A France Télévisions, FO estime que réunir le CSE n'est pas la priorité, et qu'il vaut mieux saisir les représentants de proximité et les CCSCT

A France Télévisions, FO estime que réunir le CSE n'est pas la priorité, et qu'il vaut mieux saisir les représentants de proximité et les CCSCT

24.03.2020

La crise sanitaire inquiète fortement les personnels de France Télévisions, qui a enregistré 53 cas de coronavirus, en dépit de mesures de protection décidées par la direction, rapporte Eric Vial. Ce dernier, délégué syndical central FO, estime que la priorité n'est pas de réunir les CSE mais de faire travailler sur le sujet représentants de proximité et commissions santé, sécurité et conditions de travail. Interview.

Quelle est la situation de France Télévisions, qui emploie 4 500 personnes au siège parisien, au regard du coronavirus ?

Environ 270 salariés, au lieu de 4 500 habituellement, continuent de travailler au siège parisien, mais France Télévisions, c'est aussi 4 000 personnes dans le réseau de France 3. Nous avons 53 cas avérés de coronavirus, et 280 cas suspects de personnes qui sont donc en quatorzaine.

Les journalistes qui sortent ont bricolé des perches pour éviter les contacts rapprochés

 

 

Ces cas ont entraîné la fermeture de nombreux sites comme Antibes, Archan, Brest, Metz, Nîmes, Pau, Perpignan, Rodez, Saint-Etienne, Valence. D'autres sites plus importants, comme Strasbourg, ont connu des cas mais n'ont pas fermé. Il y a eu des désinfections. De façon générale, nous estimons que la direction a pris la mesure de la gravité de la situation. Le nombre de personnes se trouvant en régie et dans les salles de montage a été réduit, même si cela pose encore un problème de promiscuité dans des salles sans fenêtre. Les journalistes qui doivent sortir pour les reportages inventent aussi leur propre matériel de protection : ils ont bricolé des perches de son pour éviter les contacts rapprochés, ils mettent du cellophane sur les micros, etc.

Les personnels sont-ils inquiets ?

L'inquiétude des personnels est très forte. Ce qui me remonte très souvent, c'est l'inquiétude de gens qui travaillent encore, ou qui travaillaient jusqu'il y a peu, et qui craignent de transmettre la maladie à des proches fragiles, des personnes âgées, des diabétiques, etc.

Les salariés qui travaillent au maquillage manquent de moyens

 

C'est tout notre dilemme : comment continuer à porter notre mission de service public sans se mettre en danger ni mettre en danger nos proches ? En ce moment, l'inquiétude la plus forte concerne les maquilleurs et maquilleuses, un travail indispensable en télé, car nous continuons à être devant les caméras et à avoir des invités. Ces salariés touchent la peau des personnes, et n'ont pas assez de matériel : il faudrait des pinceaux et un jeu de poudre par invité. Par ailleurs, nous manquons de masques.

Pour quelles raisons selon vous ?

Nous en avions, suite à la crise H1N1, mais l'Etat les a réquisitionnés. Nous avons aussi subi des vols de gels hydroalcoolique, mais il y a des distributeurs de gel dans tous les établissements, même si certains sont défectueux . Les salariés doivent aller voir leur supérieur pour avoir des lingettes désinfectantes...

Pourquoi, selon vous, la priorité n'est-elle pas de réunir le CSE ?

Certaines organisations demandent la réunion du CSE central. Je les comprends, mais à mes yeux ce n'est pas la priorité car le CSE est, comme l'était le CE, une instance politique et que la situation à laquelle nous devons faire face est une urgence sanitaire.

Avant le CSE, nous aurions réuni le CSHCT, pas le CE

 

Il me paraît donc plus pratique et plus urgent de passer par les représentants de proximité et par les commissions santé, sécurité et conditions de travail (il y en a dans toutes les antennes) pour traiter d'abord les conditions de travail, pour que les élus aient des informations sur la situation, qu'ils préconisent des choses à l'employeur, qu'ils transmettent les éléments aux salariés. C'est ce que nous aurions fait avant le CSE : on n'aurait pas réuni le CE mais le CHSCT. D'autre part, le CSE de France 3 par exemple, c'est 26 élus, plus les représentants syndicaux, ça représente vite 40 personnes (*). Comment faire une réunion correcte avec des élus à leur domicile, sans matériel adapté ?

Comment parvenez-vous à mener vos missions de représentant du personnel ?

Je suis passé totalement en télétravail. 90% de mon temps, c'est du téléphone, ou des réunions par visioconférence pour suivre la situation, notamment avec la direction. J'échange également beaucoup avec toutes nos équipes et nos délégués syndicaux. Parfois, en cas d'urgence, par exemple en cas de risque grave ou de refus opposé à un salarié qui veut faire jouer son droit de retrait, je suis amené à me déplacer. Je dois aussi parfois intervenir pour faire appliquer les consignes dans certains établissements. Mais, encore une fois, la direction me semble avoir pris la mesure du risque sanitaire.

(*) Voir notre article du 21/3/2018 sur l'accord sur le CSE de France Télévisions

Bernard Domergue

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