Les TIC ne font plus peur aux associations

Les TIC ne font plus peur aux associations

10.03.2017

Action sociale

Surprise : alors que les associations sociales et médico-sociales peinent à prendre le virage numérique, une étude de Recherches & Solidarités et Solidatech montre qu’elles considèrent l’avenir bien différemment. Les technologies de l'information et de la communication (TIC) pourraient même devenir la nouvelle machine à projets du secteur.

Le retard pris par le secteur social et médico-social dans sa transition numérique pourrait n’être bientôt plus qu’un lointain souvenir. Tel est le constat qui ressort d’une enquête sur les intentions d’adoption des nouvelles pratiques numériques, effectuée dans les milieux associatifs par le réseau d’experts Recherches & Solidarités, en collaboration avec Solidatech, un programme d’accompagnement au numérique.

Conduite tout au long de l’année 2016 auprès d’un panel de 2 700 dirigeants et de 6 700 bénévoles, celle-ci apporte un éclairage très précis sur l’évolution des usages, les freins et les attentes à l’intérieur des quatre grands champs associatifs : sport, culture, loisirs-éducation populaire, sanitaire et social, dernier domaine qui regroupe aussi bien les opérateurs médico-sociaux que les acteurs de l’insertion, de l’aide aux patients, de la famille ou de la ville.

Augmentation générale des usages du numérique

Comparant les résultats de 2016 avec une première étude de 2013, les auteurs pointent une évolution « notable » du regard porté sur le numérique, le qualifiant aujourd’hui de « très positif ». En trois ans, une large diversification des usages s’est opérée dans l’ensemble des champs associatifs. Si la création d’un site internet reste toujours une priorité pour 73 % des associations, nombreuses sont celles à avoir découvert entre-temps les atouts du numérique pour la gestion de leur activité ou les relations avec les personnels et les usagers. L’utilisation des réseaux sociaux a explosé, passant de 36 % en 2013 à 62 % en 2016, et le recours aux outils collaboratifs (partage de documents, de calendrier, de gestion des tâches, télé-conférence, etc.) a quant à lui doublé, passant de 22 % à 43 %.

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Contre toute attente, les associations sanitaires et sociales se révèlent dans cette étude parmi les plus intéressées par les développements du numérique. Elles sont déjà les championnes de l’usage des outils de reporting et d’évaluation, effet direct de la demande des financeurs pour une plus grande traçabilité des actions : 57 % les utilisent, contre 45 % en moyenne dans les autres secteurs. Mais c’est surtout par leur projection dans l’avenir qu’elles se distinguent. Alors que, par exemple, 8 % seulement des associations ont recours aujourd’hui à la formation à distance, 49 % des associations sanitaires et sociales anticipent l’utilisation d’outils en ligne du type tutoriels ou Moocs pour accroître la performance des salariés et des bénévoles (41 % dans les autres secteurs). Face à des budgets de plus en plus contraints, elles fondent aussi de grands espoirs dans la collecte de dons en ligne. Aujourd’hui pratiquée par 13 % des associations (ONG ou grosses associations nationales caritatives), cette nouvelle façon de se constituer des marges de manœuvre pourrait devenir la norme des associations sanitaires et sociales : 42 % de leurs responsables indiquent réfléchir à l’ajout de dispositifs de collecte de fonds sur leur site internet.

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Inclusion numérique, citoyenneté : la libération des projets

Les associations du sanitaire et social semblent également avoir trouvé dans le numérique un nouvel espace d’élaboration de projets. 57 % ont mis en place ou envisagent des actions numériques au service de publics spécifiques, contre 45 % en moyenne dans les autres champs associatifs. « La complexité des projets varie et n’implique pas nécessairement des compétences techniques importantes, l’objectif étant d’accélérer son impact social par le biais du numérique », précisent toutefois les auteurs de l’étude.

L’inclusion numérique des publics fragiles figure au rang des priorités, avec d’ores et déjà une multitude de réalisations : création de cybercafé en Ehpad afin d’apprendre aux résidents à utiliser des solutions de web-conférence pour dialoguer avec les familles ; ouverture d’espaces publics numériques (EPN) pour accompagner la dématérialisation des services publics ; mise à disposition d’équipements numériques adaptés au handicap moteur (tactiles, guidage au regard, au son), aux déficients visuels, aux enfants autistes… Mais le numérique apparaît aussi comme un moyen d’associer les habitants à la fabrique des décisions politiques, via des plateformes en ligne de démocratie participative, ou, plus largement, de favoriser l’insertion des personnes les plus éloignées de la société.

Mais les freins persistent…

Au-delà des différences par secteur, les associations se retrouvent néanmoins toutes pour pointer la persistance de difficultés d’appropriation. Une grande majorité des dirigeants interrogés souligne l’insuffisance des moyens financiers et matériels. Le manque de temps est ensuite évoqué par près des trois quarts des associations, et le manque de savoir-faire par près des deux tiers. Les associations sanitaires et sociales doivent en outre plus souvent que d’autres faire face à la frilosité de certains membres de leurs équipes (57 % contre 50 % dans la culture ou les loisirs éducation populaire).

Attestant de ces difficultés, si un tiers des dirigeants d’associations ont saisi que les outils numériques doivent s’inscrire dans une démarche associative globale, rares sont ceux à considérer qu’une véritable stratégie numérique a été mise en place dans leur association ou à inscrire le numérique dans leur plan de développement.

Les experts de Recherches & Solidarités et de Solidatech en appellent à l’installation « d’une culture numérique partagée », en constatant que très souvent celle-ci n’est portée dans l’association que par un petit noyau de convaincus. « Il est important d’élargir le cercle des initiés pour permettre à chacun d’avoir un bagage numérique minimum et pour impliquer tous les acteurs », appuient-ils. Sans juger de la « légitimité des frilosités qui s’expriment », tout particulièrement dans le champ social, les auteurs invitent donc les dirigeants à « considérer le numérique comme un sujet de discussions, voire de débats au sein des associations. »

Retrouvez nos précédents articles sur le défi des TIC dans le travail social :

Tous les articles de cette série sont rassemblés ici (lien à retrouver sur le site de tsa, dans la colonne de droite, rubrique "Dossiers").

Michel Paquet
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