En cas de "grève sauvage" du personnel aérien, les passagers doivent être indemnisés

07.05.2018

Gestion d'entreprise

La « grève sauvage » ne constitue pas une circonstance extraordinaire qui dispense le transporteur aérien d'indemniser les passagers en cas d'annulation ou de retard important de vol.

La Cour est saisie d'un recours préjudiciel par le juge allemand, en matière de transports aériens. Il lui est demandé si l’absence pour maladie d’une partie importante du personnel navigant constitue une « circonstance extraordinaire », au sens de l’article 5, § 3 du règlement (CE) n° 261/2004 relatif à l’indemnisation des passagers aériens (Règl. (CE) n° 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, 11 févr. 2004, art. 5, § 3 : JOUE n° L 46, 17 févr.). Dans les faits, l’absence spontanée du personnel navigant, bien que justifiée par la maladie, s'expliquait surtout par l'organisation d’une « grève sauvage » après que la direction de la société ait annoncé des mesures de restructuration.

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Au terme de l’article 5, § 3 du règlement (CE) n° 261/2004, le transporteur aérien à l’origine d’une annulation ou d’un retard important de vol est exonéré de l’obligation d’indemniser les passagers lésés, s’il y a eu survenance de « circonstances extraordinaires » qui n'auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises. Selon la jurisprudence de la Cour, peuvent être qualifiés de « circonstances extraordinaires » les événements qui, par leur nature ou leur origine, ne sont pas inhérents à l’exercice normal de l’activité du transporteur aérien concerné et échappent à la maîtrise effective de celui-ci (CJUE, 4 mai 2017, aff. C-315/15, Pešková et a.).

Bien que le préambule du règlement cite la grève comme pouvant constituer une « circonstance extraordinaire », la Cour considère qu'elle n'est pas automatiquement une cause d’exonération (CJUE, 4 oct. 2012, aff. C-22/11, Finnair ; v. notre article). Il convient donc d'apprécier, au cas par cas, si les conditions visées ci-dessus sont remplies.

La Cour considère que tel n'est pas le cas en l'espèce. La « grève sauvage » trouvait son origine dans une décision de la société annonçant des mesures de restructuration. Or, les restructurations et réorganisations d’entreprises font partie des mesures normales de gestion de celles-ci. « Les transporteurs aériens peuvent être, de manière ordinaire, confrontés, dans l’exercice de leur activité, à des désaccords, voire à des conflits, avec les membres de leur personnel ou à une partie de ce personnel », explique la CJUE. De plus, « outre le fait que cette "grève sauvage" trouve son origine dans une décision dudit transporteur aérien, il convient de relever que, en dépit du taux d’absentéisme élevé évoqué par la juridiction de renvoi, ladite "grève sauvage" a cessé à la suite d’un accord qu’il a conclu avec les représentants des travailleurs ».

En conséquence, la Cour estime qu’une telle « grève sauvage » ne constitue pas un événement relevant des « circonstances extraordinaires » de nature à exonérer le transporteur aérien de toute indemnisation prévue par le règlement (CE) n° 261/2004.

Eric Carpano, Professeur agrégé de droit public, Université Jean Moulin, Lyon III
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