Parent d'enfant français : pas de retrait de titre de séjour sans preuve de la fraude

07.10.2016

Droit public

Si aucun élément « précis et concordant » n'établit qu'il n'est pas le père biologique de l'enfant en cause, le fait qu'un ressortissant français ait déjà reconnu neuf enfants de huit mères différentes ne suffit pas à révéler le caractère frauduleux de la reconnaissance.

Dans une décision du 30 septembre 2016, le Conseil d’État rappelle que c’est à l’administration de prouver, sous le contrôle du juge, l’existence d’une fraude justifiant le retrait d’une carte de séjour temporaire attribuée au parent d’un enfant français sur le fondement de l’article L. 313-11, 6° du Ceseda. A cette fin, il doit produire des « éléments précis et concordant ».
 
En l’espèce, le préfet de police avait retiré le titre de séjour délivré à la mère étrangère d’enfants français au motif que « la reconnaissance de paternité établie par le père déclaré des enfants aurait un caractère frauduleux ». A la suite d’un recours en référé suspension formé par la mère, le juge des référés du tribunal administratif avait suspendu l’exécution de la décision du préfet. Le Conseil d’État rejette le pourvoi du ministre de l’intérieur.
 
Dans un premier temps, la Haute juridiction constate que le ressortissant français qui a reconnu les enfants de l’intéressée avait également reconnu neuf autres enfants de huit mères différentes. Circonstance, qui, pour le Conseil d’État, « manifeste que ces mères ont pu, grâce à la reconnaissance de paternité du même ressortissant français, prétendre au droit au séjour que leur donne [l’article L. 313-11, 6°] ».
 
Toutefois, elle relève qu’en l’espèce, pour établir le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité en cause, le préfet de police « s’est borné » à rappeler que « le père déclarant était à l’origine de reconnaissances de paternité sur une courte période pour des enfants de plusieurs mères de nationalité camerounaise ayant sollicité un droit au séjour en leur seule qualité de parent d’enfant français ».
 
Ainsi, faute d’avoir soumis au juge des référés des �� éléments précis et concordants » de nature à établir que ce ressortissant français ne serait pas le père biologique des enfants de la requérante, le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité n’est pas établi.
Remarque : dans une décision du même jour, le Conseil d’État retient une solution proche et rappelle que si, en l’absence de stipulations dans l’accord franco-marocain du 9 octobre 1987, « le préfet peut légalement faire usage du pouvoir général qu’il détient, même en l’absence de texte, pour retirer une décision individuelle créatrice de droits obtenue par fraude », il lui appartient cependant (et non à la requérante « dont la bonne foi se présume ») d’apporter la preuve de la fraude. Il annule ainsi une ordonnance qui relevait l’existence d’un doute sur le caractère frauduleux du mariage que les documents produits par l'épouse ne permettaient pas faire regarder comme sérieux, le juge des référés ayant fait peser la charge de la preuve sur la requérante et non sur l’administration (CE, 30 sept. 2016, n° 400309).

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Véronique Baudet-Caille, Docteur en droit
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