A l'aube de la fête des défunts, le CCSF fait leur fête aux contrats d'assurance obsèques !

25.10.2024

Gestion d'entreprise

A l'approche de la Toussaint, période traditionnellement associée aux réflexions sur la mort et les rituels funéraires, le Comité consultatif du secteur financier a publié un avis portant sur les contrats d'assurance obsèques sur lequel il est utile de se pencher.

Le marché de l’assurance obsèques continue de croître face au vieillissement de la population. Chaque année, près de 500 000 souscriptions témoignent de l’intérêt croissant des Français pour anticiper et financer leurs funérailles, alors que les autorités multiplient les efforts pour améliorer la transparence et la lisibilité de ces contrats.

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La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Le contrat d’assurance obsèques est un contrat mixte d’assurance vie, souscrit du vivant de l’assuré (le futur défunt), qui lui permet de financer et/ou d’organiser ses funérailles.

Très souvent source de confusion pour les souscripteurs assurés, ces contrats se répartissent en deux catégories distinctes :

  • les contrats dits « en capital », prévoyant le versement d’un capital à un bénéficiaire désigné au décès du souscripteur assuré, nécessairement affecté aux frais des funérailles ;

  • les contrats dits « en prestations » conclus (en général) avec des opérateurs funéraires agissant en qualité de distributeurs de contrats d’assurance (courtier ou mandataire d’intermédiaire d’assurance), permettant de prévoir à la fois le financement et l’organisation des obsèques. Dans ce cadre, les opérateurs funéraires sont chargés de recueillir les volontés du souscripteur assuré, volontés ayant valeur testamentaire.

Depuis une dizaine d’années, les contrats obsèques sont dans le viseur des autorités de contrôle.

Le 18 février 2021, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a procédé à l’enrichissement de sa recommandation 2015-R-02 du 12 février 2015, relative à la commercialisation des contrats d’assurance vie et prévoyance destinés au financement des obsèques. Les modifications apportées visaient à inciter les professionnels à renforcer la clarté et la transparence des informations communiquées, y compris dans le cadre des supports publicitaires, tout en élevant le niveau de qualité du conseil prodigué lors de la souscription de ces produits. Ces évolutions avaient pour finalité de mieux protéger les intérêts des souscripteurs en facilitant leur compréhension et en encadrant de manière plus rigoureuse les pratiques commerciales.

Néanmoins, la compréhension du mécanisme juridique des contrats d’assurance obsèques demeure difficile pour les assurés. Comme le souligne le Médiateur de l’assurance dans une publication du 5 mars 2024, de nombreux souscripteurs s’imaginent à tort que le montant du capital garanti correspond à la totalité des primes ou cotisations versées, majorée d’intérêts. Or, du fait de la nature mixte des contrats contenant une part non négligeable d’assurance prévoyance et non de capitalisation, l’assureur s’engage uniquement à verser au bénéficiaire un capital dont le montant est déterminé à la souscription du contrat. Ainsi, au moment du décès, le total des cotisations versées par le souscripteur peut excéder, ou non, le montant du capital finalement reversé au bénéficiaire.

Les écarts entre le montant des cotisations versées et le capital garanti à la souscription proviennent principalement de deux paramètres :

  • les modalités de versement de la prime : plus la prime est versée sur une longue période, plus le coût de l’assurance est élevé, puisque le capital garanti l’est à l’origine de la souscription ;

  • les frais pratiqués sur le contrat.

L’alerte du Médiateur de l’assurance a mis en évidence l’importance de clarifier davantage le fonctionnement de ces contrats, afin de garantir le consentement libre et éclairé du souscripteur.

C’est ainsi que le Comité consultatif du secteur financier (« CCSF ») a été saisi du sujet et a adopté un avis le 8 octobre 2024 (diffusé le 15 octobre).

Pour rappel, le CCSF est une instance de concertation entre les acteurs du marché et ses avis engagent la place. Les engagements pris par cet avis seront applicables à compter du 1er juillet 2025.

Plusieurs enseignements doivent être retirés de cet avis, indépendamment ou en complément des engagements pris par les professionnels pour améliorer la lisibilité, la compréhension et l’efficacité des contrats d’assurance en prévision d’obsèques.

La nécessité d’une explication pédagogique du fonctionnement juridique du contrat d’assurance obsèques

Il est à noter que l’avis prend le soin d’expliquer les mécanismes juridiques de ces contrats mixtes d’assurance obsèques en alertant le marché sur leur complexité inhérente à leur nature mixte.

L’avis rappelle en effet que ce contrat est un contrat de prévoyance dans la mesure où, dans la grande majorité des cas, le capital garanti est défini à la souscription du contrat et le client verse une prime temporaire ou viagère destinée à constituer pour une part de son versement seulement le capital garanti.

Les cotisations versées par l’assuré ne sont donc pas comme beaucoup le pensent des sommes épargnées, mais des sommes partiellement capitalisées, puisqu’une partie de ces sommes alimente :

  • une provision technique d’assurance permettant à l’assureur d’exécuter ses engagements, si le décès intervient très rapidement après la souscription du contrat, alors que la capitalisation ne permet pas la constitution du capital garanti ;

  • et une provision mathématique correspondant à la part capitalisée qui constituera la valeur de rachat susceptible de pouvoir être sollicitée dans le cadre d’une « faculté de rachat » sur ce contrat mixte dès lors que l’assuré souscripteur souhaitera résilier cette convention avant son décès.

A ce stade, on doit relever des impropriétés de langage, notamment par l’utilisation quasi systématique de la terminologie « valeur de rachat », lorsqu’en réalité dans ces contrats, et dès lors qu’il s’agit de contrats mixtes prévoyance-vie, il ne s’agit pas d’une valeur de rachat au sens de la réglementation PRIPP’s, mais d’une faculté de rachat pour laquelle l’assuré ne récupère que la part capitalisée de son versement.

Ces développements font écho à la principale alerte du Médiateur de l’assurance souvent saisi par des consommateurs qui constatent avoir réglé parfois trois ou quatre fois le montant du capital garanti dans le contexte de souscriptions viagères et s’étonnent, soit au moment des obsèques (les héritiers), soit lorsqu’ils effectuent une résiliation anticipée du contrat, que la valeur de rachat qui leur est restituée n’est pas le cumul des cotisations qu’ils ont versées.

Faute d’avoir été correctement renseignés et conseillés, ils ne comprennent pas qu’une part non négligeable, pour ne pas dire majoritaire, de la cotisation qu’ils payent finance un risque, et non pas la constitution d’une épargne.

Le CCSF en déduit divers constats.

Un manque de clarté des contrats obsèques

Le CCSF souligne la complexité de ces contrats, notamment en raison de leur classification juridique. Conformément à l’article R. 321-1 du code des assurances, ils sont rattachés à la branche « vie-décès ». Ainsi, les souscripteurs reçoivent des informations précontractuelles relevant des contrats d’assurance vie, souvent inadaptées aux spécificités des contrats obsèques. Par exemple, le souscripteur doit répondre à des questions sur ses connaissances financières, alors que ces contrats ne relèvent pas du domaine de l’épargne, et son profil de risque doit être déterminé. Le document d’information clé (« DIC ») mis en place par le règlement européen PRIIP’s, c’est-à-dire le document permettant de retrouver les informations essentielles sur le placement, la nature et les caractéristiques principales du produit d’investissement « packagé », doit lui est délivré. En outre, conformément à l’article L. 132-5-2 du code des assurances, sont indiquées les valeurs de rachat au terme de chacune des huit premières années du contrat au moins, alors qu’il vient d’être rappelé que dans ce contrat particulier, le montant restitué à l’assuré en cas de résiliation ou d’application d’exclusions contractuelles ne constitue pas une valeur de rachat au sens du règlement européen.

Pour remédier à cette confusion, le CCSF propose l’élaboration de tableaux standardisés offrant des exemples concrets et pédagogiques pour aider les souscripteurs à comprendre leurs obligations financières selon leur âge de souscription et les modalités de versements de leurs cotisations.

Les modèles fournis par le CCSF visent un capital garanti d’un montant de 5 000 € correspondant au montant généralement réglé aux prestataires funéraires, hors frais de marbrerie.

Il pourrait néanmoins être envisagé par les professionnels, pour améliorer la lisibilité de la lecture de ces tableaux, de présenter des exemples conformes aux offres qu’ils commercialisent.

Ces tableaux doivent figurer sur les sites internet des compagnies d’assurances ou mises à la disposition des clients pour favoriser une comparaison des produits mis sur le marché.

Ils doivent également être remis aux distributeurs car l’avis précise bien que ces tableaux doivent constituer un outil de travail pédagogique, permettant aux distributeurs d’exercer leur devoir de conseil.

A ce stade, il est en effet utile de rappeler aux distributeurs que l’exercice du devoir de conseil nécessiterait le renseignement d’un tableau identique, mais personnalisé à l’âge et au capital garanti choisi par le client, et ce afin d’informer clairement ce dernier sur les impacts de l’âge de souscription et de la modalité de versement de la cotisation pour visualiser la différence entre les valeurs éventuelles de rachat en cas de résiliation, le capital garanti et la totalité des cotisations versées au terme du contrat.

La création d’un DIC spécifique aux contrats obsèques a également été envisagée.

Des délais de carence excessifs

Les contrats obsèques prévoient des délais de carence, parfois longs, durant lesquels la garantie ne prend pas effet immédiatement. Ces délais varient actuellement entre 3 et 24 mois.

Les professionnels se sont engagés à les réduire à un an maximum et à mieux informer les souscripteurs sur l’existence de ces clauses.

Des exclusions contractuelles trop nombreuses et trop larges

Le CCSF a examiné un échantillon de contrats et relevé de nombreuses exclusions jugées inadaptées, telles que celles liées aux catastrophes naturelles, aux mouvements sociaux ou encore des clauses non conformes.

Dans le même temps, par un communiqué de presse en date du 24 septembre 2024, l’ACPR a incité les organismes d’assurance à revoir l’ensemble de leurs contrats et à mettre en place des dispositifs pour réviser ou supprimer rapidement les clauses d’exclusion non conformes.

En cas de mise en œuvre d’une clause d’exclusion, conformément à l’article L. 132-18 du code des assurances, le bénéficiaire doit en principe recevoir une somme égale à la « valeur de rachat ». Cela étant dit, cette clause légale n’est pas toujours indiquée dans les contrats d’assurance obsèques.

Les professionnels se sont engagés à limiter les clauses d’exclusions contractuelles et à inscrire explicitement dans la notice d’information le paiement de la valeur de rachat en cas de cause du décès entrant dans le champ des exclusions mentionnées au contrat d’assurance obsèques.

Des disparités d’âge de souscription

Les contrats obsèques analysés présentent une large disparité dans les âges minimum et maximum de souscription, certains étant accessibles dès 18 ans, d’autres seulement entre 40 et 60 ans.

Le CCSF a estimé qu’il n’était pas pertinent d’uniformiser ces critères, compte tenu des situations variées, telles que des souscriptions liées à des maladies réduisant l’espérance de vie par exemple.

Cette position du comité rend d’autant plus nécessaire les tableaux que les professionnels se sont engagés à communiquer concernant les différentes offres qu’ils mettent sur le marché.

En effet, s’il peut être parfaitement recevable de considérer que certaines personnes jeunes mais se sachant malades, souhaitant organiser au plus tôt leurs obsèques, doivent pouvoir souscrire ce type de contrat, il est important d’éviter que des pratiques commerciales déviantes n’incitent des personnes jeunes en bonne santé à anticiper le financement de leurs obsèques et à s’exposer à des montants de cotisations et des durées de cotisation totalement inadaptées par rapport au capital garanti.

Des risques de reste à charge pour les familles

En raison notamment de l’inflation ou de la souscription d’un capital trop faible ab initio, le montant du capital garanti peut ne pas couvrir le coût des obsèques. Bien que des mécanismes de revalorisation existent depuis 2008 (uniquement pour les contrats en prestations), le comité a relevé le manque de clarté concernant ce mécanisme de revalorisation.

Les professionnels se sont engagés à mieux informer les souscripteurs de l’existence et des modalités de ces revalorisations.

Pour pallier ce risque de reste à charge pour les familles, certains contrats en prestations prévoient une garantie de bonne exécution, c’est-à-dire la prise en charge des écarts éventuels au moment du décès du souscripteur, entre le coût réel des prestations funéraires prévues dans le descriptif de la formule choisie et les sommes versées à l’opérateur funéraire par l’assureur.

Mais là encore ces garanties sont payantes. Ce sont des garanties d’assurance et il convient donc que le distributeur informe dans des conditions loyales et claires le consommateur assuré sur ces dispositifs.

L’amélioration du dispositif Agira

Le dispositif de recherche de contrats obsèques, géré par l’Association pour la gestion des informations sur le risque en assurance (Agira), permet de vérifier l’existence de la souscription d’un contrat par le défunt en trois jours ouvrés.

Afin de faciliter l’accès à cette information, une interface logicielle reliant les systèmes d’information des professionnels (prestataires funéraires et assureurs) va être mise en place. Les prestataires funéraires comme les héritiers ainsi que les assureurs, pourront dans des conditions plus fluides, et au plus tôt après le décès de la personne concernée, être informés de l’existence d’un contrat susceptible de financer les obsèques.

Le renforcement de l’information des souscripteurs sur l’existence d’alternatives à la souscription d’un contrat obsèques

Une alternative aux contrats obsèques, prévue par l’article L. 312-1-4 du code monétaire et financier, permet de prélever de l’argent directement sur le compte bancaire d’un défunt pour permettre de financer ses obsèques. Ce montant s’élève à date à 5 830,50 euros, sur la base du dernier indice annuel Insee calculé.

L’avis recense au sein d’un tableau annexé toutes les sources possibles de financement des obsèques, en dehors des contrats d’assurance.

Les distributeurs pourraient judicieusement s’en inspirer pour interroger leurs clients sur l’existence de l’une de ces solutions susceptibles de leur permettre le financement de leurs obsèques afin d’adapter au mieux de leurs besoins la solution de financement adéquate.

La formation des conseillers funéraires

Le CCSF recommande de renforcer la formation en assurance des conseillers funéraires qui, en leur qualité d’intermédiaire d’assurance à titre accessoire, ne sont pas assujettis à l’obligation de formation continue annuelle, mais suivent une formation en qualité de prestataire funéraire dont le niveau d’heure apparaît assez limité pour appréhender la complexité de ces contrats.

Les professionnels s’y sont engagés.

Ainsi, s’il apparaît que l’organisation des obsèques et l’appréhension de la mort participe d’une démarche nécessaire et sociologiquement très ancrée, il appartient aux professionnels, fournisseur comme distributeur, de veiller à accompagner loyalement et en toute transparence les personnes concernées.

Lise PELTIER, Lucie REKKOUCHE, Astrée avocats
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