Contentieux des visas : le refus implicite est illégal si la CRRV ne s'est pas réunie régulièrement pour statuer

16.04.2021

Pour le tribunal administratif de Nantes, un refus implicite contre un refus de visa est illégal si l'administration n'est pas en mesure de justifier que la Commission des recours contre les refus de visas s'est réunie valablement pour examiner le recours qui lui a été soumis.

Dans un jugement du 12 avril 2021, le tribunal administratif de Nantes estime qu’en cas de refus implicite de la Commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France (CRRV), l’administration ne peut se borner à soutenir que « la décision contestée étant implicite », la commission ne s’est nécessairement pas réunie et que le moyen soulevé est inopérant. Elle doit au contraire justifier que le recours a bien été examiné au cours d’une réunion de la CRRV, régulièrement composée.

selon le rapport « les étrangers en France » (P. 46), pour l'année 2019, 37 016 recours ont été introduits devant la CRRV. Celle-ci s’est prononcée la même année sur seulement 16 322 d’entre eux, conduisant à un nombre élevé de refus implicites.

Pour parvenir à cette solution, le tribunal rappelle notamment :

  • qu’un refus implicite de la CRRV n’exclut pas que l’administration ait pu prendre une décision dans les délais, sans l’avoir communiquée à l’intéressé ;

  • que, seule compétente pour statuer sur le recours administratif obligatoire qui lui est soumis, la Commission ne peut prendre une décision que collégialement, hors les cas où le recours est manifestement irrecevable ou mal fondé ;

  • que toute décision, explicite ou implicite, de la CRRV, doit, pour être valable, avoir fait l’objet d’une délibération en présence de son président ou de son suppléant et d’au moins deux membres ou suppléants respectifs.


En l’espèce, dans son mémoire en défense, le ministère de l’intérieur, avait seulement argué que le silence de la CRRV suffisait à établir la validité formelle d’une décision implicite, tout en reconnaissant que la Commission ne s’était pas réunie pour examiner le recours.

Le tribunal administratif enjoint donc au ministère de faire procéder au réexamen de la demande de visa par la CRRV dans un délai de deux mois après la notification du jugement.

dans le commentaire publié sur son site internet, le tribunal administratif de Nantes relève que la formation de jugement a adopté une position qui n’était jusque-là pas retenue et que, si le tribunal avait déjà considéré ce moyen opérant (TA Nantes, 22 mars 2019, n° 1811373), c’est la première fois que celui-ci est accueilli.

Michel Dejaegher, Consultant Visas, Ancien sous-directeur des Visas, Ancien consul général de France à Alger, Abidjan, Vancouver et Tokyo

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