[Vidéo] Pascal Pavageau (FO) : "9000 CSE, ça n'a rien d'exceptionnel !"

[Vidéo] Pascal Pavageau (FO) : "9000 CSE, ça n'a rien d'exceptionnel !"

13.09.2018

Représentants du personnel

Devant le club Réalités du dialogue social (RDS), hier matin à Paris, Pascal Pavageau a fait part de son agacement contre "le syndicalisme bashing". Le secrétaire général de FO a exhorté les syndicats et le patronat à travailler ensemble pour relancer la négociation interprofessionnelle. Il a pointé les dangers liés à la baisse du nombre de mandats engendrée par les passages au CSE.

 

Pascal Pavageau, qui a succédé à Jean-Claude Mailly à la tête de FO à la suite d'un congrès mouvementé, veut imprimer sa marque à Force ouvrière, non sans noter : "Non, l'ADN de FO n'a pas muté en avril 2018 !"

 

Invité du club d'échanges RDS (Réalités du dialogue social) hier matin à Paris, cet ingénieur de travaux publics de 49 ans revendique de s'inscrire dans la continuité d'un syndicat né de la scission, en 1947, de la CGT. "J'ai relu toutes les motions de FO depuis l'origine. Ce sont toujours des programmes économiques et sociaux. Par exemple, la motion de 1973 qui contient des idées sur le mix énergétique souhaitable pour la France reste d'une actualité étonnante", a-t-il lancé.

 Nous n'avons pas fait assez de propositions ces dernières années

 

Et Pascal Pavageau de noter que malheureusement ces dernières années, c'est surtout des positions défensives que le syndicat a exprimées face aux politiques : "Quand il n'y a plus de grain à moudre, on finit par ne se concentrer que sur la défense de la meule. Nous avons fait peu de propositions. L'une des exceptions était l'idée de créer une banque publique d'investissement, qui a été reprise par le gouvernement avec la création de la BPI".

Le nouveau secrétaire général de FO, qui précise ne jamais s'exprimer sans mandat, veut donner un nouveau souffle à ce programme économique et social susceptible d'inspirer le gouvernement comme les parlementaires : "La motion du dernier congrès comporte deux pages sur la laïcité, ce que nous n'avions jamais fait, et traite aussi du numérique. Et nous sortirons en fin d'année un fascicule sur l'environnement". Pascal Pavageau milite aussi pour le retour en grâce des filières industrielles lancées par les derniers gouvernements et prône des politiques européennes concertées "pour un nouvel EADS (ou Airbus) du photovoltaïque ou de la déconstruction navale". Mais il a l'impression que le gouvernement ne s'intéresse guère à l'industrie et à ses emplois...

Télétravail, nouvelles formes d'emploi : de futurs sujets de négociation interprofessionnelle ?

Redevenir une force de propositions tout en revendiquant une certaine distance à l'égard de l'Exécutif, car "nous ne sommes pas les garants de l'intérêt général" : c'est donc le pari de Pascal Pavageau. Ce pari repose toujours sur l'affirmation d'une confiance dans la négociation collective, "mise à mal par la loi Travail avec l'inversion de la hiérarchie des normes et par les ordonnances".

FO appuie donc la volonté des syndicats et du patronat (P. Pascal Pavageau n'aime guère les mots de "partenaires sociaux" -car "nous ne jouons pas au tennis ensemble"- et de "corps intermédiaires" -car "nous sommes un syndicat à part entière, pas la moitié de quelque chose") de construire ensemble un agenda social autonome de celui voulu et imposé par le gouvernement.

 Nous continuons à travailler ensemble, syndicats et patronat

 

"Ceux qui pouvaient penser devenir les interlocuteurs privilégiés du gouvernement en sont pour leurs frais. Ce gouvernement et ce président refusent de travailler avec les contrepoids que nous représentons", résume-t-il en avertissant le patronat : "Si vous souhaitez n'être qu'un lobby en prise directe avec l'Exécutif, sachez que cela ne durera qu'un temps, d'une part, et d'autre part que vous ne serez pas consultés pour autant sur toutes les  décisions du gouvernement, comme par exemple le prélèvement à la source". 

Pascal Pavageau indique que les huit organisations syndicales et patronales, qui s'étaient réunies en juillet, continuent de se voir en toute discrétion dans l'objectif, espère-t-il, de relancer les négociations interprofessionnelles. Le secrétaire général espère voir mis sur la table la relance de la négociation sur les cadres, une négociation sur le télétravail et une sur les nouvelles formes d'emploi, sur la base du rapport Terrasse. Un objectif d'autant plus nécessaire, glisse-t-il, quand on voit comment le gouvernement qui a tenté d'écrire un article sur le sujet dans la loi sur l'Avenir professionnel, s'est fait retoquer par le Conseil constitutionnel.

Ordonnances et CSE : "Non au syndicalisme bashing !"

Interrogé sur le premier bilan dressé par le gouvernement de l'application des ordonnances Travail, avec une baisse d'un tiers des mandats pour les entreprises passées en CSE (comité social et économique), Pascal Pavageau pointe la situation de nombreux militants qui vont perdre leurs mandats -notamment ceux qui occupent plusieurs mandats voire des temps plein- et que leur entreprise va devoir réintégrer pleinement : "Nous n'avons bien sûr pas la capacité à FO de prendre en charge comme salariés des camarades qui ont perdu leurs mandats, sauf dans quelques situations exceptionnelles dans des fédérations. Il nous faut trouver des solutions avec chaque employeur. C'est à chaque fois une situation différente".

Le mépris des OS affiché au niveau national aura des conséquences dans les entreprises

 

Le syndicaliste prend l'exemple d'une entreprise marseillaise où l'application stricte du CSE ferait passer le nombre de mandats de 181 à 35. Commentaire : "Avec 181 mandats, vous n'avez pas que des élus à temps plein, vous avez des représentants qui restent connectés avec les salariés. Avec 35 mandats, vous n'aurez que des quasi-permanents qui auront moins de contacts non seulement avec les autres salariés, mais aussi avec leur union locale ou départementale. C'est un appauvrissement". Et le secrétaire général de FO n'a pas eu de mots assez forts pour pointer les risques liés à un affaiblissement durable des syndicats dans l'entreprise. Le syndicalisme bashing, le mépris au niveau national des organisations syndicales, cela aura des conséquences à la base, dans les entreprises, avec un risque de radicalisation des mouvements sociaux, dit-il en substance. Les employeurs eux-mêmes, a-t-il ajouté, n'ont rien à gagner à ne plus avoir comme interlocuteurs et négociateurs que des individus non syndiqués, isolés, non insérés dans un cadre collectif ayant ses propres règles, ses valeurs et ses modes de résolution des conflits.

Le plan pauvreté ne trouve pas grâce aux yeux de FO

Enfin, alors qu'il intervenait avant la présentation par Emmanuel Macron du plan pauvreté (*), Pascal Pavageau a mis en garde l'Exécutif contre "toute conditionnalité des minimas et des aides sociales". Dans la soirée, le communiqué publié par FO sur le plan pauvreté enfonçait le clou en dénonçant "la mise en place «d'un contrat d'engagement réciproque» par lequel chaque pauvre doit, dans le cadre d'un «projet productif», gagne sa dignité en prenant part à l'activité du pays et en remplissant des critères fixés par la puissance publique afin de percevoir un revenu universel d'activité".

(*) lire notre article sur le plan de lutte contre la pauvreté dans cette édition ainsi que les autres réactions syndicales.

 

Profiter des 100 ans de l'OIT : une idée FO au départ...
Pascal Pavageau raconte avoir proposé le 17 juillet au Président de la République qu'un travail tripartite soit engagé entre les syndicats, le patronat et le gouvernement afin de parvenir, dans les six mois, à une position commune qu'exprimait la France à l'occasion des 100 ans de l'Organisation internationale du travail (OIT) en 2019 : "J'ai proposé que les dispositions sur la santé au travail soient intégrées au sein des conventions fondamentales de l'OIT. Si la France portait cette idée, cela aurait un certain retentissement". Résultat : le Premier ministre a saisi le le conseil économique, social et environnemental en vue d'un rapport sur les nouvelles formes d'emploi. Commentaire de Pascal Pavageau : "Mais ça n'a rien à voir ! Porter une position commune auprès de l'OIT, c'est bien autre chose".

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Bernard Domergue
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