Vers une refonte des cotisations des commissaires aux comptes

Vers une refonte des cotisations des commissaires aux comptes

08.11.2017

Gestion d'entreprise

Le projet de loi de finances pour 2018 prévoit de nouvelles modalités de financement du Haut conseil du commissariat aux comptes (H3C), avec le versement par les professionnels d'une cotisation assise sur le chiffre d’affaires total d'audit et, éventuellement, d'une cotisation supplémentaire en cas de missions auprès d'EIP. Des sanctions sont également prévues.

Un nouveau système de cotisations basé uniquement sur le montant des honoraires d'audit. Voilà ce qui attend les commissaires aux comptes inscrits l'an prochain. Un PDF iconamendement du gouvernement a été adopté en ce sens à l'Assemblée nationale, la semaine dernière, lors de l'examen en séance publique du projet de loi de finances (PLF) pour 2018. Avant le 31 mars de chaque année, tout professionnel français ou ressortissant d'un Etat de l'Union européenne, d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou d'un autre Etat étranger qui admet les nationaux français à exercer l'audit (inscrits sur la liste de l'article L 822-2 I du code de commerce) devrait payer une cotisation de 0,5 % à 0,7 % (taux à fixer par décret) du montant total des honoraires facturés au cours de l’année civile précédente aux personnes ou entités dont il certifie les comptes. Une cotisation supplémentaire est prévue en cas de missions d'audit auprès d'entités d'intérêt public (EIP), avec un taux compris entre 0,2 % et 0,3 % (à déterminer également).

Ce schéma simplifié entrerait en application le 1er janvier 2018 et remplacerait les cinq prélèvements actuels : la contribution annuelle de 10 euros, le droit fixe dû sur chaque rapport de certification qui varie de 20 euros à 1 000 euros selon la nature de la mission, ainsi que la cotisation de 1 % du montant total des honoraires facturés par le Cac à certaines catégories d'entités (sociétés cotées, établissements de crédits…) correspondant grosso modo aux EIP (voir le détail dans le tableau ci-dessous).

Moins de cotisations... en nombre

Difficile de dire si, avec ces deux nouveaux prélèvements, la facture sera plus lourde pour les commissaires aux comptes car les assiettes de cotisations sont différentes et on ne connaît pas encore précisément les taux qui seront retenus. Cependant, cette refonte a pour objectif de "doter [le H3C] d'un budget à la hauteur des missions nouvelles qui lui ont été confiées" par la réforme européenne (lire notre article). "Ce nouveau mode de financement a fait l���objet d’une concertation très approfondie avec la profession, a assuré la garde des Sceaux Nicole Belloubet lors des débats. Le montant de ces cotisations sera bien entendu plafonné, comme toutes les recettes affectées, lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances au Sénat".

Parallèlement, une contribution forfaitaire est prévue pour les Cac inscrits sur la liste des contrôleurs de pays tiers agréés (article L 822-2 II du code de commerce). Elle vise les auditeurs de pays situés en dehors de l'UE ou de l'Espace économique européen qui certifient les comptes d'une entité étrangère mais cotée sur un marché réglementé en France. Au moment de leur demande d'inscription sur cette liste, ces professionnels devraient s'acquitter d'une contribution dont le montant (déterminé par décret) pourrait grimper jusqu'à 5 000 euros. Cela ne concernerait qu'une quarantaine de contrôleurs.

Autre changement : ces futures cotisations et contribution devraient être versées directement au H3C. Aujourd'hui, la cotisation de 1 % sur les honoraires est à la charge de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes qui les verse au Haut conseil. Cependant, la CNCC pourrait jouer encore un rôle puisqu'il est possible que le H3C lui délègue la tâche de liquidation et de recouvrement, par le biais d'une convention homologuée.

Prélèvements dus pour le financement du H3C : ce qui pourrait changer

Système actuel Système proposé par le gouvernement

Contribution de 10 € à la charge du Cac

= à verser à la CNCC qui la reverse au H3C avant le 31 mars de chaque ann��e

Cotisations à la charge du Cac (article L 822-2 I du code de commerce) :

- entre 0,5 % et 0,7 % du montant total des honoraires facturés aux personnes ou entités dont ils certifient les comptes ;

- entre 0,2 % et 0,3 % du montant total des honoraires facturés aux EIP.

= à verser au H3C avant le 31 mars de chaque année

 

 

Droit fixe à la charge du Cac sur chaque rapport de certification :

- 1 000 € pour les missions auprès de personnes ou d'entités admises à la négociation sur un marché réglementé ;

- 500 € pour les missions auprès de personnes ou d'entités dont les titres financiers sont offerts au public sur un système multilatéral de négociation autre qu'un marché réglementé ;

- 20 € pour les autres missions.

= à verser à la CNCC qui la reverse au H3C avant le 31 mars de chaque année

Cotisation à la charge de la CNCC : 1 % du montant total des honoraires facturés au cours de l'année précédente par les Cac auprès de personnes ou d'entités dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou faisant appel à la générosité publique, de certains organismes de sécurité sociale, d'établissements de crédits, de sociétés de financement, d'entreprises régies par le code des assurances, de mutuelles ou d'unions de mutuelles régies par le livre II du code de la mutualité...

= à verser au H3C en 2 fois : 50 % avant le 30 avril et le solde au 30 septembre de chaque année

Contribution forfaitaire de 5 000 € max à la charge des seuls Cac exerçant dans des pays tiers (article L 822-2 II du code de commerce)

= à verser au H3C

Source : actuEL-expert-comptable

Jusqu'à 80 % de majoration de cotisations en cas de renseignements insuffisants

Par ailleurs, l'amendement prévoit un dispositif de sanctions à l'encontre du commissaire aux comptes. Premièrement, en cas de retard de paiement. Le délai légal serait fixé à 30 jours à compter de la date d’exigibilité des cotisations et contribution. Ainsi, le montant de ces dernières serait majoré du taux d’intérêt légal mensualisé par mois de retard à compter du 31ème jour, est-il précisé. Tout mois entamé étant compté en entier.

Deuxièmement, en cas de communication d'informations insuffisante. Avec une gradation des sanctions. Lorsque le redevable "ne donne pas les renseignements demandés nécessaires à la détermination de l’assiette des cotisations et de leur mise en recouvrement", le montant des cotisations est majoré de 10 %. La majoration monte à 40 % "lorsque le document contenant les renseignements n’a pas été déposé dans les 30 jours suivant la réception d’une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d’avoir à le produire dans ce délai". Et jusqu'à 80 % lorsque ce document n’a pas été déposé dans les 30 jours suivant la réception d’une deuxième mise en demeure. A noter que les agents du H3C seraient autorisés à demander aux professionnels "tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites". Le droit de reprise des cotisations par le Haut conseil s’exercerait jusqu’à la fin de la 6ème année qui suit celle au titre de laquelle les cotisations sont dues.

Ces nouvelles modalités doivent à présent être validées par le Sénat.

 

Une erreur matérielle réparée
Dans la PDF iconversion initiale de l'amendement n° 54, une erreur s'était glissée concernant le champ d'application des deux nouvelles cotisations sur le chiffre d'affaires. Le gouvernement avait indiqué "les commissaires aux comptes inscrits sur la liste mentionnée au II de l'article L 822-1" du code de commerce, au lieu de "la liste mentionnée au I de l'article L 822-1". Ce qui changeait complètement le périmètre ; les premiers représentant les Cac étrangers et les seconds les Cac français et européens (schématiquement). Cette "erreur matérielle", confirmée par la CNCC et la Chancellerie, a été corrigée par l'Assemblée nationale via un PDF iconamendement rectifié. Mais à quel moment ? La question se posait de savoir quel amendement avait été adopté en séance publique. En effet, la retranscription des débats indique l'examen d'un amendement n° 54 "rectifié" alors que dans la vidéo de la séance publique, la présidente de séance ne mentionne que "l'amendement n° 54". Or un texte ne peut pas être corrigé après son adoption (ou alors en nouvelle lecture). Les services de l'Assemblée nationale nous ont indiqué qu'il s'agissait bien de l'amendement rectifié qui avait été déposé en séance et adopté.

 

Céline Chapuis

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