Mariage d'un majeur sous curatelle : absence d'autorisation vs absence de consentement

16.05.2017

Droit public

Si l'absence d'autorisation du curateur au mariage de la personne protégée peut être régularisée par l'approbation du curateur lui-même, le défaut de consentement de l'époux est en revanche un motif de nullité absolue.

Dans une décision du 20 avril 2017 qui sera publiée, la première chambre civile de la Cour de cassation rappelle la distinction à opérer entre l’absence d’autorisation préalable du curateur au mariage du majeur en curatelle et ses conséquences, et le défaut de consentement de l’époux lui-même au mariage.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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En l'espèce, un ressortissant français sous curatelle se marie avec une ressortissante algérienne en Algérie, sans avoir obtenu de l’officier de l’état civil consulaire français à Alger le certificat de capacité à mariage. Le procureur de la République forme opposition au mariage, conformément à l'article 171-4 du code civil, après avoir été informé, avant la célébration du mariage, de l’existence d'indices sérieux laissant présumer le défaut de consentement du majeur sous curatelle.

Ce dernier, assisté de sa curatrice, demande la mainlevée de cette opposition. Ils obtiennent gain de cause en première instance. Le tribunal de grande instance (TGI) a en effet ordonné la mainlevée de l’opposition au motif que la nouvelle curatrice - sœur du majeur protégé - désignée après le mariage entend autoriser le mariage de son frère et s’associe à la demande de mainlevée de l’opposition, et qu’il n’est fait état d’aucun élément de nature à remettre en cause la volonté matrimoniale du majeur protégé.

La cour d’appel annule cette décision, confirme l’opposition à mariage et refuse la transcription du mariage sur les registres de l’état civil français. Décision confirmée par la première chambre civile de la Cour de cassation.

L’absence d’autorisation du curateur…

L’article 460 du code civil prévoit que le mariage d'une personne en curatelle n'est permis qu'avec l'autorisation du curateur ou, à défaut, celle du juge. Selon la haute juridiction, l’absence d’autorisation préalable du curateur au mariage ne correspond pas à un défaut de consentement, au sens de l’article 146 du code civil, mais à un défaut d’autorisation, au sens de l’article 182 du même code, selon lequel « le mariage contracté sans le consentement des père et mère, des ascendants, ou du conseil de famille, dans les cas où ce consentement était nécessaire, ne peut être attaqué que par ceux dont le consentement était requis, ou par celui des deux époux qui avait besoin de ce consentement ». Ce défaut d’autorisation est sanctionné par la nullité relative. Il peut être couvert, c’est-à-dire régularisé, par l’approbation du curateur.

… n’est pas un défaut de consentement

En revanche, le défaut de consentement de l’époux lui-même est un motif de nullité absolue. Il permet au ministère public d’exercer une action en annulation du mariage, sur le fondement de l’article 146 du code civil. Il permet aussi à l'autorité diplomatique ou consulaire, par la voie de l’opposition prévue à l’article 171-4, de saisir sans délai le procureur de la République lorsque la célébration est envisagée à l’étranger et que des indices sérieux laissent présumer une cause d’annulation.

L’absence de consentement du majeur protégé est établie

En l’espèce, le majeur sous curatelle, qui bénéficiait d’une mesure de protection depuis plusieurs années, avait décidé de se marier trois mois après avoir rencontré sa future compagne et à l’insu de sa famille. La cour d’appel a souverainement estimé qu’il résultait de l’audition de l’intéressé par les services consulaires et des pièces produites qu’il souffrait d’une altération de ses facultés mentales (schizophrénie) qui lui interdisait de comprendre la portée de son engagement, répondant selon lui à une simple envie de combler rapidement un vide dans son existence, et d’exprimer un consentement valable. Les juges du fond ont légalement justifié leur décision en rejetant la demande de mainlevée de l’opposition à mariage.

Véronique Baudet Caille, docteur en droit
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