Soins psychiatriques sans consentement : droit à l'avocat devant la commission de suivi médical pour la personne placée en UMD

27.04.2017

Droit public

Le Conseil d'État rejette la requête en annulation du décret du 1er février 2016 réformant le fonctionnement des unités pour malades difficiles (UMD). Cependant, dans un Obiter Dictum, il souligne que les personnes hospitalisées dans ces UMD disposent du droit de se faire assister par un avocat lors des réunions de la commission de suivi médical qui contrôle périodiquement ou sur demande du malade la nécessité du maintien de celui-ci dans l'UMD.

Dans une décision du 17 mars 2017, le Conseil d'État a suivi les conclusions du rapporteur public et rejeté la requête en annulation du décret du 1er février 2016 organisant les UMD, d'une association assez active de vigilance contre les abus de la psychiatrie non consentie, le Cercle de réflexion et de proposition d’actions sur la psychiatrie.
 
La loi du 5 juillet 2011 réformant les soins psychiatriques sans consentement avait créé un régime spécifique pour les malades ayant effectué un séjour en UMD et, par la même occasion, avait introduit des dispositions définissant la fonction de ces unités en précisant notamment leur vocation à recevoir des personnes présentant « pour autrui un danger tel que les soins, la surveillance et les mesures de sûreté nécessaires ne peuvent être mis en œuvre que dans une unité spécifique » (C. santé publ., art. L 3222-3 ancien). Le caractère stigmatisant de cette assimilation de la maladie mentale et du danger causé à autrui, ainsi qu’une décision du Conseil constitutionnel ayant censuré le régime spécifique créé par la loi du 5 juillet 2011 pour les malades ayant séjourné préalablement en UMD, a amené le législateur, par la loi n° 2013-869 du 27 septembre 2013, à supprimer ces dispositions légales (la loi a néanmoins, après son abrogation, été déclaré conforme à la constitution : Cons. const., déc., 14 février 2014, n° 2013-367 QPC). Il invitait ainsi à poser plutôt la définition des missions et de l’organisation des UMD dans la partie réglementaire du code de la santé publique. C’est ce que le pouvoir exécutif avait fait en modifiant, par un décret n° 2016-94 du 1er février 2016, les article R. 3222-1 et suivants du code de la santé publique relatifs à ces UMD.
Compétence du pouvoir réglementaire pour régir le fonctionnement des UMD
Le premier argument de l’association requérante tient à l’incompétence du pouvoir réglementaire pour prendre ce type de texte. Le Conseil d’État y répond en s’appuyant sur la décision QPC du 14 février 2014 dans laquelle les juges constitutionnels avait considéré que le renvoi au décret pour l’organisation de ces unités de haute sécurité n’était pas inconstitutionnel, ce dont il se déduit que le pouvoir réglementaire était bien compétent pour prendre ce décret du 1er février 2016. En effet, ce décret qui réglemente actuellement les UMD, essentiellement organisationnel, « est sans incidence sur le régime applicable aux personnes admises » dans de telles unités « qui reste défini par les dispositions applicables à l'ensemble des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques sans leur consentement sous la forme d'une hospitalisation complète ».
Caractère suffisant des garanties accordées au malade placé en UMD
Le second argument consiste à affirmer que l’admission et le maintien en UMD n’étaient pas accompagnés de garanties procédurales suffisantes, s’agissant notamment de contrôles juridictionnels de nature à protéger les droits des malades. Là aussi, le Conseil d’État écarte l’argument sans hésitation en soulignant que la personne placée en UMD peut, comme tout malade, contester la mesure de soins dont elle fait l’objet devant le juge des libertés et de la détention, toutes les règles traditionnelles de contrôle juridictionnel étant maintenues à son profit. Le Conseil d’État ajoute que ce droit à un recours est également assuré, s’agissant plus spécifiquement de la décision de placement en UMD elle-même, par le rôle affecté à la commission de suivi médical prévue à l’article R 3222-4 du code de la santé publique qui statue en cas de désaccord entre le préfet et le psychiatre responsable de l’UMD quant à la nécessité de l’admission et surtout du contrôle la nécessité du maintien en UMD au moins tous les 6 mois ainsi que, à tout moment, sur demande du malade lui-même.
Instauration d’un droit à l’assistance d’un avocat
Chose tout à fait notable, le Conseil d’État ajoute, pour souligner le caractère suffisamment protecteur des droits du malade d’une telle procédure de contrôle devant la commission de suivi médical, qu’il est loisible au malade, en application de l’article 6 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, de se faire assister par un avocat lorsque siège cette commission.
 
De ce point de vue, sa décision apporte un droit important au profit des personnes hospitalisées en UMD en prévoyant la possibilité (mais pas l’obligation) d’une assistance par un avocat, puisque cette assistance n’était jusqu’ici, en pratique, jamais mise en place ni même envisagée par l’institution soignante lors des réunions de cette commission de suivi médical.
 

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Mathias Couturier, Maître de conférences à l'université de Caen
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