Projet de loi sur le passe vaccinal : les apports du Sénat, les points d’achoppement en commission

Projet de loi sur le passe vaccinal : les apports du Sénat, les points d’achoppement en commission

13.01.2022

Hier après-midi, la commission mixte paritaire (CMP) a échoué à trouver un accord sur le texte voté par le Sénat mercredi soir. Le projet retourne donc en commission des lois puis en séance publique. En attendant les prochains épisodes de ce feuilleton parlementaire, voici une synthèse des apports du Sénat sur le texte et des points d’achoppement qui ont fait échouer la CMP.

Malgré l’opposition du gouvernement sur de nombreux points, les sénateurs sont parvenus à modifier le projet de loi (voir leur version en pièce jointe), notamment sur les exceptions au passe vaccinal dans les transports interrégionaux et sur les sanctions des entreprises ne pratiquant pas suffisamment le télétravail. Ce dernier point a ensuite fait l’objet d’âpres négociations en commission mixte paritaire (CMP), sans que celle-ci ne parvienne à résoudre les différends.

Le passe vaccinal uniquement pour les majeurs

Le projet de loi initial visait une application du passe vaccinal à partir de 12 ans. Les députés ont relevé cet âge à 16 et les sénateurs l’ont porté à 18. Le passe vaccinal ne serait donc applicable qu’aux personnes majeures si cette version était conservée.

La disposition issue de l’Assemblée permettant de maintenir sans passe vaccinal les sorties scolaires, périscolaires et extrascolaires pour les 12 – 15 ans n’avait donc plus lieu d’être pour les sénateurs: elle a été supprimée du texte pour l'instant. reste à savoir si l'Assemblée nationale reviendra sur ces points pour maintenir sa version du texte.

De nouvelles exceptions dans les transports interrégionaux

Par ailleurs, les discussions ont été très nourries au Sénat (comme à l’Assemblée) sur les exceptions au passe vaccinal dans les transports interrégionaux. Les sénateurs sont parvenus à faire voter une exonération « pour se rendre à la convocation d’une juridiction ou d’une autorité administrative ou chez un professionnel du droit pour un acte ou une démarche qui ne peut être réalisé à distance, ou pour l’exercice par un professionnel du droit de son ministère concourant à l’exercice des droits de la défense ». Il faudra cependant présenter un test négatif de moins de 72 heures. Ces exceptions s’ajoutent donc à celles du texte initial, à savoir l’urgence et un motif impérieux d’ordre familial, de santé. Le Sénat a également fait entrer dans ces exceptions le motif professionnel. 

Critères d’application du passe, jauges dans les salles de sport et de spectacle

L’Assemblée nationale avait prévu de tenir compte, pour l’application du passe vaccinal, des caractéristiques et des capacités d’accueil des établissements recevant du public. Le Sénat a poussé la logique plus loin en prévoyant des jauges précises :

  • dans les stades accueillant plus de 5 000 personnes, la limite des 5 000 personnes pourra être complétée par une jauge supplémentaire de 50 % de la capacité d’accueil restante ;
  • même principe dans les salles de spectacle pouvant accueillir 2 000 personnes : au-delà de cette capacité, une jauge supplémentaire de 50 % de la capacité d’accueil restante pourra s’appliquer.

De plus, les sénateurs ont tenu à fixer des limites d’application au passe vaccinal « lorsque le nombre d’hospitalisations liées à la covid-19 est supérieur à 10 000 patients au niveau national, ou dans les départements où moins de 80 % de la population dispose d’un schéma vaccinal complet contre la covid-19 ou dans lesquels une circulation active du virus est constatée, mesurée par un taux d’incidence élevé de la maladie covid-19 ».

Les points de discorde en commission mixte paritaire

Les sénateurs ont d’emblée souhaité supprimer les amendes administratives à l’égard des entreprises ne pratiquant pas suffisamment le télétravail. L’article correspondant a donc été supprimé du texte, malgré un amendement gouvernemental tendant à rétablir la version de l’Assemblée. Ce point a semble-t-il contribué à l’échec de la CMP. Notons également que les sénateurs ont rejeté les amendements tendant à créer un arrêt temporaire d’activité Covid-19 permettant à l’inspecteur du travail de soustraire immédiatement un travailleur du risque d’exposition par la prescription d’un arrêt temporaire de la partie des travaux ou de l'activité en cause.

Autre point d’achoppement : le contrôle d’identité par les exploitants des établissements recevant du public. Des débats houleux avaient déjà eu lieu à l’Assemblée nationale, notamment au sujet des sanctions à l’égard des exploitants ne réalisant pas ce contrôle. Les sénateurs ont quant à eux supprimé ces dispositions, créant un nouveau différend ayant empêché la CMP de trouver un accord hier.

Et maintenant ?

La date de l'entrée en vigueur au 15 janvier n'est plus qu'un lointain souvenir. Le texte retourne en commission des lois à l'Assemblée nationale (1), puis repassera en séance publique. Il pourrait atterrir de nouveau au Sénat ce week-end, voire lundi prochain en fonction du temps que la navette parlementaire va nécessiter. Suivra ensuite un éventuel recours devant le Conseil constitutionnel...

 

(1) Actualisation du vendredi 14 janvier : le texte a déjà été adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale dans la nuit du 13 au 14/1. Voir ici le lien vers la version des députés

Marie-Aude Grimont

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