Le Sénat modifie le calendrier d'application de la CSRD

Le Sénat modifie le calendrier d'application de la CSRD

10.03.2025

Hier soir, les sénateurs ont voté un report de 4 ans de l'obligation de publier un rapport de durabilité pour les entreprises assujetties à la directive européenne à compter des exercices 2025. Le gouvernement a changé de position en pleine séance publique.

Mais que s'est-il passé ce lundi 10 mars au sein de l'hémicycle du Sénat ? Les parlementaires ont validé une mesure qui reporte l'application de la directive CSRD [corporate sustainability reporting directive], avec l'approbation du gouvernement.

Demande de décalage

Retour en arrière, quelques jours plus tôt. Le projet de loi "portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes" dit "DDADUE 5", en cours de discussion parlementaire, passe en commission au Sénat. Le 5 mars, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable adopte un amendement prévoyant un report de quatre ans de la mise en oeuvre des obligations de la directive CSRD pour certaines catégories d'entreprises (création d'un nouvel article 7A). 

L'ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 serait ainsi modifiée : les entreprises de la troisième vague assujetties à la CSRD (PME cotées) devraient publier un rapport de durabilité afférent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2030 (au lieu de 2026) et les entreprises de la quatrième vague (grandes entreprises non européennes) seraient tenus d'établir un reporting de durabilité pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2032 (au lieu de 2028).

Les auteurs de cet amendement (du groupe Les Républicains) justifient cette mesure par des "difficultés opérationnelles significatives" pour les entreprises. Ce décalage de mise en application des nouvelles applications offrirait "l'opportunité de tirer pleinement parti des enseignements des premières publications des sociétés cotées en 2025", arguent les sénateurs.

"Retournement de veste"

Le 10 mars, le projet de loi est discuté en séance publique. Trois amendements identiques de suppression de ce nouvel article 7A (report de quatre ans) ont été déposés, dont un amendement gouvernemental. "La transposition de la directive CSRD est une obligation européenne. Il n'est donc pas possible d'en reporter l'ordonnance de transposition déjà en vigueur, expose le gouvernement. Les dispositions du droit national seront amenées à évoluer une fois la négociation européenne "omnibus" achevée". Pour rappel, la Commission européenne a présenté, le 26 février dernier, une proposition de révision de la directive CSRD qui prévoit notamment de reporter de deux ans l'application de la CSRD pour les entités des deuxième et troisième vagues. Ces mesures doivent encore passer devant le Parlement européen et le Conseil de l'UE. 

Mais coup de théâtre, hier soir, dans l'hémicycle : Marc Ferracci, ministre chargé de l'industrie et de l'énergie, annonce le retrait de son amendement. Ce que certains sénateurs ne comprennent pas. "Je suis un peu atterré par votre retournement de veste en séance !", s'exclame Simon Uzenat (groupe socialiste). Les autres amendements de suppression de l'article 7A sont présentés mais sont rejetés par la Chambre haute en séance publique.

Report pour les entreprises des vagues 2, 3 et 4

Résultat : le Sénat adopte un article 7A modifié qui prévoit un report de quatre ans pour les entreprises des vagues 3 et 4 mais également de la deuxième vague (entreprises non cotées répondant à au moins deux des trois critères suivants : plus de 250 salariés, bilan supérieur à 25 millions d'euros et chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euros). Ainsi :

  • les entreprises de la 2e vague devraient publier un rapport de durabilité afférent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2029 (au lieu de 2025). Donc publication en 2030 au lieu de 2026 ;
  • les entreprises de la 3e vague devraient publier un rapport de durabilité afférent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2030 (au lieu de 2026). Donc publication en 2031 au lieu de 2027 ;
  • les entreprises de la 4e vague devraient publier un rapport de durabilité afférent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2032 (au lieu de 2028). Donc publication en 2033 au lieu de 2029.

"Il s'agit ici de trouver des voies de passage (...) afin de tenir compte de ce que sont les contraintes (...) que fait peser la directive CSRD en fonction des tailles d'entreprises", tente d'expliquer Marc Ferraci. "Ce qui nous semble une voie d'équilibre c'est (...) de considérer que ce qui est fait ne doit pas être remis en question et qu'en revanche, pour les années 25 et suivantes, il y a un avis de sagesse sur la mise en oeuvre et le report de l'application de la directive se justifie", déclare le ministre.

Cette nouvelle mesure sera examinée par une commission mixte paritaire dans les prochains jours (le projet de loi est en procédure accélérée et l'Assemblée nationale a déjà examiné le texte).

Céline Chapuis

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