Quelles recommandations de la CNCDH sur la transposition de la directive lanceurs d'alerte ?

06.10.2020

La Commission nationale consultative des droits de l'homme demande que le champ de l'alerte soit élargi aux personnes morales telles les organisations syndicales et les associations ainsi que la mise en place d'une procédure spécifique en cas d'alerte touchant à la défense nationale.

Dans un avis publié au JO du 4 octobre 2020, la Commission nationale consultative des droits de l'homme appelle le gouvernement à transposer a maxima la directive européenne relative aux lanceurs d'alerte adoptée en octobre 2019, et ce afin de garantir une protection efficace des personnes qui signalent des infractions ou, plus largement, des menaces graves pour l’intérêt général. Ainsi, sur les dix-neuf recommandations de la CNCDH, et au-delà des exigences prévues par la directive elle-même, les mesures suivantes peuvent être signalées :

  • l'élargissement du dispositif de protection aux personnes morales et au "facilitateur" qui apporte une assistance au lanceur d’alerte ;
Remarque : la directive prévoit la notion de facilitateur qu’elle définit comme "une personne physique qui aide un auteur de signalement au cours du processus de signalement dans un contexte professionnel et dont l’aide devrait être confidentielle" (Dir., art. 5 et 8). Au même titre que les lanceurs d’alerte, ces facilitateurs doivent bénéficier des mesures de protection prévues par la directive (art. 4, § 4, a)) ;
  • la remise entre les mains d'une autorité publique indépendante unique, de la responsabilité d’informer, de conseiller et d'apporter un soutien et une assistance financière ;
  • l'exclusion de l'application de l'article L. 1235-3 du code du travail en cas de licenciement d'un lanceur d'alerte ;
Remarque : la Cour de cassation a considéré que le licenciement d'un lanceur d'alerte était atteint de nullité. En conséquence, l'article L. 1235-3 du code du travail n'est pas applicable au licenciement d'un lanceur d'alerte. La CNCDH recommande de mentionner expressément dans le code du travail que le licenciement d'un lanceur d'alerte étant atteint de nullité, l'article L. 1235-3 du code du travail n'est pas applicable.
  • l'établissement d'une procédure spécifique pour les signalements d'alerte touchant le secret de la défense nationale ;
Remarque : compte tenu de l'exclusion prévue par la loi Sapin 2, dès lors qu'une alerte touche le secret de la défense nationale les lanceurs d'alerte ne sont susceptibles de bénéficier que de la jurisprudence de la CEDH, issue de l'arrêt Guja contre Moldova (cet arrêt consacre pour la première fois un statut et une protection au lanceurs d'alerte). La CNCDH estime que cette situation n'est protectrice ni des impératifs de la défense nationale, puisqu'elle conduit au risque de divulgation publique de faits et d'éléments qui devraient rester secrets, ni des lanceurs d'alerte eux-mêmes. Elle considère donc qu'il serait plus protecteur tant des intérêts de la défense nationale que des lanceurs d'alerte eux-mêmes que le législateur adopte une procédure spécifique.
  • l'accès au droit d'asile pour les lanceurs d’alerte de nationalité étrangère. Plus précisément, la CNCDH recommande que les lanceurs d'alerte puissent présenter la demande depuis leur lieu de séjour à l'étranger.
Remarque : actuellement, la reconnaissance de la qualité de réfugié est conditionnée par l’exigence posée par le juge français de la présence du demandeur d’asile sur le territoire (CE, Ord. 9 juill. 2015, n° 391392).
Stefano Danna, Solution Compliance et éthique des affaires

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