"Le contrat de chantier sera un véritable gage d'attractivité pour la R&D"

"Le contrat de chantier sera un véritable gage d'attractivité pour la R&D"

10.10.2018

Convention collective

Après la métallurgie, c’est au tour des industries pharmaceutiques de revoir leur convention collective. Pascal le Guyader, directeur des affaires générales, industrielles et sociales du Leem (entreprises du médicament) et Malo Gayrin, juriste en droit social, décryptent les enjeux de cette négociation. Parmi les projets, la création d'un CDI de chantier et la réduction du délai de carence pour les CDD.

Pourquoi envisagez-vous une refonte de votre convention collective ?

Convention collective

Négociée par les organisations syndicales et les organisations patronales, une convention collective de travail (cct) contient des règles particulières de droit du travail (période d’essai, salaires minima, conditions de travail, modalités de rupture du contrat de travail, prévoyance, etc.). Elle peut être applicable à tout un secteur activité ou être négociée au sein d’une entreprise ou d’un établissement.

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Pascal le Guyader : ce projet est essentiellement lié aux ordonnances Macron du 22 septembre 2017. Nous souhaitons redéfinir les sujets dévolus à la négociation de branche et/ou d’entreprise, en fonction des trois blocs de matières désormais soumis à la négociation collective. L’objectif n’est pas de refondre totalement la convention collective, la dernière négociation remonte à 2009, mais de la revisiter afin d’être en cohérence avec le droit positif, à l’aune des ordonnances. Nous souhaitons que notre future convention collective soit en phase avec nos pratiques RH et le droit social. Nous allons donc étudier les dispositions obsolètes ou, à l’inverse, nécessaires voire indispensables à notre activité.

Quelles nouvelles mesures pourraient intégrer les dispositions d’ordre conventionnel ?

Pascal le Guyader : nous sommes favorables à l’introduction du CDI de chantier. Ce type de contrat serait particulièrement adapté à notre activé, la recherche et développement. Précisions qu’il faut environ dix ans entre la création d’une molécule et la mise sur le marché d’un médicament. C’est pourquoi nous souhaitons proposer des contrats de cinq ans maximum à nos équipes, contre 24 mois actuellement. Ce délai nous permettrait, en outre, de garder nos talents, notamment les doctorants, qui préfèrent actuellement poursuivre leurs recherches aux Etats-Unis. C’est un gage d’attractivité. Nous prévoyons également une durée minimale de six mois.

Quels sont les autres chantiers ? 

Malo Gayrin : nous souhaitons aussi réduire le délai de carence entre deux CDD successifs sur un même poste, comme l’autorise désormais le code du travail. Cette option permettrait d’apporter plus de flexibilité à nos entreprises mais aussi à nos collaborateurs qui souhaitent voir leur contrat renouvelé au plus vite. D’autant que notre secteur a très peu recours à l’intérim. L’idée est de ramener le délai de carence à cinq jours calendaires, contre un tiers de la durée du dernier CDD actuellement.

Le temps de travail sera-t-il également un sujet de négociation ?

Pascal le Guyader : non. D’ailleurs, nous n’avons jamais réussi à négocier sur cette thématique. Seule avancée : nous avons conclu, en mars dernier, un accord-type sur le temps de travail pour les entreprises de la branche employant moins de 50 salariés. Il prévoit un premier aménagement du temps de travail, organisé en heures sur l’année, avec la possibilité d’un octroi de jours de repos. La durée de travail de référence est alors de 1 607 heures. Il ouvre également la possibilité d’utiliser le forfait annuel en jours y compris pour les salariés non cadres, sous réserve qu’ils soient autonomes. Il retient une durée de travail de 218 jours maximum. 3 200 PME sont ainsi concernées par ce texte

Quid du système de classification ?

Malo Gayrin : le système de classifications, qui date de 1994, sera également à l’étude. L’objectif est de le moderniser tout en gardant des critères classants.

La pénibilité sera-t-elle au menu des discussions ?

Malo Gayrin : nous allons introduire le principe de prévention de la pénibilité dans la convention collective, ce principe n’existant pas actuellement. Mais nous allons renvoyer ce sujet à une négociation postérieure, en 2019. Avec parmi les thèmes de discussion : le rappel des obligations de l’employeur, la nécessité d’avoir des équipements de protection et bien entendu la diminution de la pénibilité. Dans notre activité, nous sommes peu touchés par les facteurs pénibilité, définis par le code du travail, hormis les facteurs portant sur le travail de nuit et le travail en équipes successives alternantes.

Dans quel état d’esprit sont les partenaires sociaux ?

Pascal le Guyader : tous les partenaires sociaux ne sont pas favorables aux ordonnances, loin s’en faut. Pour eux, il n’y a aucune urgence à revisiter la convention collective. Mais nous avons des discussions franches et ouvertes avec la CFDT, l’Unsa, la CFTC et la CFE-CFC. La CGT, opposée aux ordonnances Macron, participe néanmoins activement et positivement aux discussions. En revanche, c’est plus compliqué avec FO.

Quel délai prévoyez-vous pour cette négociation ?

Pascal le Guyader : la négociation a commencé en mars. Nous avons d’ores et déjà eu cinq réunions. Et nous pensons la boucler d’ici à décembre. Rappelons-le : nous ne signerons que s’il y a un accord majoritaire. C’est le mandat que nous ont donné les entreprises adhérentes de notre branche. Mais nous restons confiants, nous n’avons pas fait ce travail pour rien.

Anne Bariet
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