Où sont les métiers verts et verdissants qui pourraient créer 1 million d'"emplois-climat" ?

Où sont les métiers verts et verdissants qui pourraient créer 1 million d'"emplois-climat" ?

19.01.2017

Environnement

Une politique climato-compatible pourrait générer une création nette d’un million d’emplois si l’on en croit un rapport – militant – qui vient d’être publié. Parmi les conditions de réussite : accompagner les territoires et les secteurs qui en ont besoin.

D’un côté, on dénonce les risques de destructions massives d’emplois dans la filière nucléaire ou dans les secteurs gourmands en énergies fossiles. De l’autre, on souligne les opportunités offertes par la croissance verte. En matière de chiffrage, les conservateurs et les partisans d’une transition énergétique radicale choisissent le rapport de force permanent. Et à ce petit jeu, la "plateforme emplois-climat" frappe fort. En s’appuyant sur les projections de Philippe Quirion qui porte entre autres casquettes celle de directeur de recherche au CNRS, ce collectif regroupant associations sociales et environnementales et syndicats (1) publie une étude dans laquelle il annonce un millions d’emplois… dès 2020. Il n’échappera à personne que ce chiffre correspond à celui affiché par le Medef en 2014 pour inciter le gouvernement à ne pas reculer sur le CICE. Et là aussi, il s’agit bien d’un message subliminal adressé aux candidats aux prochaines élections pour qu’ils mettent les bouchées doubles en matière de sobriété, d’efficacité énergétique et de renouvelables. Pas question donc de prendre les conclusions de ce rapport au pied de la lettre. Il n’empêche. Il énonce un nombre d’évolutions inéluctables que le monde de l’entreprise doit intégrer.

Amortir la chute

Selon l’Ademe, 320 000 personnes travaillent aujourd’hui dans des métiers directement liés à la mise en œuvre de la transition énergétique. Néanmoins, l’étude ne se voile pas la face : "certains secteurs vont perdre des emplois". Les raffineries et les centrales à charbon devront notamment fermer. Ou se transformer en produisant des agrocarburants pour les premières et en brûlant de la biomasse pour les secondes. Même chose pour "l’industrie manufacturière qui alimente notre surconsommation" et qui devra réduire la voilure ou innover, par exemple en se développant dans l’économie de la fonctionnalité. À moins d’évacuer d’un revers de main la question sociale, le passage à une société post-carbone ne se fera pas sans accompagner les salariés des secteurs vulnérables vers d’autres emplois et les entreprises vers des logiques économiques différentes. Ce que prévoit d’ailleurs la loi transition énergétique dont l’article 182 évoque "un plan de programmation de l’emploi et des compétences tenant compte des orientations fixées par la programmation pluriannuelle de l’énergie".

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

Découvrir tous les contenus liés
À chacun son chemin

En regardant au niveau micro, le rapport estime nécessaire que soient redéfinies pour chaque territoire les politiques de formation professionnelles, citant des régions comme l’Île-de-France qui se sont déjà prêtées à l’exercice. Il plaide aussi pour que des projets alternatifs émergent pour réorienter l’activité des bassins d’emplois les plus affectés, par exemple par l’évolution à la hausse des prix du carbone. Là encore, il recommande de s’appuyer sur les projets pionniers comme ceux des zones d’emploi du Havre, de Molsheim ou du bassin de l’étang de Berre. Les ministères du Travail et de l’Environnement se sont efforcés de définir ensemble les atouts de ces territoires, donc leurs opportunités de développement.

Verts et verdissants

D’un point de vue comptable, il faudra compenser la destruction de 446 000 postes. Donc en créer 1 446 000. Cela passera par des métiers verts dans les énergies renouvelables, l’accompagnement des territoires qui veulent avancer l’autonomie ou le recyclage. Cela passera surtout par les métiers dits "verdissants" qui ne sont pas nouveaux mais qui intègrent "de nouvelles briques de compétences pour prendre en compte de façon significative et quantifiable la dimension environnementale dans le geste métier", selon l’expression souvent utilisée par le ministère de l’Écologie comme par Pôle Emploi. Illustration : le couvreur qui devient avec le temps un professionnel de l’isolation thermique ou le moniteur d’auto-école qui se spécialise dans l’écoconduite.

Des pistes

Pour accélérer la donne, la plateforme emplois-climat incite très clairement les décideurs publics à utiliser de toutes les armes à leur disposition : de la "reprise en main du crédit" à la chasse aux "niches fiscales défavorables à la transition énergétique" en passant par la création de 250 000 emplois aidés financés par la contribution climat-énergie. Le rapport propose en outre quelques pistes secteurs par secteur. Rénover 900 000 logements par an créerait en particulier 125 000 emplois dont beaucoup dans les quartiers populaires si l’on arrive à réaliser les travaux en lien avec les quartiers qui ont les plus grands besoins.

 

(1) Le rapport "Un million d’emplois pour le climat" est publié par Alofa Tuvalu, Alternatiba, Amis de la terre, Attac France, Heinrich Böll Stiftung France, Collectif Roosevelt, Confédération paysanne, Emmaüs, Fédération syndicale Unitaire (FSU), Ligue des droits de l’Homme, Mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP), Réseau Action Climat, Union syndicale Solidaires

Olivier Descamps

Nos engagements