Entrée en vigueur de l'accord de partenariat franco-indien pour les migrations et la mobilité

02.11.2021

Droit public

Un accord de partenariat pour les migrations et la mobilité entre la France et l'Inde est entré en vigueur le 1er octobre 2021 avec pour but de développer une coopération dans les domaines de la circulation des personnes et de la lutte contre l'immigration irrégulière.

Un décret portant publication de l’accord de partenariat pour les migrations et la mobilité entre la France et l’Inde, signé à New Delhi le 10 mars 2018, est paru le 13 octobre 2021 au Journal Officiel. Entré en vigueur le 1er octobre 2021, cet accord vise à développer une coopération dans les domaines de la circulation des personnes et de la mobilité des étudiants, des chercheurs et des professionnels, ainsi que dans la lutte contre l’immigration irrégulière.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

Découvrir tous les contenus liés

Il est précisé que ses dispositions s’appliquent sans préjudice de l’application de la législation nationale relative au séjour des étrangers sur tous les points non traités par l’accord.

Visas de court séjour à entrées multiples

Afin de favoriser la circulation entre les deux pays « pour de courts séjours à intervalles réguliers des personnes qui contribuent activement et durablement à la vitalité des relations bilatérales », la France et l’Inde s'engagent d'abord à faciliter la délivrance de visa de court séjour à entrées multiples d’une durée de validité d’au moins une année, dans les meilleurs délais, aux ressortissants de l’autre partie, détenteurs de passeports ordinaires valides.

Les personnes visées doivent notamment appartenir à l’une des catégories suivantes : hommes d’affaires, universitaires, scientifiques, chercheurs, intellectuels, experts et spécialistes venant effectuer des missions d’une durée n’excédant pas trois mois, qui participent activement aux relations économiques, commerciales, universitaires, scientifiques et culturelles entre les deux pays (article 2 de l’accord).

Pour la partie française, le visa de court séjour à entrées multiples permet une durée cumulée de séjours n’excédant pas 90 jours sur une période de 180 jours. Il a une durée de validité d’un à cinq ans en fonction de la qualité et de l’objet du dossier présenté, de la durée des activités prévues dans le pays d’accueil et de celle de la validité du passeport.

La France s’engage à délivrer ces visas dans le respect de ses obligations, à savoir conformément au code communautaire des visas comme le précise la déclaration interprétative transmise par note verbale (n° 2018 – 1174808) dont le texte est annexé à l’accord.

Remarque : l’article 24, paragraphe 2, quater du code des visas autorise les États membres à délivrer d’emblée un visa à entrées multiples d'une durée de validité inférieure ou égale à cinq ans à des demandeurs qui en établissent la nécessité ou justifient leur intention de voyager fréquemment ou régulièrement, pour autant qu'ils apportent la preuve de leur intégrité et de leur fiabilité. Certes, cette marge accordée aux États membres s’applique à des cas individuels et non à des catégories de personnes comme stipulé dans l’accord. Toutefois, les précautions de langage utilisées dans l’accord et la déclaration interprétative semblent retirer tout caractère contraignant à cette stipulation.

Mobilité des étudiants et des stagiaires

La France, qui accueille actuellement 9 000 étudiants indiens, s’engage également à renforcer les activités menées en Inde par l’organisme « Campus France ».

L’accord prévoit ainsi de délivrer un visa de long séjour valant titre de séjour (VLS-TS) portant la mention « étudiant » aux étudiants indiens venant poursuivre leurs études en France (article 3.1), ce qui correspond au droit commun. A l’expiration de ce visa d’une durée maximale d’un an, l’étudiant indien recevra un titre de séjour pluriannuel valable jusqu’au terme du cycle d’études dans lequel il est inscrit, sous réserve de fournir les pièces justificatives listées en annexe II à l’accord.

Remarque : la liste est simplifiée par rapport à celle figurant en annexe 10 du Ceseda, rubrique 25, pour les étudiants relevant du régime général. Le justificatif de domicile doit dater de moins de trois mois (au lieu de six) et certains documents ne sont pas exigés (relevé de notes, dernier diplôme obtenu, attestation de réussite, etc.).

Les étudiants indiens diplômés niveau master qui souhaitent compléter leur formation par une première expérience professionnelle en France peuvent bénéficier, dans la perspective de leur retour en Inde, d'une autorisation de séjour en France valable un an et renouvelable une fois (article 3.2), en application de l’accord par échange de lettres du 18 septembre 2015. Pendant cette durée, ils sont autorisés à exercer un emploi en relation avec leur formation avec une rémunération au moins égale à une fois et demie la rémunération mensuelle minimale en vigueur.

Remarque : dans le régime général du Ceseda, c’est une carte de séjour temporaire « recherche d’emploi ou création d’entreprise » qui est accordée. Elle est valable douze mois mais n’est pas renouvelable.

Enfin, l’accord prévoit la délivrance d’un VLS temporaire (« VLST ») ne nécessitant ni le dépôt d’une demande de titre de séjour, ni une validation (à la différence du VLS-TS) pour les étudiants indiens désireux d’effectuer en France un stage dans le cadre d’études supérieures (article 3.3).

Remarque : ce cas n’est pas prévu par le droit commun, qui regroupe tous les stagiaires dans une même catégorie.

Immigration pour motifs professionnel et économique

L’accord met en place le dispositif « jeunes professionnels », déjà prévu par d’autres accords bilatéraux, en faveur des jeunes âgés de 18 à 35 ans déjà engagés ou entrant dans la vie active et souhaitant améliorer leurs perspectives de carrière grâce à une expérience de travail salarié (article 4.2).

Un contingent de 500 jeunes professionnels par an est prévu, ce contingent pouvant être modifié par échange de lettres. Les jeunes professionnels indiens autorisés à ce titre à séjourner et travailler en France reçoivent un visa de long séjour valant titre de séjour pendant une durée maximale de douze mois. S’ils bénéficient d’une prolongation de leur autorisation de travail, ils recevront à l’expiration de ce visa un titre de séjour portant la mention « travailleur temporaire ».

Le nombre de places prévues annuellement dans le cadre du programme français de Volontaires internationaux en entreprise (VIE) passe de 50 à 250 (article 4.2.3).

La délivrance d’un titre de séjour « passeport talent » est, en outre, facilitée pour les ressortissants indiens titulaires d’un contrat de travail datant d’au moins trois mois avec un employeur établi hors de France et détachés en France dans le cadre d’un détachement entre établissements d’une même entreprise ou entre entreprises d’un même groupe (article 4.3.1).

L’intéressé doit alors justifier, en France, d’une rémunération brute d’au moins 1,5 fois la rémunération minimum légale mensuelle en vigueur (contre 1,8 fois le Smic annuel prévu par le Ceseda dans le cas général).

La mobilité des « salariés indiens des entreprises françaises installées en Inde ou des entreprises indiennes liées par un partenariat à une entreprise française, qui souhaitent venir en France dans une entreprise du même groupe ou dans une entreprise partenaire », est par ailleurs facilitée par la délivrance d’un visa de long séjour de dix-huit mois maximum, sur présentation d’une convention de stage conclue entre les parties concernées (article 4.4).

Remarque : l’accord ne mentionnant ni qu’il s’agit d’un VLS-TS, ni l’obligation de demander une carte de séjour, on peut en déduire que les titulaires d’un tel visa sont dispensés de toute formalité après leur arrivée en France. Par ailleurs, la délivrance d’un visa de 18 mois paraît contraire à l’article 18 de la Convention de Schengen qui limite la durée des visas de long séjour à un an.

L’accord prévoit également de faciliter la délivrance d’un titre de séjour aux chercheurs et doctorants bénéficiant d’un contrat approprié, valable pour la durée des activités de recherche ou d’enseignement dans les conditions prévues par la législation française (article 4.5).

Retour des personnes en situation irrégulière

Enfin, dans son volet consacré à la lutte contre l’immigration irrégulière (article 5), l’accord :

  • rappelle l’engagement des deux pays à accepter le retour de leurs nationaux en situation irrégulière dans l’autre pays ;

  • prévoit les conditions du retour volontaire des ressortissants faisant l’objet d’une mesure d’éloignement ;

  • rappelle les conditions de demande de vérification de nationalité avant la délivrance d’un laissez-passer consulaire ;

  • prévoit le retour immédiat des ressortissants en situation irrégulière dont la nationalité est établie, par la délivrance immédiate d’un laissez-passer consulaire.

Les deux pays admettent par ailleurs que « des délais courts et présentant un caractère utile au regard de la situation juridique du migrant faisant l’objet d’une décision de retour, doivent être observés s’agissant tant de la réponse sur la demande de retour que de la délivrance du laissez-passer consulaire ».

Enfin, l’accord rappelle que la prise en charge des coûts liés au retour doit être assurée par la partie requérante et stipule que toute personne éloignée « peut être de nouveau accueillie sur le territoire qu’elle a quitté s’il est établi, dans un délai n’excédant pas trois ou six mois, que les conditions de son retour n’étaient pas remplies au moment de la sortie de ce territoire ».

Véronique Baudet-Caille, Juriste et auteur en droit social
Vous aimerez aussi

Nos engagements