La banque française BNP Paribas, jugée cette semaine à Paris pour pratiques commerciales trompeuses et qui fait déjà front contre des accusations de complicité de crimes contre l'humanité, voit encore s'allonger la liste des griefs à son encontre avec cette sanction du régulateur américain, qui lui reproche d'avoir manqué à ses obligations de lutte contre le blanchiment.
La FINRA (Financial Industry Regulatory Authority), l’autorité de régulation de l’industrie financière aux États-Unis, a condamné deux filiales de la BNP Paribas à une amende de 15 millions de dollars. Selon le régulateur, elles n'ont pas réussi à élaborer et mettre en œuvre un programme anti-blanchiment incluant des politiques et des procédures permettant de détecter et déclarer les activités potentiellement suspectes.
Défaillance du système de détection des opérations suspectes
L’enquête, qui visait les dépôts, la revente et le transfert d’argent sur des actions de petite valeur unitaire (« penny stock »), a notamment révélé que jusqu’en 2016, le programme de lutte contre le blanchiment d’argent ne comportait aucune surveillance permettant de détecter les transactions suspectes, impliquant par exemple des entités ou des territoires à risque élevé.
Un personnel en sous-effectif pour évaluer les alertes
La FINRA pointe surtout du doigt des moyens humains nettement insuffisants, et pour cause : sur une période de deux ans, un seul salarié était chargé d’examiner les alertes relatives aux virements, dont le nombre s’élève tout de même à 70 000, et pour une valeur totale de 233 milliards de dollars.
Le personnel en charge du programme anti-blanchiment ne disposait pas non plus d’un accès aux informations pourtant essentielles lui permettant de déterminer si l’activité examinée était suspecte, comme les antécédents du client, ou bien l’historique des comptes.
Une procédure de traitement des alertes défaillante
Enfin, le programme ne comprenait pas de procédure décrivant au personnel comment mener un examen des alertes générées par le système de surveillance électronique, ni comment documenter leurs conclusions.
En tout, ce sont 3 448 virements, pour une valeur totale de 2,5 milliards de dollars, qui n’ont pas été examinés afin de déterminer s’ils concernaient des entités ou des territoires à risque élevé, ou s’ils représentaient le produit d’activités commerciales potentiellement suspectes.
Calcul de l’amende
Pour déterminer le montant de la sanction, le régulateur a pris en compte l'étendue de la période sur laquelle ces manquements se sont déroulés (soit une durée de quatre ans), l'absence de réponse de l'entreprise aux signaux d’alarme en temps opportun, et le volume d’activités potentiellement suspectes non surveillé et déclaré par la BNP.
Mais le régulateur a aussi pris en considération les efforts de la banque pour remédier à cette situation.
La BNP a 90 jours pour attester de la conformité de ses procédures dans la lutte contre le blanchiment d’argent.
Élise Le Berre, Solution Compliance et éthique des affaires