Les principales nouveautés fiscales pour les entreprises

Les principales nouveautés fiscales pour les entreprises

06.01.2020

Gestion d'entreprise

Changements en matière de TVA, suppression de petites taxes, nouvelle trajectoire d'IS, évolution de la domiciliation fiscale de certains dirigeants, nouveaux seuils pour les organismes non lucratifs, taxe sur les CDD d'usage.. Voici une sélection de mesures de la loi de finances pour 2020.

La loi de finances pour 2020 a été promulguée au journal officiel. Elle comporte 280 articles. En voici une sélection.

Article 2 : évolution du barème de l’impôt sur le revenu

Les limites et taux des tranches de l'IR dû au titre de l’année 2019 s’élèvent à :

- 14 % pour la fraction supérieure à 10 064 € et inférieure ou égale à 27 794 € ;

- 30 % pour la fraction supérieure à 27 794 € et inférieure ou égale à 74 517 € ;

- 41 % pour la fraction supérieure à 74 517 € et inférieure ou égale à 157 806  € ;

- 45 % pour la fraction supérieure à 157 806 €.

A compter de l’imposition des revenus perçus ou réalisés en 2020, les limites et taux de l’IR s’élèvent à :

- 11 % pour la fraction supérieure à 10 064 € et inférieure ou égale à 25 659 € ;

- 30 % pour la fraction supérieure à 25 659 € et inférieure ou égale à 73 369 € ;

- 41 % pour la fraction supérieure à 73 369 € et inférieure ou égale à 157 806  € ;

- 45 % pour la fraction supérieure à 157 806 €.

Article 13 : domiciliation fiscale en France des dirigeants des moyennes et grandes entreprises françaises

Les dirigeants, de toutes nationalités, des entreprises dont le siège social est situé en France et dont le chiffre d’affaires est supérieur à 250 millions d’euros sont, en principe, considérés comme exerçant leur activité professionnelle principale — et donc leur domicile fiscal — en France. De ce fait, l’ensemble de leurs revenus, de source française comme étrangère, est assujetti à l’impôt sur le revenu (notion dite d’obligation fiscale illimitée). Pour les entreprises qui contrôlent d’autres entreprises dans les conditions définies à l’article L. 233-16 du code de commerce, le chiffre d’affaires s’entend de la somme de leur chiffre d’affaires et de celui des entreprises qu’elles contrôlent.

Application : revenus perçus à compter du 1er janvier 2019

Article 18 : hausse de la taxe sur les bureaux franciliens

Dans certaines zones d’Île-de-France, la taxe sur les bureaux va augmenter de 20 % en 2020 (voir l'article). Cela concerne les villes situées dans la nouvelle 1ère circonscription, c’est-à-dire sur les 1er, 2e, 7e, 8e, 9e, 10e, 15e, 16e et 17e arrondissements de Paris, ainsi que sur les communes de Boulogne-Billancourt, Courbevoie, Issy-les-Moulineaux, Levallois-Perret, Neuilly-Sur-Seine et Puteaux. Les tarifs 2020 de la taxe francilienne sur les bureaux s’élèvent ainsi par mètre carré :

Pour la 1ère circonscription : 23,18 € (tarif réduit : 11,51 €) ;
Pour la 2nde circonscription : 19,31 € (tarif réduit : 9,59 €) ;
Pour la 3ème circonscription : 10,55 € (tarif réduit : 6,34 €) ;
Pour la 4ème circonscription : 5,08 € (tarif réduit : 4,59 €)

Application : tarifs 2020

Article 21 : suppression de taxes à faible rendement

Taxe sur les actes des huissiers de justice (article 302 bis Y du code général des impôts), cotisation de solidarité sur les céréales (article 564 quinquies du CGI), droits d’enregistrement de certains actes et opérations (certains certificats de propriété, inventaires de meubles, etc.), taxes sur les véhicules à moteur (articles 1010 bis, 1010 ter, 1011 ter du cgi), taxe sur les déclarations et notifications des produits du vapotage (article 3513-12 du code de la santé publique), taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux (article L245-5-5-1 du code de la sécurité sociale)… Ce sont quelques-unes des petites taxes qui sont supprimées.

Application : variable selon la taxe

Article 34 : transposition de la directive TVA

Cet article transpose la directive 2018/1910 du Conseil du 4 décembre 2018 relative à l’harmonisation et la simplification de certaines règles dans le système de taxe sur la valeur ajoutée pour la taxation des échanges de biens entre les États membres de l’Union européenne. Premièrement, il crée un régime de stocks sous contrat de dépôt (article 256 du CGI). Deuxièmement, il clarifie, en cas de livraisons successives de biens, la question de l’imputation de l’exonération prévue pour les livraisons intracommunautaires (article 262 ter du CGI). Troisièmement, la communication au fournisseur, par l’acquéreur, de son numéro d’identification à la TVA, devient une condition de fond, c’est-à-dire impérative, aux fins de bénéficier de l’exonération associée aux livraisons intracommunautaires (article 262 ter du CGI). Le dépôt d’un état récapitulatif par le fournisseur devient également une condition de fond de ce régime.

Application : 1er janvier 2020

Article 39 : nouvelle trajectoire de baisse du taux normal de l’impôt sur les sociétés de certaines entreprises

Cet article modifie, de façon ponctuelle et ciblée, la trajectoire de baisse du taux d’IS pour les exercices ouverts en 2020 et 2021. Cela concerne les entreprises réalisant un chiffre d’affaires d’au moins 250 millions d’euros. L’article prévoit ainsi que, pour ces entreprises, le taux normal sera :

– au titre des exercices ouverts en 2020, de 31 % au lieu de 28 %, ce dernier taux demeurant néanmoins applicable à la fraction de bénéfice n’excédant pas 500 000 euros ;

– au titre des exercices ouverts en 2021, de 27,5 % au lieu de 26,5 %.

Nous récapitulons dans le tableau suivant le taux normal d’IS en vigueur à partir de 2018.

Taux normal de l'impôt sur les sociétés
Catégorie d'entreprises Exercice 2018 Exercice 2019 (*) Exercice 2020 (*) Exercice 2021 Exercice 2022 Exercice 2023
Chiffre d'affaires inférieur à 250 millions d'euros 33 1/3 % 31 % 28 % 26,5 % 25 % 25 %
Chiffre d'affaires supérieur ou égal à 250 millions d'euros 33 1/3 % 33 1/3 % 31 % 27,5 % 25 % 25 %

 

(*) Pour les exercices ouverts en 2019 et, s’agissant des entreprises dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 250 millions d’euros, pour les exercices ouverts en 2020, la fraction de bénéfice inférieure ou égale à 500 000 euros est imposée au taux de 28 %.

Article 42 : évolution des retenues et prélèvements à la source applicables aux sociétés non résidentes

L’imposition des revenus versés par une personne en France à des bénéficiaires non résidents fait en principe, en fonction de la nature des sommes concernées, l’objet de retenues et prélèvements à la source destinés à garantir le bon recouvrement de l’impôt sur des flux dirigés vers l’étranger. Certains de ces dispositifs ont récemment été jugés incompatibles avec le droit de l’Union européenne, ce qui explique leur évolution dans cette loi de finances. Cela concerne notamment les sociétés étrangères déficitaires. Elles peuvent désormais solliciter la restitution — temporaire — de la retenue ou du prélèvement à la source acquitté. Cette restitution est assortie d’une imposition en report.

Application : Exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020

Article 45 : transposition de la directive contre les dispositifs hybrides

La notion de dispositifs hybrides désigne les mécanismes exploitant les différences de qualification d’instruments ou d’entités entre les législations de plusieurs États afin de générer des asymétries fiscales se traduisant par une double non-imposition. Il peut s’agir par exemple d’un instrument financier qui donne lieu à la déduction d’une charge dans la juridiction du débiteur mais dont le revenu n’est pas inclus dans la juridiction du bénéficiaire. La loi de finances pour 2020 transpose la directive (UE) 2017/952 du 29 mai 2017, dite Atad 2, chargée de lutter contre de tels dispositifs — la directive (UE) 2011/64 du 11 juillet 2016, dite Atad 1, comporte une série de dispositifs renforçant l’arsenal juridique contre les pratiques d’évasion fiscale — par un mécanisme de neutralisation fiscale. Sont concernées les asymétries fiscales qui concernent des entités d’un même groupe. Les modalités selon lesquelles les asymétries fiscales sont neutralisées dépendent de la nature du dispositif hybride.

Application : exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020 (sauf exception)

Article 46 : prorogation du soutien fiscal aux jeunes entreprises innovantes

Les entreprises qui ont le statut de jeune entreprise innovante (JEI) bénéficient d’exonérations fiscales et sociales. Contrairement aux secondes, les premières sont bornées dans le temps. Ainsi, avant la loi de finances pour 2020, seules les JEI créées jusqu’au 31 décembre 2019 pouvaient bénéficier des exonérations fiscales — en plus des exonérations sociales. La loi de finances pour 2020 proroge ce dispositif pour une durée de 3 ans, c’est à dire aux entreprises créées jusqu’au 31 décembre 2022. A noter que ce texte modifie aussi la condition d’éligibilité relative à la part des dépenses de R&D dans le total des charges déductibles du résultat.

Application : 1er janvier 2020 (pour la prorogation des exonérations fiscales) et exercices clos à compter du 31 décembre 1999 (pour la modification de la condition d’éligibilité)

Article 51 : relèvement des seuils d’IS et de TVA pour les organismes non lucratifs

Le plafond des activités lucratives permettant aux organismes non lucratifs de ne pas être passibles de l'impôt sur les sociétés est relevé de 63 059 euros à 72 000 euros. Il en est de même pour celui relatif à la TVA. Les organismes concernés sont définis au 1 bis de l'article 206 du code général des impôts. Ils comprennent les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les associations régies par la loi locale maintenue en vigueur dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, les syndicats régis par les articles L. 2131-1 à L. 2136-2 du code du travail, les fondations reconnues d'utilité publique, les fondations d'entreprise, les fonds de dotation et les congrégations.

Application : 1) IS : exercices clos à compter du 31 décembre 2019 ; 2) TVA : 1er janvier 2020

Article 55 : neutralisation du changement de régime d’imposition des bénéfices pour les BNC

A compter de l’imposition des revenus de l’année 2020, les titulaires de bénéfices non commerciaux (BNC) qui passent du régime réel (avec la règle des créances acquises) au régime micro-fiscal, et inversement, se voient appliquer une sorte de neutralité fiscale. Ainsi, l’année d’entrée dans le régime de la déclaration contrôlée (avec option pour la règle des créances acquises) le bénéfice imposable "est augmenté des créances détenues par le contribuable au 31 décembre de l’année qui précède celle au titre de laquelle l’option est exercée pour leur montant hors taxes sous déduction d’un abattement de 34 %". Inversement, l’année d’entrée dans le régime micro-fiscal, "les recettes sont diminuées, avant application de l’abattement [de 34 %], du montant hors taxes des créances détenues par le contribuable au 31 décembre de la dernière année imposée selon les modalités prévues à l’article 93 A". Un mécanisme similaire est prévu pour les contribuables qui passent du régime des bénéfices des exploitations agricoles à celui des bénéfices des micro-exploitations agricoles.

Application : à compter de l’imposition des revenus 2020

Article 130 : baisse du forfait de fonctionnement du CIR

Le forfait de fonctionnement, relatif au crédit d'impôt recherche (CIR), adossé aux dépenses de personnel (hors "jeunes docteurs") est ramené de 50 % à 43 % — les autres forfaits de fonctionnement demeurant inchangés. Le seuil d’assujettissement à l’obligation documentaire complémentaire est rétabli à 100 millions d’euros.

Application : dépenses exposées à compter du 1er janvier 2020

Article 145 : création d'une taxe sur les CDD d'usage

Une taxe de 10 euros est mise à la charge des employeurs pour tout contrat à durée déterminée dit d'usage (contrat conclu en application du 3° de l’article L. 1242-2 du code du travail). Certains CDDU ne sont pas concernés. C'est notamment le cas de ceux conclus avec les intermittents du spectacle.

Application : CDD d'usage conclus à compter du 30 décembre 2019

Article 149 : publication du nom des plateformes non coopératives

Il est créé une procédure permettant la publication sur internet du nom des plateformes en ligne qui ont manqué à leurs obligations de coopération avec l’administration fiscale. Ce dispositif de "name and shame" nécessite deux manquements préalables parmi une liste pré-établie. Toutefois, la publication est retirée lorsque la plateforme a acquitté l’intégralité des impositions ou amendes ayant motivé cette publication.

Application : nous faisons l'hypothèse que cet article sera applicable une fois publié le décret en conseil d'Etat qui doit en préciser les conditions d'application

Article 153 : préparation de la généralisation de la facturation électronique

Cette loi de finances prévoit d'étendre la facturation électronique aux relations entre asssujettis à la TVA entre le 1er janvier 2023 et le 1er janvier 2025. Toutefois, les modalités de ce dispositif ne sont pas encore fixées (lire notre article).

Application : entre le 1er janvier 2023 et le 1er janvier 2025 ; remise d'un rapport avant le 1er septembre 2020 sur les conditions de mise en oeuvre

Article 154 : surveillance des internautes à des fins fiscales

Cet article autorise, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, la direction générale des finances publiques (DGFIP) et la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) à collecter en masse des données personnelles publiques rendues librement accessibles par les utilisateurs de certaines plateformes en ligne. L'objectif est de lutter contre la fraude fiscale et douanière.

Application : nous faisons l'hypothèse que cet article sera applicable une fois publié le décret en conseil d'Etat qui doit en préciser les conditions d'application.

Article 175 : extension du périmètre ouvert aux aviseurs fiscaux

Depuis 2017, l'administration fiscale a la possibilité d'indemniser les personnes qui portent à sa connaissance des manquements en matière de fiscalité internationale. La loi de finances pour 2020 étend les sujets couverts à la TVA. Il étend aussi, à titre expérimental pour une durée de 2 ans, le dispositif aux autres manquements dès lors que les droits estimés éludés sont supérieurs à 100 000 euros.

Application : 1er janvier 2020
Ludovic Arbelet

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