Agriculture, sylviculture et biodiversité

19.08.2016

Gestion d'entreprise

Établir un juste équilibre entre exploitation des ressources et du vivant et valorisation de la biodiversité, tel est l'objet de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages qui s'appuie sur des principes comme la conciliation des activités humaines et la biodiversité ainsi que le partage des avantages tirés de l'exploitation de la biodiversité. Cette loi du 8 août 2016 met donc en place des outils juridiques novateurs et associe pleinement le monde agricole à cet enjeu éthique, économique et social.

 La loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages est parue au journal officiel du 9 août après un long parcours parlementaire débuté le 11 juin 2014. Elle vient compléter la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la nature ainsi que la loi n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages.
Le concept de base est de retrouver une nature équilibrée, diversifiée et, par là-même, protectrice des écosystèmes et de la ressource en eau dégradés, entre autres, par l’activité humaine : la nature, notamment les sols (C. envir., art. L. 411-5, L. art. 7),  relève du domaine public en tant que garant du devenir des générations futures.  Ce concept  s’exprime dès l’article 2  de la loi qui énonce de grands principes venant enrichir le droit de l’environnement : complémentarité entre agriculture et environnement, solidarité écologique, préjudice écologique, non-régression du droit de l’environnement, ce dernier principe côtoyant les principes de précaution, de prévention, de participation du public et de pollueur/payeur. Le législateur, de façon pragmatique,  les traduit en engagements et obligations tout au long des 174 articles qui composent la loi.
Directement concernée par ce texte qui s'inscrit dans le prolongement de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 pronant l'agroécologie : l’activité agricole. L'activité agricole modèle la nature en façonnant les paysages (bocages, prairies, zones humides, forêts, etc.)  et en travaillant la terre depuis des générations.  L’agriculteur et le producteur sont, en effet,  en contact permanent avec les espaces,  les milieux naturels et le vivant sur lesquels ils influent. Ils sont  donc directement en prise avec la biodiversité définie comme  la variabilité des organismes vivants de toute origine, y compris les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques, ainsi que les complexes écologiques dont ils font partie. Elle comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces, la diversité des écosytèmes ainsi que les interactions entre organismes vivants (C. envir., art. L. 110-1 ; L. art. 1er).
Aussi la volonté du législateur est-elle d’impliquer le monde agricole dans un collectif responsable du patrimoine commun que sont les ressources naturelles nécessaires à la vie et au développement futur de l’humanité. Dans cet objectif, la démarche juridique passe essentiellement par la contractualisation, le partenariat et les obligations réelles plutôt que par un renchérissement des normes environnementales qui irait au-delà des exigences européennes, notamment des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC).

 

Le principe de complémentarité entre agriculture, sylviculture et environnement

Ce principe a été introduit par l’Assemblée nationale en première lecture. Il étoffe le livre préliminaire du code rural et de la pêche maritime qui valorise, depuis la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014, les finalités économiques, sociales, territoriales et environnementales des pratiques agricoles et sylvicoles.  Il met en exergue les interactions entre nature et agriculture au sein du code de l’environnement (C. envir. art. L. 110-1, 8°). Les surfaces agricoles et forestières sont reconnues comme porteuses d’une biodiversité spécifique et variée et les activités agricoles et forestières comme vecteur d’interactions écosystémiques permettant la préservation des continuités écologiques et des services environnementaux qui utilisent les fonctions écologiques d'un écosytème pour restaurer, maintenir ou créer la biodiversité (exemple : l’élevage herbivore).

Ainsi est affirmée la finalité environnementale :

- de l’assolement en commun (C. rur., art. L. 411-39-1), Au-delà de son objectif initial économique ou social qui reste la vocation première de ce mode de gestion collectif mené dans le cadre d’une société en participation,  peuvent  désormais s’inscrire d’autres finalités, notamment la préservation de la qualité de l’eau et la protection de la biodiversité, ces finalités restant complémentaires et optionnelles (L. art. 75). Cet outil devrait inviter les agriculteurs à mutualiser leurs pratiques agro-écologiques dans des conditions économiques soutenables ; 

-  des actions de remembrement parcellaires (C. rur., art. L. 123-1). L’aménagement foncier agricole et forestier (AFAF) a principalement pour objet d’améliorer l’exploitation en regroupant notamment les parcelles morcelées, l’article 80 de la loi lui adjoint un objectif environnemental supplémentaire ;  

- des associations foncières pastorales (C. rur., art. L. 135-1). L’article 88 de la loi habilite ces associations à concourir à la préservation de la biodiversité et des paysages dans leur périmètre.

Sont par ailleurs facilitées les opérations de déboisement favorables au patrimoine naturel. De même, est simplifiée la compensation pour les opérations de défrichement, prévue par l'article L. 341-6 du code forestier (C. for. art. L. 341-6, L. art. 167). 

Les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural ( SAFER), riches de leur expertise en matière d'acquisition  foncière, sont, quant à elles, appelées à prêter main-forte aux agences de l'eau. Ces dernières peuvent désormais leur déléguer la mise en oeuvre de leur droit de préemption sur les espaces naturels sensibles prévu à l’article L. 215-5 du code de l’urbanisme (C. envir., art. L. 213-8-2, L. art. 60).

Et lorsque les outils contractuels se révèlent inaptes à endiguer certains usages, notamment dans l’agriculture intensive, le législateur a recours à l’interdit. Il complète ainsi le plan Ecophyto piloté par le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt et destiné à réduire l’utilisation des produits phytosanitaires en France tout en assurant un niveau de production élevé tant en quantité qu’en qualité. Ce plan, qui repose sur l’innovation et la formation des agriculteurs, oriente les pratiques agricoles vers des outils innovants de modulation. L’article 125 le renforce en interdisant, à compter du 1er septembre 2018, l’utilisation des produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives de la famille des néonicotinoïdes et de semences traitées avec ces produits. Le législateur a en effet considéré que seule une interdiction de portée générale pouvait être efficace. (C. rur., art. L. 253-8). Soucieux d'accorder aux exploitants le temps de s'adapter à cette interdiction et de trouver des pratiques alternatives, il a toutefois prévu des dérogations qui peuvent être accordées jusqu’au 1er juillet 2020 par arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture, de l’environnement et de la santé, sur la base d’un bilan établi par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail; Cette agence compare les bénéfices et les risques liés aux usages des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes autorisés en France avec ceux liés aux usages de produits de substitution ou aux méthodes alternatives disponibles. Le bilan porte sur les impacts sur l’environnement, notamment sur les pollinisateurs, sur la santé publique et sur l’activité agricole.

Le législateur rend également plus strict l’utilisation de produits phytosanitaires destinés à être mélangés à de l’eau dans une cuve, l’épandage ou la réutilisation de  fonds de cuve ; autant de manipulations agricoles courantes désormais encadrées par l’autorité administrative dans l’intérêt de la santé publique et de l’environnement (C. rur., art. L. 253-7-2, L. art. 116).

Le tryptique "éviter, réduire, compenser" (ERC)

Depuis la loi du 10 juillet 1976, la France dispose d’une doctrine dite séquence ERC. Rattachées au principe de prévention, ces trois règles, introduites désormais dans les principes d’action du livre premier du code de l’environnement, tracent la ligne de conduite à tenir  : avant tout, éviter toute atteinte  à la biodiversité, voire tendre vers un gain de biodiversité, à défaut, réduire les effets négatifs sur la biodiversité, enfin, en dernier ressort, compenser les atteintes résiduelles à la biodiversité dans le respect de leur équivalence écologique.  Tout projet d’aménagement doit intégrer, dès l’étude d’impact, toutes les incidences de ce projet sur la biodiversité parallèlement au rapport coût/bénéfice.

La compensation

En tant qu’ultime recours, la compensation ne peut se substituer à l’évitement et la réduction. Sa mise en œuvre est, du reste, encadrée par les articles L. 163-1 à L. 163-5 du code de l’environnement (L. art. 69) . Elle doit :

- être mise en œuvre en priorité sur le site endommagé ou, en tout état de cause, sur des sites naturels à proximité et tenir compte des espèces, des habitats naturels et de fonctions écologiques affectées.  Doit être évité tout morcellement, par exemple, un lieu de 10 hectares ne peut être compensé par une dizaine de parcelles d’un hectare ;

- se traduire par une obligation de résultats. Il ne suffit pas d’intégrer dans un projet d’aménagement la dimension biodiversité, encore faut-il garantir l’atteinte des objectifs visés. A cet effet, l’administration peut exiger des garanties financières de l’aménageur et faire procéder d’office à ses frais aux opérations de compensation.

Les personnes soumises à cette mesure de compensation ont trois possibilités : compenser directement, signer un contrat avec un opérateur de compensation et, dans ce cadre, les exploitants agricoles peuvent valoriser économiquement leurs services environnementaux et/ou acquérir des unités de compensation auprès d’une réserve d’actifs naturels. Ces trois possibilités peuvent être alternatives ou cumulatives.

Pour répondre à la mise en œuvre de cette mesure qui va accentuer les besoins fonciers, il est prévu de mettre à la disposition des aménageurs un inventaire national des espaces naturels publics sous-exploités ou abandonnés à fort potentiel de gain écologique (L. art. 70), une banque de biodiversité  comme il en existe aux Etats-Unis depuis les années 1970 en vue de géolocaliser et d’acquérir des unités de compensation dans des réserves d‘actifs naturels (voir l’avis adopté par l’AN, 9 déc. 2015).

L'obligation réelle environnementale

Il existe toutefois  une  alternative à l’acquisition foncière : l’obligation réelle environnementale. L’article 72 de la loi donne la possibilité au propriétaire d’un bien immobilier de créer à sa charge et à celle des propriétaires successifs des obligations réelles ayant pour finalité le maintien, la conservation, la gestion ou la restauration d’éléments de la biodiversité ou de fonctions écologiques. (C. envir., art. L. 132-3). Il s’agit d’une démarche volontaire concrétisée dans un contrat recueillant l’accord des deux parties ; ainsi le bailleur de biens ruraux ne peut mettre en œuvre une obligation réelle environnementale qu’avec l’accord préalable du preneur, accord qui est automatiquement donné en l’absence de réponse à une demande dans les 2 mois.  Le contrat est établi en la forme authentique, mais n’est pas passible de droits d’enregistrement et ne donne pas lieu à perception de la taxe de publicité foncière. Il prévoit la durée des obligations (obligations de faire ou de ne pas faire), les engagements réciproques en vue de mettre en place des actions pérennes en faveur de la biodiversité, les possibilités de révision et de résiliation.

Ce dispositif fiscal de faveur pourra être renforcé, à compter du 1er janvier 2017, par une exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties sur délibération du conseil municipal (L. art. 72).

Remarque : moins couteux que la politique d’acquisition foncière et plus souple car fondé sur la volonté des parties, ce mécanisme devrait  se révéler attractif ; du reste, la loi prévoit la remise au Parlement d’un rapport sur sa mise en œuvre dans les 2 ans (L. art. 72).
La solidarité écologique
La solidarité entre générations

Le nouveau principe de solidarité écologique est désormais  inscrit à l’article L. 110-1, 6° du code de l’environnement. Il repose sur l’idée d’héritage, la génération actuelle engageant forcément la suivante et impose de prendre en compte dans toute prise de décision  publique ayant une incidence notable sur l’environnement des territoires concernés les interactions des écosytèmes, des êtres vivants et des milieux naturels ou aménagés.

Ainsi, l’article 74 donne-t-il compétence à l’autorité administrative pour créer un zonage prioritaire pour la biodiversité afin de maintenir l’habitat de certaines espèces protégées.   Ce zonage s’accompagne d’un programme d’actions visant à restaurer, à préserver et à mettre en valeur de façon durable les parcelles comprises dans ce zonage.   Dans ce cas, les outils contractuels peuvent se révéler insuffisants au regard de l'objectif, et l’agriculteur peut se voir imposer des pratiques agricoles obligatoires favorables à l’espèce considérée ou à ses habitats. Dans l'hypothèse où elles impliquent surcoût ou perte de revenu, ces pratiques peuvent bénéficier d’aides (C. envir., art. L. 411-2).

Par ailleurs, l’article 85 complète la panoplie des outils de gestion du territoire par les communes en élargissant le champ des plans locaux d’urbanisme aux continuités écologiques (C. urb., art. L. 113-29). Les PLU peuvent désormais classer en espaces de continuités écologiques des éléments des trames verte et bleue dans la mesure où ils sont nécessaires à la préservation ou à la remise en bon état des continuités écologiques.  Ce classement interdit tout changement d’affectation, mode d’occupation ou utilisation du sol de nature à compromettre la préservation ou la remise en état des espèces préservées, à l’exception des travaux d’exploitation courante et d’entretien normal. Aussi les élus locaux devront-ils tenir compte des activités humaines, notamment agricoles, dans l’identification des espaces, leur localisation et les prescriptions de nature à assurer leur préservation (C. urb. , art. L. 113-30).

Enfin, le document d'aménagement des bois et forêts relevant du régime forestier peut désormais identifier des zones susceptibles de constituer des réserves biologiques dont les objectifs sont la préservation ou la restauration du patrimoine naturel.  Ces réserves sont  ensuite créées par arrêté conjoint des ministres chargés des forêts et de l'environnement, après avis du Conseil national de la protection de la nature (CNPN), puis accord de la collectivité ou de la personne morale intéressée lorsque tout ou partie des bois et forêts concernés leur appartiennent . Elles sont gérées conformément à un plan de gestion approuvé par les mêmes ministères (C. for., art. L. 212-2-1, L. art. 163).

L'entraide entre agriculteurs

L’article 12 de la loi étend les possibilités d’entraide entre agriculteurs. Jusqu’à présent le droit d’entraide permettant l’échange de semences ou de plants n’appartenant pas à une variété protégée par un certificat d’obtention végétale (COV) et produits par une exploitation hors de tout contrat de multiplication de semences ou de plants destinés à la commercialisation, n’était ouvert qu’aux membres de groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) créés par la loi d’avenir pour l’agriculture n° 2014-1170 du 13 octobre 2014. Élargir le champ du droit d’échange de semences et de plants de ferme va permettre  à l’ensemble des agriculteurs de valoriser leur expertise et d’adapter les variétés cultivées au milieu et aux habitudes alimentaires sans revenir sur le régime de protection conféré aux semenciers (C. rur., art. L. 315-5). Les articles 9 et 10 complètent ce dispositif d’entraide élargi en sécurisant sur le plan juridique les découvertes et usages des agriculteurs. Ils interdisent, en effet,  la brevetabilité de produits (végétaux et animaux) obtenus par des précédés essentiellement biologiques, y compris les éléments qui constituent ces produits et les informations génétiques qu’ils contiennent (C. propr. intell. , art. L. 611-19). Cette limite à l’appropriation privée des gênes natifs et de leurs produits contenant une information génétique met un terme à l’incertitude juridique qui plane au-dessus des pratiques de sélection et de reproduction  opérées par des générations d’agriculteurs et présentant des caractéristiques similaires à celles protégées par un brevet. L’article L. 613-2-3 du code de la propriété intellectuelle est ainsi complété  : « la protection conférée par un brevet relatif à une matière biologique dotée, du fait de l'invention, de propriétés déterminées ne s'étend pas aux matières biologiques dotées de ces propriétés déterminées, obtenues indépendamment de la matière biologique brevetée et par procédé essentiellement biologique, ni aux matières biologiques obtenues à partir de ces dernières, par reproduction ou multiplication ».

Le dispositif "APA" d'accès aux ressources génétiques et le partage des avantages

Par cette loi, le législateur entend lutter contre la biopiraterie en réglementant l’accès aux ressources génétiques et en valorisant les connaissances traditionnelles de communautés d’habitants qui y sont associées. Il met en œuvre, par là-même, le protocole de Nagoya de 2010 ratifié au niveau européen.  Ce protocole encadre les activités de recherche en se reposant sur 3 volets : accès régulé aux ressources génétiques, partage des avantages issus de ces ressources et respect des règles par les utilisateurs. L’article 37 de la loi (C. envir., art. L. 412-3 et s) transpose en droit interne les dispositions du règlement européen (UE) 511/2014 du 16 avril 2014  et de son règlement d’exécution (UE) 2015/1866 du 13 octobre 2015 et crée deux procédures :

- une procédure de déclaration dans deux hypothèses : l’accès aux ressources en vue de l’étude et la recherche sans objectif direct de développement commercial et toute situation d’urgence mettant en cause la santé humaine, animale ou végétale et requérant un accès aux ressources génétiques ,

- une procédure d’autorisation pour l’accès aux ressources à d’autres fins et l’utilisation de connaissances traditionnelles associées.

Le partage juste et équitable des avantages peut prendre plusieurs formes : enrichissement et préservation de la biodiversité in situ et ex situ, maintien des connaissances traditionnelles, notamment par la création de bases de données, développement de la coopération et de la contribution aux activité de recherche,  restauration de services écosystémiques, contribution au développement local de filières permettant l’utilisation et la valorisation de la biodiversité, versement d’une contribution financière plafonnée à 5 % du chiffre d’affaires annuel mondial hors taxes  réalisé grâce aux produits obtenus (C. envir. art. L. 412-3 et L. 412-8).

De nombreuses exclusions du champ d’application de ce dispositif sont prévues notamment les échanges au sein des communautés d’habitants entre elles ainsi que les connaissances et techniques traditionnelles associées aux modes de valorisation définis à l’article L. 640-2 du code rural et de la pêche maritime dont bénéficient les produits agricoles, forestiers ou alimentaires et les produits de la mer. Il s’agit des produits bénéficiant de modes de valorisation : produits sous signes d'identification de la qualité et de l'origine (label rouge,  appellation d’origine, indication géographique et spécialité traditionnelle garantie, agriculture biologique) ou sous mentions valorisantes (mention montagne, mention fermier ou produit de la ferme ou à la ferme, produit pays, produit de montagne, produit issu d'une exploitation de haute valeur environnementale) (C. envir., art. L. 412-5).

De lourdes sanctions accompagnent ce dispositif en cas de non-respect : un emprisonnement de un an et 150 000 € d’amende, portée à 1 million € si l’utilisation des ressources ou connaissances est commerciale et interdiction d’accès aux ressources génétiques pouvant aller jusqu’à 5 ans (C ; envir., art. L. 415-3-1, L. art. 39).

 

Le préjudice écologique

L’article 4 de la loi inscrit la notion préjudice écologique dans le code civil (C. civ., art. 1386-19 à 1386-25 et 2226-1). La consécration de la réparation du préjudice écologique pur constitue une avancée vers la pleine application du principe du pollueur-payeur. Elle vise à sécuriser la jurisprudence, qui ne se heurtera plus à l’exigence par le droit commun de la responsabilité civile du caractère personnel du dommage, et à la conforter puisque la Cour de cassation a consacré, au sujet de l’affaire « Erika », la notion de préjudice écologique (Cass. crim., 25 sept. 2012, n° 10-82.938, n° 3439 P + B + R + I).

Désormais, toute personne responsable d’un préjudice écologique est tenue de le réparer, celui-ci consistant en une atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes ou aux bénéfices collectifs tirés par l’homme de l’environnement. L’action en réparation est ouverte à toute personne ayant qualité et intérêt à agir, telle que l’Etat, l’Agence française pour la biodiversité, les collectivités territoriales et leurs groupements dont le territoire est concerné, ainsi que les établissements publics et les associations, agréées ou créées depuis au moins 5 ans à la date d’introduction de l’instance, qui ont pour objet la protection de la nature et la défense de l’environnement. La réparation du dommage s’effectue prioritairement en nature et à défaut, par le versement de dommages et intérêts, affectés à la réparation de l’environnement, au demandeur ou à l’Etat. Le but poursuivi en matière environnementale étant d’éviter la réalisation du dommage, constituent également un préjudice réparable, les dépenses exposées pour prévenir sa réalisation, pour éviter son aggravation ou pour en réduire les conséquences. Le juge peut, à ces fins, prescrire des mesures raisonnables. L’action se prescrit par 10 ans à compter du jour où le titulaire de l'action a connu ou aurait dû connaître la manifestation du dommage et peut être engagée pour des préjudices dont le fait générateur est antérieur à la date de publication de la loi (9 août 2016).

Comme tout exploitant, l' agriculteur, du fait de ses activités agricoles qui engendrent pollution avec les excédents de déchets animaux et la contamination des eaux par les nitrates et les pesticides, notamment,  risque de se trouver confronté à cette nouvelle responsabilité civile.

Remarque : un bulletin spécial va être consacré à l'analyse de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 et de ses implications pour l'activité agricole. 

 

 

 

 

Sylviane Mambrini, Dictionnaire permanent Entreprise agricole

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