Autorité parentale : l'audition de l'enfant doit être (re)demandée en appel

27.09.2017

Droit public

Le refus d'entendre l'enfant en première instance n'étant pas susceptible de recours, une nouvelle demande d'audition doit être formée en appel.

C'est un point clé de procédure sur le statut particulier de l'enfant dans le contentieux de l'autorité parentale qui a été examiné dans l'affaire tranchée le 14 septembre 2017 par la Cour de cassation. Il s'agissait en l'espèce du sort d'un pré-adolescent dont la mère contestait qu'il ne fût entendu, en dépit de sa demande faite auprès du juge aux affaires familiales, ni en première instance ni en appel.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Lourd conflit parental

Le contexte de l'affaire n'est pas indifférent. A la suite d'un lourd et long contentieux entre les deux parents, séparés depuis que l'enfant eût atteint l'âge de 2 ans, celui-ci a été confié à la mère qui a développé avec lui une relation qualifiée par les rapports d'expertise de "fusionnelle" en "négation complète du père". L'état mental de la mère, qui avait accusé mensongèrement le père de maltraitances et d'exhibitions sexuelles, était régulièrement questionné (psychose paranoïaque avec des risques de passage à l'acte) par les différents rapports ayant jalonné le contentieux parental vieux de plus de 8 années... sans pour autant remettre en cause la fixation de la résidence de l'enfant chez la mère. Le père en était r��duit à un droit de visite médiatisé qui s'est transformé en droit de visite élargi pour aboutir progressivement à un transfert complet de la résidence à une certaine échéance, l'enfant étant alors âgé de 10 ans, moyennant un suivi pédo-psychiatrique.

Refus d'audition du mineur par le JAF

Pour autant, l'enfant en opposition avec ce père dont il avait été semble-t-il volontairement éloigné (y compris géographiquement) par sa mère, ne souhaitait pas qu'il en fût ainsi et voulu faire connaître son sentiment au juge aux affaires familiales, ce que ce dernier refusa. En effet, si l'article 388-1 du code civil ouvre un droit pour l'enfant d'être entendu dans toutes les procédures qui le concernent, son audition peut être écartée par une décision spécialement motivée sur le discernement de l'enfant - lequel ne se réduit pas à la seule considération de son âge (Cass. civ. 1re, 18 mars 2015, n° 14-11.392) - sans pour autant se fonder sur l'appréciation de son intérêt à être entendu puisque cette audition est de droit si l'enfant en fait la demande.

Par la suite, la cour d'appel a fixé chez le père la résidence de l'enfant, sans l'avoir entendu. Considérant que les juges d'appel auraient dû procéder à l'audition de son enfant, la mère a formé un pourvoi en cassation. Sans succès.

Nécessité d'une nouvelle demande d'audition en appel

En effet, la décision statuant sur la demande d'audition en elle-même n'étant pas susceptible de recours (C. pr. civ., art. 338-5), bien que les motifs de refus doivent être mentionnés dans la décision au fond (C. pr. civ., art. 338-4) – afin d'être contrôlés –, il appartenait à l'enfant de demander son audition une nouvelle fois en appel. Comme le rappelle cet arrêt, la cour d'appel n'est pas tenue d'y procéder d'office, même si les motifs du refus opposés en première instance étaient contestés. C'est pour avoir négligé cette distinction fondamentale que le pourvoi de la mère est rejeté, laissant ainsi entière la question de fond qui sous-tend le droit de l'enfant à être entendu : toute parole de l'enfant est-elle bonne à entendre si elle est couverte par le conflit parental ?

Yann Favier, Professeur à l'université Jean Monnet (CERCRID, UMR-CNRS 5137)
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