Refus d'entrée et placement en zone d'attente : les avocats exclus des auditions

10.12.2019

Pour le Conseil constitutionnel, la présence de l'avocat lors de l'audition qui précède la notification d'un refus d'entrée et d'un maintien en zone d'attente n'est pas un droit fondamental.

Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) transmise par la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel confirme, par une décision du 6 décembre 2019, la constitutionnalité des articles L. 213-2 et L. 221-4 du Ceseda, qui ne prévoient le droit à un avocat qu’après la notification des décisions de refus d’entrée et de maintien en zone d’attente.
Remarque : la question était de savoir si, faute de prévoir que l’étranger puisse exiger d’être assisté d’un avocat lorsqu’il est entendu par les services de police avant qu’un refus d’entrée en France lui soit opposé et son maintien en zone d’attente notifié, ces dispositions méconnaissaient les droits de la défense ainsi que les exigences résultant des articles 7, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Il considère en effet que ces dispositions « ne consacrent pas un droit de l’étranger à exiger l’assistance d’un avocat lors des auditions organisées par l’administration dans le cadre de l’instruction de sa demande d’entrée en France ou pendant son maintien en zone d’attente ».
Une absence de droit à l’assistance d’un avocat qui ne porte pas atteinte aux droits constitutionnellement garantis par les articles 7, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 dès lors que :
- « les auditions effectuées dans le cadre de l’instruction administrative des décisions de refus d’entrée en France ou organisées pendant le maintien de l’étranger en zone d’attente n’ont pour objet que de permettre de vérifier que l’étranger satisfait aux conditions d’entrée en France et d’organiser à défaut son départ » et « ne relèvent donc pas d’une procédure de recherche d’auteurs d’infractions » ;
- les décisions de refus d’entrée et de maintien en zone d’attente (et celles relatives à l’organisation du départ) constituent des mesures de police et non « des sanctions ayant le caractère de punition ».
Dans ces conditions, les atteintes aux droits de la défense, au droit à la sûreté, à la présomption d’innocence et à la garantie des droits ne sont pas établies.
Enfin, le Conseil constitutionnel constate que la personne concernée peut en tout état de cause bénéficier de l’assistance d’un avocat dans le cadre des instances juridictionnelles relatives aux mesures en cause.
Remarque : dans sa décision, le Conseil constitutionnel rappelle qu’en l’absence de mise en cause d’une règle ou d’un principe inhérent à l’identité constitutionnelle de la France, il est incompétent pour contrôler des dispositions législatives qui se bornent à tirer les conséquences nécessaires de dispositions inconditionnelles et précises d’une directive ou des dispositions d’un règlement de l’Union européenne. Toutefois, en l’espèce, il contrôle les dispositions en cause, qui, bien qu’elles se rattachent à la mise en oeuvre d’un règlement (Règl. UE n° 2016/399, 9 mars 2016), ne se bornent pas à en tirer les conséquences, dès lors que le texte ne « comporte aucune disposition relative aux conditions dans lesquelles un étranger qui sollicite son entrée en France peut être assisté d’un avocat ».
Christophe Pouly, avocat

Nos engagements