Risques professionnels : des députés proposent le retour du suivi individuel

Risques professionnels : des députés proposent le retour du suivi individuel

27.07.2018

Gestion du personnel

Une commission d'enquête livre 43 propositions afin d'améliorer la prévention des maladies professionnelles dans l'industrie. Le texte suggère aussi de repenser la gestion de la santé au travail, notamment en dotant chaque salarié d'un dossier médical personnel de santé au travail. De quoi alimenter le dialogue social prévu à la rentrée par le président de la République ?

"Il est insupportable aujourd'hui qu'on puisse continuer à être malade du travail, et parfois à en mourir", s'indigne Pierre Dharéville. Le député PCF des Bouches-du-Rhône présentait mercredi 25 juillet les conclusions de la commission d'enquête sur les maladies professionnelles dans l'industrie dont il est le rapporteur. Un sujet auquel cet élu est particulièrement sensible : sa circonscription abrite le complexe industrialo-portuaire de Fos-sur-Mer dans lequel se côtoient depuis 50 ans industries chimiques, pétrochimiques et sidérurgiques.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

Découvrir tous les contenus liés

L'industrie est un terreau particulièrement fertile s'agissant des risques professionnels. Les ouvriers y sont largement exposés aux troubles musculo-squelettiques, et leurs conditions de travail les rendent vulnérables aux maladies psychiques. Le rythme intensif du travail, les contraintes horaires (travail de nuit notamment) ainsi que la menace de plans de licenciement - fréquents dans un contexte de mondialisation et de dumping social - alimentent le risque de dépression chez les salariés. Mais le risque le plus grave reste le risque chimique, qui expose les salariés à des risques de cancers professionnels, qui peuvent dévoiler leurs premiers symptômes chez les travailleurs vingt ou trente ans après les premières expositions.

"Nous espérons que ce rapport donnera un nouvel élan pour la santé au travail dans l'industrie, elle en a bien besoin, résume Pierre Dharéville en remettant le rapport entre les mains de François de Rugy, président de l'Assemblée nationale. Et d'une manière générale, la santé au travail doit être remise à l'ordre du jour des débats parlementaires".

Une traçabilité de la carrière des salariés

L'un des objectifs prioritaires, lutter contre la sous-déclaration des maladies professionnelles. Mais pour ce faire, affirme Pierre Dharéville, "il faut se donner les moyens de reconnaître". Autrement dit, assurer la lisibilité des différentes expositions auxquelles le salarié a été confronté dans sa carrière. Cela passe notamment par deux étapes, selon le rapport.

  • Imposer la rédaction d'une fiche de risque pour chaque poste

Serait mis en place par l'employeur, pour chaque poste exposant à des risques de maladies professionnelles, une fiche de risques construite sur le modèle de la notice de poste fournie aux salariés exposés à des agents chimiques dangereux (article R. 4412-39 du code du travail). Cette fiche récapitulerait risques professionnels, expositions et mesures de prévention et de protection propres au poste. Elle serait accessible au salarié afin de garantir son information vis-à-vis des risques. Le débat houleux autour du dispositif de prise en compte de la pénibilité au travail sera-t-il rouvert ?

  • Attacher à chaque personne un dossier médical personnel de santé au travail

La santé du travailleur est la résultante des risques auxquels il est exposé du fait de l'intégralité de son parcours professionnel, constate la commission. Or, les documents actuels remis au salariés sont attaché à son emploi, et non à son parcours professionnel. Afin de tracer l'ensemble des expositions, le rapport préconise de créer un dossier médical personnel de santé au travail (DMPST). Il rassemblerait notamment les lieux d'exercice de l'activité professionnelle, les emplois occupés, les fiches d'exposition, les actes d'examen et de suivi effectués dans le cadre de la médecine du travail... A la différence du dossier médical de santé au travail qui existe déjà (article L. 4624-8 du code du travail), ce dossier serait lié à la personne pour l’intégralité de sa vie active et post-active. Le patient pourrait autoriser son médecin de soins à consulter ce DMPST afin d'affiner son diagnostic et déterminer la possibilité que la pathologie ait une cause professionnelle.

Notons que le rapport recommande aussi, en cas de maladie professionnelle résultant d’expositions subies chez plusieurs employeurs, de permettre que la caisse primaire opère un partage des responsabilités entre les employeurs successifs.

Un "malus" en cas d'inaction de l'employeur

Action, réaction. La commission souhaite que toute reconnaissance du caractère professionnel d’une maladie débouche sur une action de prévention. Un "cercle vertueux" devrait ainsi être mis en place : à chaque maladie professionnelle constatée dans l'entreprise, une investigation devra être menée dans l'entreprise en associant notamment le comité social et économique (CSE), et un plan devra être mis en oeuvre pour éliminer le risque. "Si l’employeur ne peut garantir qu’il a éliminé le risque, notamment en limitant l’exposition, une majoration devrait être imputée par la CARSAT sur son taux de cotisation AT-MP", souligne la commission.

Une unité de prévention pour chaque site industriel

Le secteur de l'industrie est particulièrement concerné par le développement massif du recours à la sous-traitance et à l'intérim. Avec des implications importantes en matière de prévention des risques : certains employeurs n'hésitent pas à recourir à la sous-traitance afin de contourner la loi et décharger sur d'autres salariés (parfois moins bien avertis et protégés) le risque professionnel. Pour responsabiliser les donneurs d'ordre en matière de gestion des risques, le rapport préconise deux mesures.

  • Mettre en place un statut de "responsable de l'environnement de travail"

L'entreprise qui recourt au travail intérimaire ou à la sous-traitance sur site deviendrait le responsable de l’environnement de travail. La rapport propose que ce dernier soit titulaire d'un devoir de vigilance, qui l'oblige à produire périodiquement des rapports sur les actions entreprises, soit un responsable de second rang de la santé des travailleurs. Ces nouvelles obligations s'articuleraient avec celles prévues par la loi du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre.

  • Constituer des CSSCT de site

Puisqu'elles seraient responsables de sites, les entreprises industrielles qui dépassent un certain seuil auraient la faculté de mettre en place une commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) de site. C'est déjà le cas pour les installations nucléaires ainsi que pour les chantiers de bâtiment et travaux publics. Une médecine du travail de site aurait également une compétence de droit sur le site considéré.

Une culture de la prévention dans l'entreprise

La commission propose que le comité social et économique (CSE) et la CSSCT soient associés à l'élaboration du document unique. Ils seraient même consultés sur le diagnostic des risques et les mesures de protection, à défaut de CSE, la consultation obligatoire des salariés sur leur évaluation des risques de leur poste pourrait être mise en place. Le rapport suggère également une mise à jour périodique du document unique plus adaptée à la taille de l’établissement (actuellement chaque année pour toutes les entreprises) pour les entreprises n’étant pas exposées à des risques particuliers. Enfin, alors que la CSSCT n'est obligatoire que dans les entreprises ou établissements d'au moins 300 salariés (ou classés site Seveso, installation nucléaire...),le rapport propose de l'imposer dans toutes les entreprises industrielles d'au moins 50 salariés à risque élevé d'accident du travail et maladies professionnelles.

L'ensemble des constats et propositions du rapport Dharéville, de même que les futurs rapports Frimat (suivi de l'exposition des salariés aux agents chimiques dangereux) et Lecocq (santé au travail) devraient alimenter le débat dès la rentrée. Le président de la république Emmanuel Macron a annoncé en début de mois qu'il ouvrirait à nouveau les discussions entre les partenaires sociaux sur le thème de la santé au travail, dans le cadre d'un nouveau "contrat social".

Laurie Mahé Desportes
Vous aimerez aussi