Une copie d'examen est une donnée personnelle

10.01.2018

Gestion d'entreprise

La copie d'examen professionnel d'un candidat et les éventuelles annotations de l'examinateur constituent des données à caractère personnel auxquelles ce candidat a un droit d'accès.

Un expert-comptable stagiaire irlandais échoue plusieurs fois à un de ses examens. A la suite du rejet de sa contestation, il demande à l’Ordre des experts-comptables l’accès aux informations le concernant sur le fondement de la protection des données personnelles. L’Ordre accède en partie à sa demande mais refuse de lui transmettre sa copie d’examen car elle ne contient pas de données personnelles au sens de la loi irlandaise transposant la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995. L’autorité irlandaise de protection des données personnelles (l’homologue de la CNIL en France) répond également au candidat que la copie d’examen ne constitue pas des données à caractère personnel. La Cour suprême irlandaise reconnaît la recevabilité du recours contre la décision de l’autorité, sursoit à statuer et saisit la CJUE.

La CJUE rappelle que la définition des données à caractère personnel de l’article 2 de la directive 95/46/CE est très large dans la mesure où il s’agit de « toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable » ; « est réputée identifiable une personne qui peut être identifiée, directement ou indirectement, notamment par référence à un numéro d’identification ou à un ou plusieurs éléments spécifiques, propres à son identité physique, physiologique, psychique, économique, culturelle ou sociale ». Elle indique qu’un candidat à un examen professionnel est une personne physique qui peut être identifiée soit directement soit indirectement, à partir d’un numéro d’identification, lequel est apposé sur la copie d’examen ou sur le feuillet de couverture de la copie. La CJUE précise que les réponses contenues dans la copie d’examen sont personnelles et concernent une personne déterminée - le candidat - en raison :

- de leur contenu reflétant notamment le niveau de connaissance et de compétence du candidat,

- de leur finalité évaluant notamment les capacités professionnelles du candidat,

- et de leur effet sur les droits et intérêts du candidat.

Les annotations de l’examinateur constituent également des informations concernant le candidat. Ainsi, ce dernier dispose d’un droit d’accès à ses réponses à l’examen et aux annotations de l’examinateur afin d’effectuer les vérifications nécessaires notamment de leur exactitude.

Cependant, la directive 95/46/CE prévoit des limites au droit d’accès qui portent sur le respect des droits et libertés d’autrui. La CJUE rappelle, en outre, que le règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD), en application le 25 mai 2018 et remplaçant cette directive, étend la liste des motifs de limitations aux objectifs importants d’intérêt public général de l’Union ou d’un État membre (Règl. (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, 27 avr. 2016 : JOUE n° L 109, mai).

La Cour conclut à l’effectivité du droit d’accès via le fondement du droit de la protection des données personnelles indépendamment du fait de savoir si le candidat dispose ou non d’un droit d’accès à sa copie en vertu de la réglementation applicable à la procédure d’examen. Ce faisant, elle confirme la force du droit de la protection des données personnelles et son importance à l’aune de l’entrée en application du RGPD.

Remarque : il est toutefois surprenant que la Cour retienne une interprétation du texte plus large que celle donnée par l’autorité de contrôle qui étend généralement son application. De plus, on peut s’interroger sur le fait que le candidat ait demandé l’accès à sa copie sur le fondement du droit de la protection des données personnelles, sans avoir eu recours à une autre procédure.
Vanessa Younes-Fellous, Avocate en droit de la protection des données personnelles

Nos engagements