L'Elysée a présenté mercredi 24 juin aux partenaires sociaux l'évolution envisagée de l'activité partielle. Dans le futur régime de droit commun, à partir du 1er octobre, les entreprises seront aidées à hauteur de 60% de l'indemnité versée au salarié. Dans le régime conditionné à un accord collectif à partir du 1er juillet, cette aide pourra représenter jusqu'à 85% de l'indemnité versée aux salariés.
Lors de la réunion avec les partenaires sociaux mercredi 24 juin, Emmanuel Macron a présenté plusieurs mesures destinées à préserver l'emploi et à enrayer une hausse inquiétante du chômage en France. L'Unedic, organisme gestionnaire de l'assurance chômage, anticipe en effet "un choc macro-économique sans précédent" et la destruction de 900 000 emplois en 2020. Le président de la République a notamment annoncé le nouveau dispositif d'activité partielle longue durée.
Deux dispositifs d'activité partielle vont finalement coexister, comme l'indique sur un tableau comparatif le gouvernement (lire en pièce jointe et ci-dessous).
D'une part, le régime de droit commun prendra le relais de l'activité partielle actuelle au 1er octobre. L'allocation versée aux entreprises représentera, comme depuis le 1er juin (lire notre brève dans cette édition), 60 % de l'indemnité versée aux salariés. Ces derniers percevront une rémunération allant de 100 % de leur salaire net au niveau du Smic à 72 % au niveau de 1,3 Simc, avec un plafond de 6 0% de 4,5 Smic.
A noter qu'au renouvellement de cette demande d'activité partielle (décision unilatérale de l'administration), chaque salarié devra avoir pris 5 jours de congé. L'employeur, indique le document transmis hier aux partenaires sociaux, devra prendre un engagement de maintien de l'emploi pendant la durée de l'activité partielle.
Les frais de formation seraient pris en charge à hauteur de 70% des coûts, un accord sur la mobilisation du compte personnel de formation (CPF) étant "souhaité".
Côté dialogue social est prévu un compte-rendu trimestriel au CSE.
D'autre part est mise en place, à compter du 1er juillet 2020, une activité partielle de longue durée, jusqu'à présent dénommée "Arme" (activité réduite pour le maintien en emploi). Désormais, l'exécutif préfère employer le sigle plus inoffensif d'APLD, le dispositif semblant se rapprocher des défunts accords du même nom. Reste à vérifier s'il donnera les mêmes droits à expertise pour les représentants du personnel...
Contrairement au dispositif classique largement utilisé depuis le confinement début mars et réservé aux entreprises dont les difficultés sont passagères, l'activité partielle de longue durée doit permettre de soutenir les employeurs connaissant une baisse d'activité à long terme, de 6 mois à 2 ans, afin de conserver emplois et compétences.
Ce régime nécessite la conclusion d'un accord d'entreprise ou de branche étendu (validé par la Direccte) "sur la base d'un diagnostic et d'une prévision d'activité et d'emploi partagés". L'accord définira les engagements d'emploi et seul l'accord permettra des suppressions d'emplois éventuelles, une formulation encore vague. L'accord devra définir le volume maximal d'heures chômées, d'un maximum de 40% du temps de travail global.
Les salariés percevront, assure l'exécutif, 100 % du salaire net au niveau du Smic et 84 % du salaire net au niveau de 1,15 Smic, avec un plafond de 70 % de 4,5 Smic.
L'aide publique versée à l'entreprise sera égale à 80 % de l'indemnité versée au salarié (soit davantage que le dispositif classique), et même de 85 % pour les accords signés avant le 1er octobre 2020, ce qui constitue une incitation à négocier pour les employeurs.
Pour bénéficier de ce financement de l'activité réduite de longue durée, l'entreprise devra conserver au moins 60 % de son activité, soit au maximum 40 % d'heures chômées indemnisables. Il ne sera donc pas possible de bénéficier de ce régime si l'activité de l'entreprise cesse totalement. De plus, le gouvernement souhaite que ce temps chômé soit utile et dédié à la formation afin de maintenir le niveau de compétence des salariés. Les frais de formation seront donc pris en charge à hauteur de 80 %, un accord étant, là aussi, souhaité sur la mobilisation du compte personnel de formation.
Un compte rendu trimestriel sera a minima fait devant le CSE et l'accord devra comprendre une clause de suivi.
Un plan d'action sur le travail détaché sera par ailleurs présenté par le ministère du Travail. Le thème de l'emploi des jeunes sera également étudié d'ici septembre.
La CFDT se félicite dans un communiqué de la nouvelle approche de l'exécutif sur l'activité partielle basée sur l'incitation à négocier des accords collectifs. "Dans les entreprises qui vont reprendre progressivement leur activité, ces négociations doivent permettre de construire des équilibres au plus près de la réalité du travail, avec les représentants des salariés. C’est une des conditions indispensables pour aborder et surmonter collectivement les difficultés auxquelles nombre de salariés et d’entreprises vont devoir faire face dans les semaines à venir. Ces accords devront également permettre de débattre enfin des engagements des entreprises en termes de maintien de l’emploi. Une avancée notable et concrète dans le suivi et l’évaluation des aides publiques", a réagi la confédération.
La CFTC, également favorable à ces évolutions, a cependant jugé sur twitter, par la voix de son président Cyril Chabanier, que l'activité partielle de longue durée négociée par accord "devrait prioritairement viser les difficultés conjoncturelles des entreprises dont l'activité est dégradée par le Covid". Le syndicat "s'inquiète de ne pas retrouver une distinction plus claire dans les dispositifs présentés".
De son côté, le président de la CFE-CGC a estimé les contraintes sur l'activité partielle de longue durée pas suffisantes : "S’agissant de l’argent public, il faut conditionner les aides et je trouve le dispositif un peu lâche", a dit François Hommeril à la chaîne RT France.
Evolution envisagée par l'exécutif des régimes d’activité partielle
Activité partielle actuelle |
Activité partielle de droit commun cible |
Activité partielle de longue durée |
|
Déclenchement |
Décision unilatérale |
Décision unilatérale |
Accord d’entreprise ou accord de branche de branche étendu, et validation par la Direccte Sur la base d’un diagnostic et d’une prévision d’activité et d’emploi partagés |
Durée |
Jusqu’à 6 mois |
3 mois renouvelables maximum 6 mois |
6 mois renouvelables maximum 2 ans |
Durée du travail |
L’employeur sollicite un nombre d’heures « chômables » Le volume est autorisé et à postériori l’entreprise adresse une demande de remboursement pour les heures réellement chômées. |
Inchangé |
L’accord définit le volume maximal d’heures susceptibles d’être chômées, au maximum égal à 40% du temps de travail. Volume apprécié salarié par salarié, mais modulable sur la durée de l’accord |
Salaire versé |
70% du salaire brut (84% du salaire net) Plancher = SMIC |
De 100% du salaire net au niveau Smic à 72% du salaire net au niveau de 1,3 Smic |
De 100% du salaire net au niveau Smic à 84% du salaire net au niveau 1,15 Smic |
Aide publique |
Avant Covid : Covid : Depuis le 1er juin : 60% du brut (85 % de l’indemnité versée) Plafond : 70% de 4,5 SMIC |
60% de l’indemnité versée Plancher = 90% SMIC Pas de cotisations Au renouvellement, chaque salarié doit avoir pris 5 jours de congé |
80% de l’indemnité versée (85% pour les accords signés avant le 1er octobre) Plancher = 90% du SMIC Pas de cotisations |
Engagements en termes d’emploi |
Non obligatoire |
Maintien dans l’emploi pendant la durée de l’activité partielle |
L’accord définit les engagements en termes d’emploi. Seul l’accord peut permettre des suppressions d’emploi éventuelles. |
Formation |
Covid : Prise en charge des frais de formation à 100% |
Prise en charge des frais de formation à hauteur de 70% des coûts. Accord sur la mobilisation du CPF souhaité. |
Prise en charge des frais de formation à hauteur de 80% des coûts. Accord sur la mobilisation du CPF souhaité. |
Dialogue social |
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Compte-rendu trimestriel minimum au CSE |
Définition dans l’accord des critères et moyens de suivi de l’accord Compte-rendu trimestriel minimum au CSE |
Entrée en vigueur |
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1er octobre |
1er juillet |