"Il faut moderniser l'offre de formation en apprentissage"

"Il faut moderniser l'offre de formation en apprentissage"

21.12.2015

Gestion du personnel

Alors que l’exécutif devrait annoncer de nouvelles mesures en faveur de l’apprentissage en janvier prochain, Rachid Hanifi, directeur des affaires institutionnelles et des relations extérieures au sein de la direction de l'enseignement et de la formation de la CCIP Paris Ile-de-France, revient sur les principaux points de blocage de ce mode de formation.

Le gouvernement a proposé, en juillet dernier, une aide forfaitaire de 4 400 euros pendant un an pour les entreprises de moins de 11 salariés. Mais cette mesure n’a pas produit les effets escomptés. Le nombre d’entrées en apprentissage continue à chuter. Pourquoi ?

L’intention était louable. Mais le calendrier et le ciblage n’étaient pas adaptés. Cette aide est arrivée trop tard. La plupart des entreprises préparent le recrutement des apprentis au printemps puis formalisent leur intentions d’embauche en mai/juin ou juillet. Il faudra donc attendre la rentrée prochaine pour évaluer l’impact concret de ce dispositif. Par ailleurs, cette aide est versée uniquement pendant la première année du contrat. Mais la période d’alternance dure beaucoup plus longtemps, deux voire trois ans. D’où le manque d’engouement de certains employeurs. Enfin, ce dispositif était ciblé sur les entreprises de moins de 11 salariés. Or, il existe un vivier d’entreprises de plus de 10 salariés qui ne sont pas suffisamment engagées. Les sociétés de 10 à 50 salariés représentent 20% de la masse salariale en France mais elles n’accueillent que 10% d’apprentis. C’est pourquoi un "coup de pouce" dans leur direction aurait pu constituer un meilleur signal. Il faut donc réfléchir à un dispositif moins discriminant et continu. On compte aujourd’hui environ 400 00 apprentis, contre 500 000 initialement prévus.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Quel est l'impact de la nouvelle répartition de la taxe d’apprentissage instaurée par la loi de finances 2014 ?

La part "quota" (26% du montant total de la taxe) a permis aux centres de formation d’apprentis de conserver des ressources similaires aux années précédentes. En revanche, les écoles d’enseignement supérieur de formation initiale ont été pénalisées. Le nouveau schéma de financement ayant réduit la part "barème" (21%). Ces écoles ont perdu environ 20% à 30% de leurs ressources.

Quelles sont vos propositions?

Il faut moderniser l'offre de formation en apprentissage. De nombreux cursus de type bac +2, bac+3 ou bac +5 ne sont pas encore accessibles via l'apprentissage. En outre, il est nécessaire d’élargir le champ des certifications aux titres professionnels inscrits au RNCP (Répertoire national des certifications professionnelles). Ces titres peuvent être créés et réactualisés plus rapidement qu'un diplôme d'Etat. Ils permettent ainsi d’ajuster plus rapidement l’offre de formation aux besoins des entreprises. Enfin, il serait nécessaire de s'attaquer au problème du Bac professionnel dont la durée d'études est de 3 ans. Car les employeurs ne souhaitent pas s'engager sur une période aussi longue. Des formules mêlant temps plein sur une première année et deux années d'apprentissage répondraient mieux à leurs attentes.

Y a-t-il d’autres freins structurels ?

Les démarches administratives restent complexes. La dématérialisation n’a pas encore été effectuée. Il est aujourd’hui plus facile de signer un contrat de droit commun plutôt qu’un contrat d’apprentissage. De même, les r��gles à suivre pour rompre un contrat sont complexes. Souvent pires qu’un CDI.

Mais surtout, les entreprises ont besoin de stabilité. On ne peut pas changer les règles tous les deux à trois ans. D’autant qu’il est nécessaire d’évaluer les dispositifs mis en place avant d’en lancer de nouveaux.

Que pensez-vous de l'assouplissement de la législation concernant les travaux dangereux?

Ce sujet a cristallisé les tensions. La réglementation permet désormais aux employeurs d’affecter leurs apprentis mineurs à des travaux dangereux sur simple déclaration à l'Inspection du travail. Mais ce thème ne constituait pas à lui seul un frein à l'apprentissage. Dans les années 90, les contraintes étaient plus fortes en matière réglementaires et l’apprentissage se développait pourtant sans difficultés. Je crois qu'il faut plutôt chercher les freins du côté de l'orientation. L'apprentissage est encore trop souvent présentée comme une voie pour les jeunes en situation d'échec scolaire.

Anne Bariet
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