Rémunération d'un compte courant : intérêts échus en période d'observation

11.10.2017

Gestion d'entreprise

La créance d'intérêts d'un compte courant dont le cours a été arrêté postérieurement au jugement d'ouverture est une créance antérieure soumise à déclaration. En son absence, elle est inopposable au débiteur pendant et après l'exécution du plan.

Une société est mise en redressement judiciaire en 2010. Un de ses associés déclare une créance en principal ainsi que les accessoires correspondant aux intérêts d'un compte courant bloqué afférents aux années 2009 et 2010. Cette créance est admise au passif. Au cours de la période d'observation, le 12 mars 2012, l'assemblée générale de la société adopte une résolution entérinant la rémunération du compte courant de l’associé au taux légal pour l'exercice 2011. Et, par un jugement du 17 avril 2012, le tribunal de commerce arrête le plan de redressement de la société en décidant que la créance de l’associé serait apurée à concurrence de 25 % dans les trois mois suivant l'homologation du plan, les 75 % restants étant abandonnés. Après avoir reçu le paiement du dividende prévu par le plan, l’associé assigne la société en paiement des intérêts de sa créance en compte courant relatifs à l'année 2011, tels que calculés dans la résolution du 12 mars 2012.

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La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Le tribunal de commerce annule cette résolution et rejette l'ensemble des demandes de l’associé. Mais, la cour d’appel infirme le jugement et condamne la société à payer les intérêts en litige. En cassation, l’arrêt d’appel est censuré.

Qu’il s’agisse de la décision d’appel ou de cassation, il est acquis que la dérogation à la règle de l'arrêt du cours des intérêts prévue par l'article L. 622-28 du code de commerce avait, en principe, vocation à s'appliquer à la mise à disposition de fonds dans le cadre d'un compte courant puisqu’il était spécifié que le remboursement desdits fonds était différé dans un délai supérieur à un an. En l’occurrence, l’apport en compte courant était bloqué pour une durée de sept ans.

Demeurait, cependant, une divergence quant au traitement de cette créance des intérêts échus au cours de la période l’observation. Pour les juges d’appel qui constataient que l’associé avait bien reçu le paiement du dividende prévu au plan de redressement, ce règlement n'avait eu pour effet que d'éteindre la créance soumise au plan, et non la créance résultant des intérêts échus au cours de la période d'observation, laquelle restait due.

Pour la Cour de cassation, la nature de cette créance d’intérêts commandait une solution opposée. La juridiction suprême précise, en effet, que cette créance d’intérêts était relative à une créance en compte courant antérieure au jugement d'ouverture, de sorte qu'elle avait elle-même, par voie d'accessoire, la nature de créance antérieure. Il importait peu qu'il s'agisse d'intérêts dont le cours n'avait pas été arrêté postérieurement au jugement d'ouverture. La Cour de cassation en déduit logiquement qu’en raison de sa nature de « créance antérieure », ladite créance est soumise à déclaration. Son règlement se heurtait donc à la règle de l'interdiction des paiements.

L’arrêt retient que les juges d’appel ont relevé que la créance invoquée correspondait aux intérêts échus en 2011 et que la créance déclarée par l’associé et admise au passif n'incluait que le principal et les intérêts afférents aux années 2009 et 2010. Par conséquent, la créance d'intérêts litigieuse n'avait pas été admise au passif.

Il est rappelé, ensuite, que la société avait exécuté ses engagements prévus par le plan à l'égard de l’associé alors que les intérêts dont le cours n'est pas arrêté relatifs à une créance antérieure au jugement d'ouverture sont soumis à l'obligation de déclaration. En outre, les créances non déclarées régulièrement sont inopposables au débiteur pendant l'exécution du plan et après cette exécution lorsque les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal ont été tenus. La cour d’appel a donc violé les articles L. 622-26, alinéa 2, L. 626-10, alinéa premier, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008, et R. 622-23, 2° du code de commerce.

Martine Dizel, Maître de conférences, université Toulouse I
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