[Vidéo] Rachat d'Opel par PSA : la réaction des syndicats

[Vidéo] Rachat d'Opel par PSA : la réaction des syndicats

06.03.2017

Représentants du personnel

Les syndicats ayant signé l'accord de compétitivité de PSA en France (CFE-CGC, CFTC, CFDT, FO et SIA-GSEA) assurent que le rachat, officialisé hier, d'Opel Europe par le constructeur français ne remet pas en question les garanties d'investissement et de maintien de l'emploi en France. Mais en attendant le CCE du 22 mars, la CFDT semble inquiète et la CGT craint le pire.

 

 

Ce lundi 6 mars, avenue de la Grande Armée à Paris, à deux pas de la porte Maillot, le constructeur PSA a officialisé son projet de reprise de la branche européenne de General Motors (Opel-Vauxhall). Une opération de 2,2 milliards d'euros qui marque le redressement spectaculaire de la marque française. Pour sortir du rouge, PSA avait fermé le site d'Aulnay en 2014, supprimé de nombreux emplois et négocié de nouvelles flexibilités (*). L'artisan de ce rétablissement, Carlos Tavares, l'ancien n°2 de Carlos Ghosn chez Renault, a multiplié vis à vis des responsables politiques européens les assurances de bonne volonté. Aucun site ne fermera en Allemagne, le management d'Opel sera conservé et les accords sociaux négociés, en France et outre-Rhin, seront respectés, a assuré le patron de PSA  aux partenaires sociaux et aux responsables politiques.

L'Etat a eu raison d'apporter un soutien décisif à PSA

Le président de la République François Hollande s'est réjoui de cette opération dans un communiqué : "PSA, dont le redressement est aujourd'hui acquis, démontre avec cette opération qu'il peut désormais contribuer à la consolidation du secteur automobile en Europe (..). L'Etat a eu raison d'apporter un soutien décisif en apportant à la filiale bancaire du constructeur en 2012 puis en entrant au capital en 2014", avec le chinois Dongfeng. Le nouvel ensemble PSA-Opel (95 700 salariés pour le premier et 35 600 pour le second) devrait peser 17% des ventes de voitures neuves dans l'Union européenne, ce qui en ferait le deuxième constructeur, derrière Volkswagen mais devant Renault. Les syndicats qui ont signé et soutenu les mesures d'accroissement de la flexibilité en échange d'une garantie des emplois et des investissements en France (FO, CFE-CGC, CFDT, CFTC et SIA-GSEA) ont qualifié "d'opportunité intéressante" cette opération. Lors d'une conférence de presse commune tenue hier au siège de PSA, les cinq syndicats, qui se prévalent de représenter 80% des salariés, ont salué une opération inédite depuis la reprise de Talbot Chrysler en 1978. Dans leurs déclarations, ces syndicalistes disent faire confiance à leur management (voir leur interview dans la vidéo ci-dessus).

 Nous revenons de l'enfer, rappelle FO

"Nous revenons de l'enfer. En 2013, nous étions au bord du dépôt de bilan", a rappelé Christian Lafaye, délégué syndical central (DSC) FO, qui voit dans ce 6 mars "une journée historique". Franck Don, DSC CFTC, se veut également optimiste : "C'est une grande nouvelle". "Fabriquer un million de véhicules supplémentaires sur la base technologique de PSA ne peut être qu'une bonne nouvelle pour la France", renchérit Jacques Mazzolini, DSC CFE-CGC. Enfin, Serge Maffi, DSC du syndicat autonome SIA-GSEA, escompte que la méthode de redressement qui a fonctionné chez PSA portera ses fruits pour Opel. Si elle-aussi souligne que les accords compétitivité ont permis d'améliorer les résultats de l'entreprise, Christine Virassamy se montre plus prudente : la DSC CFDT dit attendre le comité central d'entreprise consacré à cette opération, le 22 mars, pour  en savoir plus sur l'opération. Au-delà du CCE, dit-elle, il faudra envisager un comité stratégique des partenaires sociaux.

La CFDT est beaucoup plus critique dans son communiqué

Dans la foulée de cette conférence de presse, le communiqué publié par la CFDT a d'ailleurs durci le ton. La CFDT y réclame à la direction de PSA "des éclaircissements sur la stratégie, le projet industriel et l'emploi". Le syndicat juge que PSA n'envisage avec Opel qu'une opération européenne, "loin des ambitions mondiales dont le groupe rêvait en 2012". Si l'opération ferait de PSA-Opel le 2e constructeur européen, celui-ci sera très dépendant d'un marché européen en faible expansion, "soit une stratégie risquée si l'Europe avait à connaître des difficultés économiques", met en garde la CFDT. Celle-ci demande donc des précisions sur le projet industriel et l'organisation de la recherche et développement. Le syndicat, en citant les "forts investissements" réalisés par Opel sur le site allemand de Rüsselsheim, semble craindre en fait une réorganisation des sites français. 

La direction se montre rassurante sur l'emploi

Les autres organisations syndicales dites réformistes semblent plutôt souscrire dans l'ensemble le discours de la direction s'agissant des opportunités en termes de R&D et d'économies d'échelle. Elles espèrent que les sites de production français de PSA hériteront des fabrications de pièces importées des Etats-Unis par Opel jusqu'à présent. Les synergies entre PSA et Opel seront-elles néanmoins suffisantes pour éviter les suppressions d'emplois ? "Aujourd'hui, notre projet n'est pas basé sur des coupes et des réductions d'emploi. Dans toutes les professions, les salariés (Ndlr : d'Opel) pourront se comparer aux autres entreprises européennes et ainsi s'améliorer", a répondu hier Carlos Tavares lors de la conférence de presse annonçant l'opération. Le benchmark comme garantie suprême du maintien des emplois ? Le propos ne convainc pas tous les syndicats.

Personne ne doit se sentir protégé, juge la CGT

Jean-Pierre Mercier, contacté hier après-midi, voit dans ces paroles le signe de la volonté du patron de PSA de "mettre en concurrence les salariés français, anglais et allemands". Et le DSC CGT d'ajouter : "Carlos Tavares a promis à la chancelière Merkel un maintien des sites allemands jusqu'en 2018. Mais après, il faut s'attendre à des fermetures pour supprimer des doublons, que ce soit dans la production ou la recherche". Si les autres organisations syndicales sont rassurées, ce n'est pas notre cas, ironise Jean-Pierre Mercier : "Personne ne doit se sentir à l'abri étant donnés les objectifs de rentabilité du patron de PSA". Quant à l'accord compétitivité (*) signé en France et qui court jusqu'en décembre 2019, il n'offre aux yeux du délégué CGT pas de garanties : "En 2017, au travers des pré-retraites et des départs renouvelés, nous aurons 2 000 emplois en moins en France. Et depuis 3 ans, ce sont 17 000 emplois CDI qui ont été supprimés dans notre pays".

(*) Voir notre article du 11 juillet 2016 : "Le nouvel accord compétitivité de PSA prévoit des mesures pour les IRP" A noter que la CFDT a signé cet accord baptisé "Nouvel élan pour la croissance" (NEC) alors qu'elle n'avait pas engagé sa signature sur l'accord de 2013.

 

2 000 techniciens et cadres vont quitter la Garenne-Colombes

Selon la CGT, l'ordre du jour du CCE du 22 mars ne serait pas exclusivement consacré au projet de rachat d'Opel par PSA. Il devrait y être aussi question des modalités de la fermeture du centre R&D de la Garenne-Colombes (Hauts-de-Seine) et des transferts des postes. Les 2 000 emplois (techniciens et ingénieurs) devraient être mutés vers deux sites, celui du pôle tertiaire de Poissy (Yvelines) et celui du centre technique de Carrières-sous-Poissy (Yvelines).

Ajoutons que PSA va également quitter cette année son siège historique de la Grande Armée, à Paris. Les directions devraient s'installer à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) et la majorité des 1 500 salariés à Roissy et Vélizy.

 

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Bernard Domergue (texte et vidéo)
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