Exécution du plan de redressement en dépit de la disparition du fonds de commerce

10.02.2022

Gestion d'entreprise

La disparition du fonds de commerce d’une société en cours d’exécution de son plan de redressement ne fait pas nécessairement obstacle à son exécution dès lors que les dividendes sont à jour de paiement et que le plan est respecté.

La Cour de cassation répond à une question inédite dans le cadre d’une affaire atypique. Une pharmacie ayant fait l’objet d’une procédure de sauvegarde a souscrit un prêt pour financer l’acquisition d’un fonds de commerce avant l’ouverture de la procédure collective. Le prêt est garanti par le cautionnement d'une société qui venant aux droits de la banque a déclaré sa créance. Plus tard, le plan de sauvegarde est résolu et la pharmacie est placée en redressement judiciaire. Pendant l’exécution du plan de continuation, une ordonnance exproprie la SCI de l’immeuble donné à bail à la pharmacie. Par la suite l’officine de pharmacie exploitée ferme définitivement tandis qu’un nouveau fonds de commerce est acquis permettant la reprise de l’activité. Pour la cour d'appel, le tribunal ayant arrêté le plan avait connaissance du projet d’expropriation et n’a pas estimé qu’un transfert de l’officine était susceptible de faire obstacle à la bonne exécution du plan.

Dans son pourvoi, la société caution conteste le rejet de sa demande de résolution du plan de redressement en raison de l’arrêt de l’activité de la pharmacie et donc de l’inexécution du plan estimant que les justifications retenues par les juges sont inopérantes. Ce n’est pas l’analyse de la Cour de cassation qui rejette le pourvoi.

Au visa des articles L. 626-27 et L. 631-19 du code de commerce, la Cour de cassation rappelle que le plan de sauvegarde ou de redressement ne peut être résolu qu’en cas de cessation des paiements constatée au cours de l’exécution du plan ou d’inexécution par le débiteur de ses engagements dans les délais fixés par le plan. Ce principe circonscrit strictement les causes de résolution du plan. Par suite, pour la première fois il est jugé que contrairement à ce que postule le moyen, la disparition du fonds de commerce d'un débiteur, qui entraîne la cessation de l'activité de celui-ci, ne fait pas nécessairement obstacle à l'exécution du plan. En l'occurrence, la pharmacie était à jour du paiement des dividendes prévus au plan et celui-ci était scrupuleusement respecté. C'est donc à bon droit que la cour d'appel a rejeté la demande de résolution du plan formée par la société caution sur le fondement de l'article L. 626-27, I, alinéa 2, du code de commerce.

C’est une interprétation favorable à la poursuite du plan de redressement qui est donnée. La poursuite d’activité peut être interrompue sans être remise en cause puisqu’elle est reprise sans que le paiement des dividendes soit perturbé. En outre, cet accident de parcours dans l’exploitation de l’office n’est pas du fait de la société débitrice, il ne peut donc pas constituer une modification substantielle du plan imposant le respect des articles L. 626-26 et R. 626-45, alinéa 3, du code de commerce organisant l’information des créanciers et imposant la mise en place de la procédure de l’article L. 626-26 du code de commerce en sollicitant l’autorisation préalable du tribunal ayant arrêté le plan.

Laurence-Caroline Henry, professeur à l’université de Nice Sophia Antipolis

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