Formalisme du contrat de travail, période d'essai, congés familiaux : ce qui va changer

Formalisme du contrat de travail, période d'essai, congés familiaux : ce qui va changer

30.11.2022

Gestion du personnel

Un projet de loi adopté le 24 novembre en Conseil des ministres vise à intégrer dans le droit français deux directives européennes de 2019. Informations à prévoir dans le contrat de travail, durée maximale de la période d'essai, garanties dans le cadre des congés familiaux, nous récapitulons les modifications qui vont être apportées au code du travail.

Comme nous l'indiquions dans une précédente édition, un projet de loi visant à adapter dans le droit français diverses dispositions du droit de l'Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture a été adopté en Conseil des ministres le 24 novembre dernier. Son examen débutera à l'Assemblée nationale le 13 décembre.

Nous revenons en détail sur les mesures sociales qu'il comporte et les changements rendus obligatoires dans le droit du travail français. 

Formalisme du contrat de travail 

Contexte

La directive 2019/1152 du 20 juin 2019 prévoit désormais à son article 4 une liste de 15 informations (contre 10 avec la directive 91/533/CE du 14 octobre 1991) à fournir au salarié sous 7 ou 30 jours (consulter notre tableau récapitulatif). Cette obligation nécessite de modifier le code du travail. L'étude d'impact explique que le code du travail français n’avait pas été modifié après la publication de la directive 91/533/CEE en ce qui concerne cette obligation, "la déclaration préalable à l’embauche, le bulletin de salaire ainsi que les mentions obligatoires des contrats de travail « atypiques » ayant été identifiés comme prévoyant déjà ces dix informations".

La directive 2019/1152 change la donne en ce qu'elle prévoit de nouvelles informations et un délai de transmission raccourci. "Il est donc nécessaire de modifier le code du travail afin de créer un nouvel article prévoyant l’obligation pour l’employeur de fournir ces informations".

La directive 2019/1152 prévoit que ses dispositions peuvent ne pas trouver à s’appliquer pour les relations de travail pour lesquelles la durée de travail est inférieure ou égale à une moyenne de trois heures par semaine au cours d’une période de référence de quatre semaines consécutives. Dès lors, il convient d'adapter le code du travail pour les salariés recrutés en Cesu dans le cadre d’un CDD ou d’un contrat à temps partiel (en effet, la directive 91/533/CE qui avait été transposée dans le droit français prévoyait des exemptions pour les relations de travail n’excédant pas un mois ou dont la durée de travail hebdomadaire n’excédait pas huit heures).

Ce qui va changer 

Un nouvel article L.1221‑5‑1 du code du travail prévoira que l’employeur doit remettre au salarié un ou plusieurs documents établis par écrit précisant les informations principales relatives à la relation de travail. Le salarié qui n’aura pas reçu ces information pourra saisir le juge compétent afin de les obtenir mais seulement après avoir mis en demeure son employeur de lui communiquer les documents requis ou, le cas échéant, de compléter les documents fournis.

Un décret sera nécessaire pour fixer notamment la liste des informations devant figurer dans le ou les documents précités.

S'agissant des exceptions, l’article L.1271‑5 du code du travail sera modifié afin d'être adapté à la directive dans le sens précité. 

Le projet de loi indique que les salariés dont le contrat de travail est en cours à la date de promulgation de la loi pourront demander à leur employeur de leur fournir ou de compléter les informations prévues par l’article L.1221‑5‑1 du code du travail.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Proposition de CDI aux salariés en contrats précaires

Contexte

La directive 2019/1152 prévoit à son article 12 un dispositif d’information du salarié en contrat de travail précaire (CDD, contrat à temps partiel, contrat de mission...). Le salarié - présent dans l'entreprise depuis au moins six mois - peut demander à son employeur si des postes plus stables sont vacants au sein de l’entreprise. L'employeur doit répondre par écrit sous un délai d’un mois. La directive permet toutefois aux Etats membres d’adapter ce nouveau dispositif : limitation de la fréquence de telles demandes, possibilité de répondre par écrit sous trois mois pour les TPE-PME et particulier employeur tout comme la possibilité de répondre à la seconde demande par oral.

Actuellement, dans le droit français, l'employeur doit porter à la connaissance des salariés titulaires d'un CDD la liste des postes à pourvoir dans l'entreprise par des CDI lorsqu'un tel dispositif d'information existe déjà pour les salariés bénéficiant d'un CDI.

Le dispositif issu de la directive étant plus favorable, le code du travail doit être modifié. Toutefois, le dispositif prévu actuellement par le code du travail en ce qui concerne les salariés en contrat à temps partiel doit être maintenu car plus favorable que le dispositif communautaire, précise l'étude d'impact.

Ce qui va changer

L’article L.1242‑17 du code du travail sera modifié. Après l'adoption de ce projet de loi, l'employeur devra à la demande du salarié titulaire d’un CDD justifiant dans l’entreprise d’une ancienneté continue d’au moins six mois, l’informer des postes en CDI à pourvoir au sein de l’entreprise. Un décret sera nécessaire pour en fixer les modalités d’application. 

Le même dispositif sera appliqué pour les salariés en contrat de mission. 

Durée maximale de la période d'essai 

Contexte

Le code du travail prévoit actuellement une durée maximale de la période d’essai des cadres de huit mois. Cette durée peut être inférieure quand un accord collectif ou le contrat de travail le prévoit ou supérieure à huit mois lorsqu’un accord de branche signé avant le 25 juin 2008 le prévoit. Or, la directive 2019/1152 prévoit à son article 8 une durée maximale de période d’essai de six mois, sauf exceptions très limitatives "lorsque la nature de l’emploi le justifie ou lorsque cela est dans l’intérêt du travailleur".

La France a toutefois fait le choix d’activer la disposition de l’article 14 de la directive 2019/1152 permettant aux Etats membres d’"autoriser les partenaires sociaux à conserver, négocier, conclure et appliquer des conventions collectives, conformément au droit national ou à la pratique nationale, qui, tout en respectant la protection globale des travailleurs, établissent des modalités concernant les conditions de travail des travailleurs qui diffèrent de celles visées aux articles 8 à 13".

Toutefois, précise l'étude d'impact, le code du travail doit néanmoins être adapté afin "de circonscrire le dépassement des six mois de période d’essai des cadres aux seuls huit mois prévus par l’article L.1221-21 du code du travail". 

Ce qui va changer 

Le projet de loi vise à supprimer le second alinéa de l’article L.1221-22 du code du travail qui permet actuellement à des accords de branches conclus avant le 25 juin 2008 de prévoir des durées de périodes d’essai supérieures aux maxima fixées par l’article L.1221-21 du code du travail.

Ces dispositions entreront en vigueur six mois après la promulgation de la loi afin de laisser aux partenaires sociaux le temps de revoir les accords de branche concernés. 

Congé familiaux 

Le contexte

La directive 2010/18 du 8 mars 2010 (abrogée par la directive 2019/1158) permettait aux Etats-membres de subordonner l'octroi d'un congé parental à une ancienneté ne dépassant pas un an. Cette disposition a été reprise par la nouvelle directive 2019/1158 du 20 juin 2019. La CJUE a décidé que cette condition s’entend comme visant une relation de travail continue pendant les 12 mois précédant immédiatement le début du congé parental. En revanche, le fait de refuser un tel congé à un travailleur, ayant l'ancienneté requise mais qui n'était pas dans une relation de travail lors de la naissance ou de l'adoption de son enfant, est contraire à la directive, a estimé la CJUE.

Cette interprétation rend non conforme le régime français du congé parental, indique l'étude d'impact, qui décompte l’ancienneté non à la date de la demande de congé mais à celle de la naissance ou l’adoption de l’enfant. Dès lors, il convient d'adapter le droit français afin de permettre aux parents ne disposant pas d’emploi au moment de la naissance de l’enfant d’être éligibles au congé parental ultérieurement.

La directive prévoit également que les droits acquis ou en cours d'acquisition par le travailleur à la date de début du congé parental, du congé de paternité ou du congé d'aidant sont maintenus jusqu'à la fin du congé. Or, le droit français actuel ne prévoit pas le maintien des congés payés acquis pour le congé de paternité et d’accueil de l’enfant, le congé de présence parentale et le congé parental d’éducation.

Par ailleurs, selon la jurisprudence européenne, l'indemnité de licenciement d'un salarié travaillant à temps partiel dans le cadre d'un congé parental d'éducation doit être calculée sur la rémunération à temps plein et non sur celle résultant du congé parental. La transposition de la directive est l’occasion de mettre le code du travail en conformité avec la jurisprudence européenne s’agissant de cette exception, reconnue par la CJUE et reprise par la Cour de cassation.

Ce qui va changer

Le projet de loi permet aux parents ne disposant pas d’un emploi au moment de la naissance ou de l’adoption de l’enfant de bénéficier d’un congé parental d’éducation (modification de l'article  L.1225‑47 du code du travail). Il prévoit en outre que lorsqu’un salarié à temps plein passe à temps partiel dans le cadre d’un congé parental d’éducation, l’indemnité de licenciement doit être calculée sur la base du temps plein. 

Le projet de loi modifie par ailleurs l'article L.1225-54 du code du travail précisant que cette disposition ne vaut que pour le congé parental à temps plein. "La durée du congé parental d'éducation à temps plein est prise en compte pour moitié pour la détermination des droits que le salarié tient de son l'ancienneté". Il complète également en ce sens l'article L.1225-54 sur le congé parental d'éducation.

Par ailleurs, il élargit le bénéfice du maintien des droits acquis au congé de présence parentale (article L.1225-65 complété).

S’agissant du congé de paternité et d’accueil de l’enfant, le projet de loi introduit un nouvel article L.1225‑35‑2 qui assimile ce congé à une période de travail effectif pour la détermination des droits liés à l’ancienneté. 

► Le code du travail et le code de l'action sociale et des familles seront également modifiés afin de permettre l'extension du congé de proche aidant et du congé de solidarité familiale aux salariés du particulier employeur. 

Florence Mehrez
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