La procédure de recours contre certaines décisions de l'Autorité de la concurrence est modifiée

09.05.2017

Gestion d'entreprise

Le premier président de la cour d'appel de Paris peut désormais ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la décision du rapporteur général de l'ADLC qui refuse la protection du secret des affaires ou qui lève la protection accordée, si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Le décret paru au Journal Officiel du 7 mai 2017 réorganise les recours exercés, d'une part, devant la cour d’appel de Paris contre les décisions de l’Autorité de la concurrence (ADLC) et, d'autre part, devant le premier président de la cour d’appel de Paris contre certaines décisions du rapporteur général de l’Autorité de la concurrence.

Rationalisation du contentieux relatif aux recours contre les décisions de l’ADLC

Le texte réorganise, dans un ordre chronologique, les dispositions relatives aux recours prévus à l’article L. 464-8 du code de commerce contre les décisions de l’ADLC. Il s'agit notamment des recours contre les décisions sur le fond en matière d'ententes et d'abus de position, pour lesquelles on distingue entre recours principal et recours incident.

Remarque : le recours principal est le seul visé expressément par l'article L. 464-8. Actuellement, en vertu de ce texte, les décisions de l'Autorité peuvent, dans le délai d'un mois à compter de leur notification, faire l'objet d'un recours en annulation ou en réformation devant la cour d'appel de Paris.

Le décret du 5 mai procède principalement aux modifications suivantes :

- la responsabilité des notifications des déclarations de recours, des observations écrites et des pièces est transférée aux parties, dont l’Autorité de la concurrence, ainsi qu’au ministre chargé de l���économie lorsqu’il n’est pas partie à l’instance (C. com., art. R. 464-13 et s.) ;

- le délai imparti au demandeur au recours pour déposer au greffe la liste des pièces justificatives qu’il entend produire et les notifier aux personnes intéressées est porté à 2 mois, en harmonisation avec le délai qui lui est imparti pour déposer au greffe ses observations écrites (C. com., art. R. 464-15) ;

- les délais pour former un recours incident et intervenir volontairement à l’instance passent à 2 mois. Ils courent à compter de la notification de la liste des pièces justificatives que le demandeur au recours entend produire (C. com., art. R. 464-16) ;

- en cas de non-respect des diligences imposées aux parties, le recours incident est caduc (et non plus irrecevable) (C. com., art. R. 464-16).

Entrée en vigueur

Ces nouvelles dispositions seront applicables aux recours et demandes de sursis à exécution introduits à compter du 1er septembre 2017.

Dispositions relatives au recours ouvert devant le premier président de la cour d’appel de Paris à l’encontre des décisions du rapporteur général de l’ADLC

Il s'agit ici des dispositions d'application de la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle (L. n° 2016-1547, 18 nov. 2016) concernant les décisions du rapporteur de l'ADLC qui refusent la protection du secret des affaires ou qui lèvent la protection accordée.

Remarque : rappelons que le droit des parties de prendre connaissance des pièces remises à l'Autorité n'est pas un droit absolu et illimité, mais doit être mis en balance avec le droit des entreprises à la protection du secret de leurs affaires. En effet, ni le droit à un recours effectif, ni le principe de la contradiction n'impliquent que la partie saisissante, lorsqu'elle n'a pas de droits de la défense à préserver dans le cadre de la procédure ouverte par l'Autorité sur sa saisine, puisse obtenir la communication de documents couverts par le secret des affaires concernant la personne qu'elle a mise en cause. Pour les mêmes motifs, la partie saisissante ne saurait contester la décision de protection du secret des affaires. Il en est d'autant plus ainsi que la procédure devant l'ADLC n'a pas pour objet la défense d'intérêts privés.

Compte tenu de l’effet irrémédiable des décisions levant la protection du secret des affaires et de la nécessité de préserver l’effectivité du recours :

- le premier président de la cour d'appel de Paris (ou son délégué) se voit accorder la faculté de prononcer un sursis à l’exécution de la décision du rapporteur général si l’auteur d’un recours démontre que celle-ci est susceptible d’entraîner des conséquences manifestement irréversibles (C. com., art. R. 464-24-4) ;

- sont parties à l’instance devant le premier président de la cour d'appel de Paris, l’auteur du recours et le rapporteur général de l’ADLC ainsi que, le cas échéant, la partie mise en cause ayant demandé l’accès à la version confidentielle d’une pièce qu’elle estime nécessaire à l’exercice de ses droits (C. com., art. R. 464-24-3).

Entrée en vigueur

Ces dispositions sont applicables depuis le 8 mai 2017.

Dispositions communes aux différentes demandes devant la cour d’appel de Paris et son premier président

Le décret fait obligation aux parties comparantes qui présentent leurs prétentions par écrit et qui sont assistées ou représentées par un avocat, de structurer leur écritures et de récapituler dans leurs dernières écritures leurs prétentions et moyens (C. com., art. R. 464-25-1) :

- elles doivent formuler expressément leurs prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation ;

- un bordereau énumérant les pièces justifiant ces prétentions doit être annexé à leurs observations écrites ;

- ces observations comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions ;

- les moyens qui n’auraient pas été formulés dans les écritures précédentes doivent être présentés de manière formellement distincte ;

- la cour d’appel ou son premier président ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion ;

- les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs observations écrites antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour d’appel ou son premier président ne statue que sur les dernières écritures déposées.

Entrée en vigueur

Ces dispositions sont applicables depuis le 8 mai 2017.

 

Stefano Danna, Dictionnaire Permanent Droit des affaires

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