Pluie d'annonces dans le domaine de la finance durable

03.11.2020

Environnement

Rapport ACPR-AMF sur les politiques charbon des institutions financières, création d'un Observatoire de la finance durable, lancement d'une plateforme en ligne sur les meilleures pratiques de reporting climat, nouvelle OAT verte... Les annonces ont été légion fin octobre dans le contexte de l'édition 2020 du Climate Finance Day.

Le 29 octobre dernier, s'est déroulée la 20e édition du Climate Finance Day. L'occasion pour de nombreux acteurs de la sphère financière de faire des annonces sur leurs avancées en matière de finance durable.
Un premier rapport ACPR/AMF sur les politiques charbon des acteurs de la Place de Paris
Sur la base d'informations publiques et de questionnaires envoyés aux principaux acteurs de la Place financière de Paris, complétés par des échanges bilatéraux, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et l’Autorité des marchés financiers (AMF) ont rédigé un rapport de suivi et d'évaluation des politiques "charbon" des acteurs de la Place.
Analyses et évaluations de 9 banques, 17 assureurs et 20 sociétés de gestion
Le rapport contient :
- une analyse qualitative des politiques en vigueur et publiées au 31 juillet 2020,
- une évaluation de l’exposition des banques, assureurs et fonds français au charbon thermique au 31 décembre 2019 ;
- une étude ligne à ligne de certaines expositions des plus gros gérants afin de vérifier la mise en œuvre des politiques et de comprendre les raisons expliquant la présence d’émetteurs liés au charbon thermique en portefeuille ;
- une analyse des stratégies de sortie et de désengagement du charbon thermique, au regard des informations fournies par les acteurs de l’échantillon.

Les 9 groupes bancaires et les 17 assureurs analysés disposent tous d’une politique consacrée au charbon. Parmi eux, 6 banques et 11 compagnies d’assurance ont affiché des dates de sortie du charbon.

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

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Concernant la politique d'engagement du secteur bancaire, les auteurs du rapport relèvent que la mise en place de cette politique charbon est systématiquement validée à haut niveau, généralement par le conseil d'administration, ou à défaut par la direction générale. Une gouvernance plutôt partagée par les assureurs analysés.

S’agissant des 20 principales sociétés de gestion françaises en termes d'encours analysées, 16 disposent d’une politique charbon et un seul acteur ne souhaite pas se doter d’une telle politique en raison de son portefeuille d’activités. En revanche, seulement 3 des ces SGP se sont engagées à ce jour sur une date de sortie définitive du charbon thermique.

Si le rapport atteste d'une prise de conscience de la responsabilité du secteur financier dans la lutte contre le changement climatique, il n'en reste pas moins que certains aspects des stratégies doivent être plus systématiquement précisés -en particulier l’horizon temporel de sortie du charbon- et que les efforts pour le suivi des expositions doivent être renforcés.

Des autorités qui réclament plus de transparence et de précision

Au vu de leurs analyses, l’ACPR et l’AMF ont formulé des préconisations à l'intention de ces différents acteurs, notamment relatives à  :

- la formulation des politiques charbon avec notamment l’adoption d’une date de sortie ;
- la justification des critères et seuils retenus dans ces politiques et, le cas échéant, la prise en compte de critères additionnels dans les politiques permettant d’atteindre l’objectif de sortie ;
- la transparence des politiques, en particulier en explicitant les exemptions appliquées dans certains cas ;
- la prise en compte des entreprises en transition et/ou affichant une intention ou un engagement de sortie du charbon ;
- l'amélioration du suivi individuel des expositions et la poursuite des efforts menés sur l'harmonisation des méthodologies ;
- les données utilisées pour la mise en œuvre des politiques et leur suivi.

En attendant un rapport plus complet fin décembre
Un rapport commun AMF-ACPR sera publié en décembre 2020 et sera plus globalement consacré au suivi et à l'évaluation des engagements pris par les acteurs de la Place en matière de climat. Pour ces deux autorités, ce rapport sera "également l’occasion de préconisations visant à crédibiliser les engagements individuels des acteurs et à en améliorer le suivi, ainsi qu’à développer les outils et le cadre réglementaire en faveur de la finance durable".
Des acteurs financiers et des entreprises priés d'avancer sur divers chantiers

A l'occasion du Climate Finance Day, Bruno Le Maire a demandé à la Place de renforcer son engagement, sur la base de critères communs de désengagement financier devant notamment comprendre :
- l’évaluation des plans de transition et des conditions associées ;
- la couverture de la chaîne de valeur du charbon thermique ;
- un calendrier strictement aligné sur les objectifs d’atténuation ;
- l’exclusion des projets de centrales et de mines.

La Place de Paris est également invitée à développer une stratégie de sortie du financement des activités non-conventionnelles, à l'instar de l’Etat sur ses financements exports (v. notre actualité "Stratégie climat pour les financements export français").

Enfin, les acteurs financiers et les entreprises sont invités à participer à la réflexion collective autour de trois chantiers :
- la standardisation d’indicateurs de performance extra-financière au niveau européen ;
- le développement d’une base de données ESG libre d’accès au niveau européen, afin d’assurer un meilleur accès et une comparabilité renforcée de la donnée ;
- l’établissement d’une règlementation des fournisseurs de données ESG et des produits dérivés de cette donnée, tels que la notation extra-financière.

Une nouvelle OAT verte en 2021

La France créera en 2021 un 2e titre de dette adossé à des dépenses favorables à l'environnement.

Précisément, les dépenses de soutien aux énergies électriques renouvelables, jusqu’à présent financées directement par l’impôt dans le cadre d’un compte d’affectation spéciale, seront réintégrées au budget général de l’État à compter du 1er janvier 2021. Elles pourront ainsi être adossées à une OAT verte. Grâce à cet élargissement de l’assiette des dépenses vertes éligibles, il sera techniquement possible de gérer deux obligations vertes de maturités distinctes tout en assurant aux deux titres une liquidité satisfaisante.

Un observatoire dédié à la finance durable et des données en open data
Autre annonce faite lors du Climate Finance Day : la création d'un observatoire dédiée à la finance durable.
En effet, à l'été 2019, les acteurs de la Place financière de Paris (assureurs, banques, sociétés de capital-investissement, sociétés de gestion et sociétés financières spécialisées), représentés par leurs principales fédérations professionnelles, Finance for Tomorrow et Paris EUROPLACE, avaient notamment pris l'engagement de créer un Observatoire pour recenser les réalisations et les engagements des acteurs financiers sur ces enjeux.
Ledit Observatoire est désormais opérationnel et rassemble des données sectorielles de la finance et des engagements individuels des acteurs financiers, sachant que toutes les données du site de l’Observatoire sont en open-data.
Remarque : à noter que la Fédération Française de l'Assurance (FFA) vient de publier dans le même temps les chiffres clés 2019 de l'assurance en matière de finance durable.
Bientôt, la plateforme en ligne "Climate Transparency Hub"

Enfin, précédant de quelques jours le Climate Finance Day, un appel à contribution a été lancé par l'ADEME et le ministère de la transition écologique, en vue de l'installation en janvier 2021 du Climate Transparency Hub (CTH), plateforme en ligne d’identification, de suivi et de valorisation des meilleures pratiques de reporting sur le climat des institutions financières françaises.

Le CTH visera à :

-  centraliser les exercices de reporting climat des institutions financières françaises et les mettre à disposition de la société civile, du monde académique, des autorités de supervision et de régulation mais aussi du grand public afin d’accroître la transparence et l’accessibilité de ces exercices ;
- référencer les meilleures pratiques de reporting climat en vue de les harmoniser, de renforcer leur qualité et leur comparabilité..

Toutes les institutions financières françaises concernées par le dispositif de l’article 173 al. 6 de la loi de transition énergétique (SGP, mutuelles, assurances, organisme de prévoyance et de retraite complémentaire) ainsi que les banques sont invitées à alimenter la plate-forme.

Camille Vinit, Code permanent Environnement et nuisances
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