07.2018

Gestion d'entreprise

L'huissier ne commet pas de faute dans la conduite de la saisie-vente, dès lors qu'il a informé le débiteur qu'un meuble a été séquestré entre les mains de son fabricant et n'a pas été vendu en raison de la revendication opposée par ce séquestre.

La Cour de cassation juge que la responsabilité de l’huissier de justice dans la conduite des opérations de saisie-vente ne peut être mise en jeu par le débiteur, dès lors que l’huissier l’a informé qu’un matériel saisi était séquestré entre les mains de son fabricant et n’a pas été vendu en raison de la revendication fondée sur l’article 2276 du code civil opposée par ce séquestre.

En l’espèce, un bailleur charge un huissier de justice de procéder à l’expulsion et au recouvrement de la dette locative de sa locataire, en exécution d’une ordonnance de référé ayant constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail commercial. L’huissier de justice délivre à la débitrice un commandement de quitter les lieux et un commandement de payer aux fins de saisie-vente, puis pratique la saisie-vente de divers meubles garnissant le local loué. Parmi ces meubles, un appareil nécessitant un démontage technique, l’huissier de justice fait procéder à son enlèvement par le fabricant, qu’il désigne en qualité de séquestre et en informe la débitrice. Le séquestre informe l’huissier qu’il revendique ce matériel en vertu d’une clause de réserve de propriété consentie par le fournisseur, l’huissier de justice lui répond que le créancier renonce à le faire vendre et qu’il peut le considérer comme libre de toute saisie, procéder à sa revendication et l’appréhender. La débitrice soutient n’avoir pas été informée de cette renonciation à une vente forcée et assigne le créancier, l’huissier de justice et le séquestre devant le juge de l’exécution, en responsabilité et indemnisation d’une exécution dommageable.

Le juge de l’exécution (JEX) rejette ses demandes indemnitaires dirigées contre l’huissier de justice.

La cour d’appel confirme entièrement la décision du JEX. Elle relève que la débitrice ne peut faire échec au droit de revendication du matériel né de la clause de réserve de propriété, dès lors qu’elle n’en est pas possesseur de bonne foi, au sens de l’article 2270 du code civil, au motif qu'elle n’a pas payé l’intégralité du prix d’acquisition ni consigné les frais d’expertise ordonnée à sa demande en vue de démontrer les défauts qu'elle alléguait pour retenir une partie du prix. La cour d'appel ajoute qu’avisée que le matériel saisi était séquestré entre les mains de son fabricant et informée qu’il n’avait pas été vendu en raison de la revendication de propriété opposée par ce séquestre, la débitrice n’a pas engagé, dans les 3 ans de la perte de l’appareil conformément à l’article 2276 du code civil, une action en revendication ou en restitution contre celui-ci, qui, une fois rentré en possession de l’équipement sur lequel il disposait d’une réserve de propriété consentie par le fournisseur, était en droit de le conserver, ni mis en cause le fournisseur qui lui avait vendu un matériel grevé de cette sûreté sans s’être acquitté de son prix.

La débitrice forme un pourvoi en cassation. Elle argue que l’huissier de justice, garant de la légalité des poursuites, a la responsabilité de la conduite des mesures d’exécution pratiquées par lui à l’encontre du débiteur et doit répondre, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, des fautes commises à cette occasion. Elle considère que l’huissier a commis une faute à son égard et manqué à son devoir général d’information envers le débiteur saisi, en omettant de l’informer de la renonciation du bailleur à la vente du matériel litigieux pour apurer sa dette locative, ce en dépit de ses nombreuses demandes d’explication à ce titre.

La Cour de cassation rejette son pourvoi pour les motifs énoncés ci-dessus.

Edith Dumont, Dictionnaire Permanent Recouvrement de créances et procédures d'exécution

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